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L’expulsion de l’imam Hassan Iquioussen : l’extrême droite est au pouvoir !

Le 28 juillet le ministre de l’intérieur annonce que l’imam Hassan Iquioussen sera expulsé sans autre forme de procès. Rien d’étonnant dans les circonstances actuelles où la répression politique s’intensifie dans le contexte d’une crise économique qui s’aggrave et annonce des troubles et des violences politiques certains. Mais comme dans toute crise, il faut savoir faire diversion et surtout savoir concurrencer son adversaire politique d’extrême droite. Et en matière de pratiques politiques d’extrême droite le pouvoir actuel a quelques ressources.
Depuis le discours d’Emmanuel Macron aux Mureaux sur le « séparatisme islamiste », le rouleau compresseur de l’islamophobie est remis en marche dans la pure tradition coloniale et raciste à la française. La « loi séparatisme » est une injonction venue d’en haut et somme tous les musulmans d’accepter leur subordination à une lecture religieuse définie par le pouvoir. L’Etat laïc endosse les habits du théologien : il administre la sphère religieuse musulmane en imposant les règles d’organisation du culte, la tenue vestimentaire, les porte-paroles légitimes et les théologiens solubles dans la République. De ce point de vue, il agitcomme les dictatures du monde arabe. Contrôler le religieux pour contrôler le peuple. L’Etat laïc français fait dans le trafic d’opium du peuple.
Selon E. Macron, la loi « séparatisme » doit « conforter les principes républicains », mais en réalité elle traduit le souhait de l’Etat d’émanciper les musulmans malgré eux, sans eux et surtout contre eux. La France n’a pas rompu avec son histoire. L’assimilationnisme colonial est toujours de rigueur. Et l’arbitraire aussi : fermeture de lieux de culte et d’établissements scolaires, perquisitions humiliantes, enfants en garde à vue pour apologie du terrorisme présumée, etc. La répression est aveugle. Les musulmans, hommes, femmes, enfants, sont traités sans ménagement et désignés comme l’ennemi intérieur. Ils sont soumis à un état d’exception islamophobe.
En expulsant l’imam Hassan Iquioussen alors que celui-ci n’a jamais été ni jugé ni condamné pour les propos reprochés par le ministre de l’Intérieur, l’Etat français a franchi une nouvelle étape. L’arbitraire et le bon vouloir du prince peuvent frapper n’importe qui et à n’importe quel moment. Cet arbitraire révèle en réalité une évolution de l’Etat vers des formes dictatoriales plus directes qui ne visent pas seulement les musulmans. En témoignent les nombreuses dissolutions d’associations en vertu de cette loi séparatisme ». L’Etat sous Emmanuel Macron ne tolère plus l’exercice du jugement critique contre l’idéologie dominante. Critiquer la police, le sionisme ou l’islamophobie est criminel. La liberté d’expression devient criminelle. Cela a un nom : la dictature !
L’Etat français jette la suspicion sur les musulmans en France, mais il entretient de très bonnes relations avec les Etats musulmans qui n’hésitent pas à financer et promouvoir le terrorisme sous toutes ses formes contre les peuples. Business is business, on ferme les yeux sur les crimes commis par l’Arabie Saoudite dont le dirigeant n’hésite pas à découper en morceaux un opposant ou à massacrer le peuple yéménite… avec des armes françaises.
On reçoit un Ben Salmane dont les mains sont tachées de sang mais on expulse un imam à qui la justice n’a rien reproché ! La dictature de l’argent et des affaires a toujours existé mais aujourd’hui elle s’exerce de manière plus officielle.

Le Comité Action Palestine condamne l’expulsion de l’imam Hassan Iquioussen et réaffirme que le principe de la liberté d’expression est un droit inaliénable de l’individu.

4 août 2022




« Pas nécessaire d’être juif pour être sioniste »

Comité Action Palestine, 20 juillet 2022

Joe Biden, l’actuel président des Etats Unis, vient de terminer sa première visite en Palestine depuis son élection, visite pendant laquelle il a successivement rencontré Yaïr Lapid, le premier ministre de l’entité coloniale et  Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne.  

