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par Rim al-Khatib (Beyrouth)

Dimanche 30 janvier, une manifestation de soutien à la lutte des Palestiniens du Naqab, réclamant la libération des détenus et la fin de l’opération de défrichement des terres, a eu lieu dans la ville occupée d’al-Quds, devant le siège du gouvernement sioniste avec le slogan : « de Selwan à al-Araqib, le sioniste va déchanter »..

Il y a quelques semaines, les bulldozers de l’occupant sioniste ont commencé une opération de défrichage des terres du village Sa’wa de la communauté al-Atrash dans le Naqab, soulevant une vague de protestation de la part des habitants palestiniens, une des plus massives que la région du Naqab ait connu depuis la journée de la terre en 1976. Jeunes ou vieux, hommes ou femmes, toute la population de la zone visée par le défrichement s’est soulevée, lançant des bombes incendiaires et des pierres sur les policiers, arrachant les arbres que le KKL avait aussitôt plantés dans la zone défrichée, incendiant des véhicules des forces armées sionistes et lançant, au cours des manifestations, des slogans jugés « subversifs » par les sionistes, car les manifestants revendiquent leur appartenance palestinienne et leur détermination à défendre leurs terres.

C’est la reprise des plans de déplacement de la population du Naqab, et du vol de ses terres. Cette fois-ci l’opération est conduite par l’organisation sioniste KKL qui défriche les terres cultivées ou non, plante des arbres pour empêcher la population palestinienne de cultiver la terre, délimiter le village, l’isoler et le démolir par la suite. Le nouveau plan, après celui de Prawer, présente cependant une nouveauté : reconnaître un village sur 10, parmi les villages non reconnus, déplacer leurs habitants vers ce village, sans cependant étendre sa superficie, modifier le mode de vie des bédouins, pasteurs et cultivateurs à la fois, pour en faire des salariés dans les entreprises sionistes. L’essentiel reste de s’accaparer des terres (3% des terres du Naqab qui sont restées aux Palestiniens), situées au nord, entre la région d’al-Khalil (Cisjordanie) et la bande de Gaza. L’entité sioniste prévoit un grand chantier de constructions dans cette zone, allant des chemins de fer aux centrales électriques, mais surtout une zone militaire abritant les différents appareils militaires et sécuritaires de l’Etat colonial et colonialiste.

Profitant de la vague de criminalité au sein de la communauté palestinienne, dont la responsabilité incombe avant tout aux appareils sécuritaires sionistes, comme viennent de le prouver des développements réçents, le premier ministre sioniste a lancé le coup d’envoi de la guerre contre les Palestiniens du Naqab au mois de décembre dernier, les accusant de répandre la criminalité et de ne pas se comporter en « bons et loyaux citoyens», surtout depuis le mois de mai. La répression féroce de la police sioniste a fait de nombreux blessés, et plus d’une centaine de Palestiniens ont été arrêtés, dont des mineurs âgés de moins de 12 ans, lors des premières manifestations contre le défrichement, et des dizaines d’autres ont été accusés de « troubles ».

Le gouvernement sioniste, si fragile avec sa coalition, a décidé, non seulement de coloniser le Naqab (et non Néguev, qui est l’appelation sioniste de la région), mais de frapper un grand coup contre sa population, et contre les Palestiniens de 48 plus globalement, qui ont montré sans ambiguité de quel côté ils se situaient, lors de la guerre « Epée d’al-Quds » au mois de mai dernier.

En effet, depuis cette date, les Palestiniens de 48, que ce soit dans le Naqab, dans Yafa, al-Lid ou Akka, dans la zone du « Triangle » avec Umm al-Fahim, ou dans la Galilée, participent aux mobilisations générales du peuple palestinien, dans les prisons et al-Quds essentiellement, comme ils participent aux débats concernant l’avenir et les moyens de la lutte. Si les rencontres entre Palestiniens ne se sont pas arrêtés depuis 1967, ou même plus récemment, depuis l’Intifada al-Quds, pour former des comités communs de réflexion et de lutte, les nouvelles rencontres basées sur les acquis de « L’épée d’al-Quds » sont d’une autre nature, prenant en compte ces acquis et les perspectives qu’ils autorisent.

Une page a été tournée avec la guerre de mai dernier, qui a été suivie par la grande évasion des six prisonniers de la prison à haute sécurité de Gilboa, en septembre. Ces deux événements ont provoqué un choc en profondeur, au sein de la société coloniale sioniste, non seulement à cause des missiles tombés sur leurs villes, mais surtout à cause de l’attitude euphorique des Palestiniens de 48, qui ont participé, malgré leurs faibles moyens, à cette guerre, aux côtés de la résistance, et qui ont affirmé leur soutien aux prisonniers et à leur aventure de liberté.

Cette unité du peuple dans la lutte et pour la lutte est visible, ces jours-ci, dans la bataille que mènent les Palestiniens du Naqab (occupé en 48) contre l’entité sioniste. Dès les premiers jours, les Palestiniens de Cisjordanie, de Gaza ou de l’exil forcé, se sont sentis concernés par cette lutte, au point de manifester quotidiennement pour le Naqab, d’écrire des dizaines d’articles pour expliquer les enjeux de la résistance des villages, de mobiliser les réfugiés du Naqab exilés dans la bande de Gaza ou al-Khalil en affichant les liens de parenté qui relient cette population. Il ne s’agit plus d’une zone réservée à la solidarité des Palestiniens de 48. Dans les villages et localités en lutte en Cisjordanie, ou dans al-Quds, à Sheikh Jarrah, ‘issawiya ou al-Tur, les liens entre ce qui se déroule dans le Naqab et ces localités sont mis en valeur, et la solidarité s’organise dans la lutte, contre « le même ennemi » qui a volé le pays, qui vole les terres et démolit les maisons.

Dans les manifestations organisées par les Palestiniens de l’exil, notamment dans les villes européennes et américaines, le Naqab figure aux côtés de Sheikh Jarrah dans al-Quds et de Beita près de Nablus. Dans l’esprit de tous les Palestiniens et des Arabes mobilisés pour la question, la région du Naqab stratégique est devenue la zone qu’il faut protéger, coûte que coûte, contre les visées coloniales.

La lutte de la population du Naqab a aujourd’hui un enjeu qui dépasse la relation entre colonisateurs et colonisés à l’intérieur de l’entité sioniste. Elle est devenue une lutte à l’échelle de toute la Palestine, celle de tous les Palestiniens et la résistance, contre cette entité coloniale qui s’est installée au détriment de leur pays, la Palestine.

Photo:  des manifestants palestiniens prennent part à une manifestation contre le plan de l’occupant israélien de détruire le village Bédouin of Khan al-Ahmar. https://english.palinfo.com/photo-details/74e249ff-fbf6-46da-99be-5434536eb957

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