Décevant ceux qui avaient imaginé une possible inflexion de la politique américaine au Proche Orient après l’ère Trump, il a mis les choses au clair dès son arrivée, en ré-affirmant son adhésion pleine et entière au sionisme et en déclarant « qu’il n’est pas nécessaire d’être juif pour être sioniste ».

Formule claire et limpide donnant une fois de plus raison au Comité Action Palestine qui énonce dans ses principes fondateurs que tous ceux qui soutiennent et collaborent à la politique coloniale juive en Palestine sont sionistes, quelle que soit leur religion, nationalité et appartenance politique.

Lors de l’élection de Biden en 2020, le Comité Action Palestine titrait « Le nouveau Président américain : Israël d’abord ! ». Il soulignait que le processus colonial se poursuit depuis plus de 70 ans avec le soutien de la Maison blanche et que les Palestiniens savent bien qu’il n’y avait rien à attendre de l’administration américaine.

Hormis ce point et quelques lapsus troublants, Joe Biden est surtout venu rappeler à ceux qui voulaient l’entendre : « Israël toujours ! ». Ses déclarations étaient sans nul doute destinées à redonner le moral aux colons et aux dirigeants sionistes après les nombreux actes de résistance des Palestiniens au printemps 2022. Ses propos sur le déploiement de la 4G à Gaza et en Cisjordanie traduisent avant tout l’immense mépris envers les Palestiniens, de ceux qui se considèrent comme les maîtres du monde.

Les présidents américains peuvent se succéder, le peuple palestinien n’est pas dupe et sait que seule la lutte paye. Il libérera sa terre du joug colonial tôt ou tard. La Palestine est et demeurera une terre arabe !

Photo : Carlos Latuff https://twitter.com/latuffcartoons/status/1392611607327424512




Violences policières : la justice contre le peuple

Comité Action Palestine, 2 juillet 2022

A l’occasion du procès de trois policiers inculpés d’homicide involontaire dans le meurtre d’Amadou Koumé en 2015, qui succomba d’une « asphyxie mécanique lente » des suites d’une clé d’étranglement, le Comité Action Palestine revient dans ce court article sur cette violence d’Etat qui frappe depuis trop longtemps les classes populaires. La violence policière est l’ultime recours d’une société qui cherche à maintenir un ordre social injuste. Face à cette injustice républicaine, il ne reste qu’une seule voie : la mobilisation de tous les concernés pour résister à l’oppression.

Au tribunal de Paris, ce 28 juin 2022, c’est le deuxième jour du procès de trois policiers jugés pour « homicide involontaire. La victime : Amadou Koumé. L’avocat de ce dernier pose une question simple et précise : pourquoi aucun geste de premier secours n’a été réalisé alors que la victime était inconsciente ? Le policier ayant constaté le premier l’absence de pouls chez Amadou Koumé répond : « mes collègues ont pensé que c’était du bluff » ! S’il n’y avait pas de victime dans cette histoire, on aurait mis cette réponse sur le compte de la bêtise policière et ri au dépend de cette bande des gardiens de l’ordre. Mais Amadou a été abandonné, agonisant de nombreuses minutes sans que le SAMU soit appelé, sans le moindre geste de secours porté. Et dans ces circonstances, le juge d’instruction n’a pas considéré nécessaire de poursuivre les policiers pour « non-assistance à personne en danger ». Traduction : un Arabe ou un Noir inconscient et sans pouls est un bluffeur jusqu’à preuve du contraire. Circulez y’a rien à voir. Rappelons qu’Amadou, étranglé par la police pendant plus de six minutes, a été asphyxié jusqu’à la mort, lors d’une intervention dans un bar où 16 policiers ont voulu maîtriser un homme noir en grande détresse psychologique en raison de problèmes de santé connus.  Amadou Koumé n’a, à aucun moment, présenté de geste ou parole violents envers les personnes présentes au bar ce jour-là. Le bon sens aurait voulu qu’on appelle des médecins ou les pompiers. Là où la crise psychotique du bourgeois dépressif conduit à une prise en charge médicale, les classes populaires ont droit à la clé d’étranglement. Police républicaine ? Justice dites-vous ? Ces pratiques brutales, présentées comme exceptionnelles, sont pourtant subies au quotidien par les jeunes des quartiers populaires.

Amadou vient rejoindre la liste déjà longue des victimes de violences policières. Comme tant d’autres avant lui, il a été victime deux fois de la violence d’Etat : une première fois de la part de la police, une deuxième fois de la part de la justice. Cette violence s’abat sans pitié sur les habitants des quartiers populaires, une population pauvre et issue des anciennes colonies françaises. Le racisme d’Etat tue dans les quartiers populaires, tue des Noirs et des Arabes, tue sans espoir de justice pour les victimes et leurs familles qui expérimentent depuis trop longtemps ce fruit pourri de l’histoire coloniale : l’Apartheid à la française. Ce legs colonial d’une discrimination dans tous les domaines, avec sa violence policière raciste, sa justice raciste, son école raciste, son embauche raciste, ses contrôles au faciès, persistera tant que ces populations seront assignées à des conditions sociales d’indignité et de pauvreté dans lesquelles cette société capitaliste a plongé des millions de personnes.

La violence économique et la violence policière sont intimement liées, les gilets jaunes en ont fait les frais. L’usage de la force contre la masse populaire a agi comme un révélateur sur le système dont le réflexe premier est de préserver les intérêts des puissants qui contrôlent, à travers le président Macron, tous les leviers de la domination politique. La lutte des gilets jaunes a déchiré le voile démocratique pour laisser apparaître au grand jour ce visage familier bien connu des habitants des quartiers populaires, invisibilisé par des médias inféodés au puissant : le visage froid de la dictature de la matraque et du LBD qui gouverne sans le peuple et contre le peuple. Ce dernier ne s’y trompe pas en désertant massivement les bureaux de vote.

Il faut saluer le combat acharné de ces familles, parfois regroupées en collectif, qui, depuis de nombreuses années, apportent une aide inestimable aux victimes et à leurs proches afin notamment de surmonter la bataille juridique, étape primordiale dans le travail de deuil et de reconstruction. Pourtant après des années de lutte judiciaire, il faut regarder la vérité en face : a-t-on déjà vu un seul cas où une victime de violence policière a réellement obtenu justice dans les tribunaux ? A la hauteur du crime commis ? Les violences policières ont-elles diminuées en France ? Est-ce normal de devoir combattre pour obtenir un procès là où le non-lieu est la norme ?

A quoi mène aujourd’hui en France un tir meurtrier dans le dos par la police ? Cinq ans de sursis sans licenciement et une promotion en tant que délégué syndical. Une police en roue libre qui n’hésite plus à tirer au moindre « refus d’obtempérer » dans une quasi-impunité. Des gilets jaunes qui vont en prison pour dégradation matérielle tandis que les éborgneurs et meurtriers ne sont pas inquiétés. Et c’est normal : les policiers sont les gardiens de l’ordre, celui d’une république bourgeoise qui ne tient que par l’usage de la force « disproportionnée ».

Si donc les classes populaires n’obtiennent jamais gain de cause devant les tribunaux, à qui et à quoi sert donc cette justice ? Forte avec les faibles mais faible avec les forts, la justice a la main lourde avec le peuple, mais légère avec les policiers, les agents de la BAC, les Benalla, Balkany, Guéant et autres escrocs de la république. La justice est clémente, quand elle ne ferme pas les yeux, avec LVMH, McDonald et les grands groupes capitalistes qui utilisent l’argent volé aux travailleurs pour éviter les procès. La justice ne pèse rien non plus devant les marchands d’armes et responsables politiques du massacre au Yémen, en Irak et ailleurs.  Où est la justice quand le petit dealer se fait défoncer tandis qu’on déroule le tapis rouge à l’industrie du tabac responsable de millions de morts chaque année ?  A quoi sert la justice si ce n’est protéger les dominants et leurs supplétifs, tandis qu’elle criminalise les opprimés ?

Les décisions de la justice républicaine pourraient se résumer ainsi : les petits voleurs vont en prison tandis que les grands escrocs du parlement et de la bourse de Paris se retrouvent au Fouquet’s.

L’Etat déploie davantage de violence parce qu’il est incapable de donner une réponse sociale, incapable de satisfaire l’aspiration des classes populaires à vivre dans des conditions dignes. Cette violence d’Etat est alors un mode de gestion de l’ordre social, où chacun doit rester à sa place, aussi injuste soit elle. La violence policière et l’impunité qui l’accompagne n’est que le résultat logique de la violence sociale, de cet Etat qui doit maintenir à n’importe quel prix le profit d’une poignée d’individus au dépend d’une majorité d’opprimés, de travailleurs exploités, « ceux qui ne sont rien » victimes des « eaux glacées de l’égoïsme de classe ».

C’est une faillite de civilisation qu’Aimé Césaire résumait ainsi : « Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde ».

Justice de classe, justice raciste et coloniale ! De même que les Palestiniens n’obtiendront jamais justice devant les tribunaux de l’occupant, les classes populaires en France n’obtiendront jamais gain de cause devant l’injustice républicaine. Les tribunaux, le gouvernement Macron, ces opportunistes parlementaires ne sont qu’une clownesque et tragique incarnation des intérêts de la classe des possédants. La police républicaine apparait alors sous les traits d’une milice aux ordres de cette minorité bourgeoise dont le moteur est le profit et rien d’autre. Tenter de nier cette réalité ne changera rien au fait que demain, des pauvres, des Arabes, des Noirs seront tués en toute impunité, encore et encore par la police républicaine, et méprisés par l’injustice républicaine.

Le Comité Action Palestine dénonce la violence d’Etat qui n’a d’autre objectif que de maintenir l’ordre social. Face à cette injustice républicaine, il ne reste qu’une seule voie : la mobilisation de tous les concernés pour résister à l’oppression.




La répression d’Etat et l’arme de la dissolution : Les enseignements politiques de la victoire du Comité Action Palestine au Conseil d’Etat 

La répression d’Etat et l’arme de la dissolution :

Les enseignements politiques de la victoire du Comité Action Palestine au Conseil d’Etat 

Réunion publique dimanche 3 juillet à 17h Paris, 42 Rue de Clignancourt, Métro Barbès.

Après la suspension par le conseil d’Etat du décret de dissolution du Comité Action Palestine, nous avons jugé utile et nécessaire d’échanger avec les militants de la cause des exploités et des opprimés sur les premiers enseignements à tirer de notre lutte victorieuse au Conseil d’Etat afin de faire collectivement face à la répression.

L’Etat français, incarné par Macron, dans sa phase impérialiste pourrissante, est en crise et tout ce qui n’est pas conforme à la pseudo « vision républicaine » est relégué au rang de terroriste, de séparatiste ou d’antisémite. Dans ce système capitaliste en crise de légitimité, chaque jour la paupérisation et l’exploitation jettent des milliers de gens aux marges de la société. Ici en France il faut faire taire toute voix critique, toute résistance, et partout dans le monde soutenir les alliés comme l’entité sioniste qui subit les assauts victorieux de la résistance populaire. Lorsque le capitalisme perd la capacité à justifier auprès des peuples la loi arbitraire et irrationnelle du profit et de l’enrichissement de quelques-uns, lorsque le racisme et l’islamophobie ne suffisent plus à justifier l’ordre social injuste, le pouvoir politique se crispe et tape sur les récalcitrants. La police apparaît pour ce qu’elle est : au service de la République bourgeoise qui gouverne sans le peuple et contre le peuple.

En raison de cette instabilité du système, le pouvoir utilise abondamment la dissolution en criminalisant l’action militante. La répression du mouvement de solidarité avec le peuple palestinien témoigne de l’alignement sioniste du système politique en France et de l’inquiétude existentielle de l’entité sioniste face à une résistance palestinienne chaque jour plus déterminée et plus unifiée. Ce fait rend plus que jamais nécessaire de porter haut et fort les revendications du peuple et des principales organisations de la résistance palestinienne.

A l’occasion de ce débat public, le Comité Action Palestine vous propose dans un premier temps de partager les premiers enseignements de sa lutte victorieuse au Conseil d’Etat contre le gouvernement qui amalgame intentionnellement solidarité avec le peuple palestinien, terrorisme et antisémitisme.

La tentative de dissolution du Comité Action Palestine est à replacer dans le cadre plus large d’une répression tous azimuts et généralisée. La violence d’Etat et policière s’abat sur les quartiers populaires. Elle a été implacable avec les gilets jaunes, mutilés, emprisonnés, humiliés. Elle est implacable avec tous les militants épris de justice et d’égalité. Il s’agira aussi, dans un second temps, d’échanger autour de la nécessité de s’organiser collectivement pour faire face à cette offensive réactionnaire et liberticide : comment s’organiser pour résister à la violence d’Etat ? Comment les militants pourraient unir leurs forces pour porter la voix des opprimés ici et partout dans le monde, et en particulier en Palestine ?

Nous, Comité Action Palestine, avec l’appui de la Campagne unitaire pour la libération de Georges Ibrahim Abdallah, vous attendons pour des échanges politiques fraternels et sincères pour promouvoir la cause des peuples.

« Seule la lutte libère ». Thomas Sankara




Des enfants en prison

Ahmad Manasra avait 13 ans lorsqu’il a été emprisonné par les sionistes. Il en a 20 aujourd’hui. Suite aux tortures qu’il a subies, son état de santé est très dégradé et il est en isolement depuis plusieurs mois. L’audience pour sa libération anticipée en raison de son état de santé a eu lieu en juin, mais aucune décision n’a encore été prononcée. La situation de Ahmad Manasra incarne la barbarie sioniste. Il doit être libéré comme tous les enfants palestiniens en prison et tous les autres résistants palestiniens !

En son honneur, le Comité Action Palestine publie ce texte adapté du Calendrier Palestine Libre 2011 « les Combattants de la Liberté »

Ils sont l’Intifada, le symbole de la Résistance palestinienne, ils sont ceux qui affrontent les chars avec des pierres, ils sont le courage et l’avenir de la Palestine.

Pour briser toute volonté de résistance, l’occupant sioniste ne fait aucun cas de l’âge du résistant palestinien et s’attaque aussi aux enfants avec la brutalité habituelle du colonisateur.

Depuis 2000, l’armée israélienne a kidnappé plus de 12000 enfants, filles et garçons, dont certains n’avaient pas 12 ans. En juin 2022, il y 170 enfants prisonniers dans les geôles sionistes.

Les enfants palestiniens sont arrêtés dans la rue, sur le chemin de l’école, d’autres enlevés en pleine nuit dans la maison familiale, sortis de leurs lits par les soldats d’occupation et emmenés yeux bandés et pieds et poings liés le plus souvent  loin de leur domicile. Les familles doivent les chercher pendant des jours et des semaines avant de savoir où ils ont été amenés. Certains sont poursuivis devant les tribunaux militaires, d’autres restent en détention administrative. Les enfants sont enfermés dans les mêmes prisons que les adultes, la plupart à Ofer, Magiddo et Hasharron-Telmond.  Il est régulièrement fait état d’agressions ou de menaces d’agressions sexuelles au cours des interrogatoires à l’encontre des enfants palestiniens de la part de soldats ou de policiers israéliens. Les enfants témoignent aussi de tortures à l’électricité et des mêmes autres types de tortures auxquelles sont soumis les adultes.  Ils sont interrogés en l’absence totale d’avocats, ni même de membres de leur famille. Il s’agit la plupart de temps de leur faire avouer avoir jeté des pierres sur les véhicules des colons, le jet de pierre peut être puni de 20 ans de prison (ordre militaire 378).

S’il y avait encore le moindre doute, la question des enfants palestiniens enfermés dans les geôles sionistes est une preuve irréfutable que le le soi disant droit international n’est que le droit des dominants.

A travers l’emprisonnement de l’enfant, l’objectif du colonisateur est de s’attaquer aux forces vives de la société palestinienne.

Mais l’objectif sioniste est très loin d’être atteint. Né au cœur d’un système d’oppression, l’enfant palestinien fait l’apprentissage de la Résistance. En prison,  il côtoie  ses ainés qui lui transmettront leur expérience pour défendre la cause d’une Palestine arabe.

Photo: Palestine online




Exigeons la libération immédiate de Georges Ibrahim Abdallah !

Comité Action Palestine, juin 2022

Georges Ibrahim Abdallah est un résistant libanais, pro-palestinien, membre du Front Populaire de Libération de la Palestine, arrêté en 1984 en France pour détention de faux-papiers, puis condamné à perpétuité par la justice française pour une présumée implication dans l’assassinat en 1982 de deux diplomates (un attaché militaire américain et un israélien). Le tribunal n’a jamais été en mesure d’apporter des preuves concrètes de sa culpabilité. Incarcéré depuis 1984, Georges Ibrahim Abdallah a battu le record détenu jusque-là par Nelson Mandela (24 ans) et revendique désormais le titre de «doyen des prisonniers politiques dans le monde ». Le 24 octobre 2021, il est entré dans sa 38ème année de détention alors que sa peine de sureté est accomplie depuis 1999.

En dépit de deux décisions de justice (en 2003 et 2013) ordonnant une libération sous condition d’expulsion, les gouvernements français successifs de droite comme de gauche le maintiennent en détention. Depuis 2004, date du rejet en appel de la première demande de libération conditionnelle, ce militant de la cause palestinienne s’est vu refuser sa libération à neuf reprises. La justice administrative a de nouveau refusé d’ordonner son expulsion en février 2022.

A l’instar des Israéliens qui maintiennent en détention administrative, c’est-à-dire sans procédure juridique ni jugement plusieurs centaines de prisonniers politiques palestiniens, la France bafoue sa propre justice en maintenant Georges Ibrahim Abdallah en prison. A ce déni de justice, s’ajoute la tentative de criminalisation du soutien à ce prisonnier politique. En mars 2022, le ministère de l’intérieur a considéré que la solidarité du Comité Action Palestine avec Georges Ibrahim Abdallah constituait l’un des motifs suffisants pour justifier la dissolution de l’association. Mais dans son ordonnance de suspension du décret de dissolution, le Conseil d’Etat a administré un camouflet historique au gouvernement en déclarant que ce soutien n’était en rien répréhensible, comme tout soutien à la résistance palestinienne et à ses organisations.

Par le maintien de Georges Ibrahim Abdallah en prison et la tentative de réprimer le mouvement de solidarité avec la lutte du peuple palestinien, le gouvernement français montre une fois de plus son alignement sur ce mouvement colonial et raciste qu’est le sionisme. Le Comité Action Palestine dénonce avec force l’Etat français qui, au-delà de servir les intérêts sionistes, met en œuvre le même type de politique criminelle et de déni du droit.  Le Comité Action Palestine exige l’application immédiate des décisions de justice et apporte son soutien plein et entier à  Georges Ibrahim Abdallah dans son combat contre le colonialisme juif en Palestine.

Comme les généraux de la patience, ces prisonniers palestiniens enfermés pendant plus de 30 ans dans les geôles sionistes, Georges Ibrahim Abdallah, enfermé quant à lui depuis près de 40 ans dans les geôles françaises, témoigne de la patience des résistants face à leurs bourreaux. Exiger sa libération et celles des milliers de prisonniers palestiniens, c’est dénoncer le sionisme partout où il sévit,  et soutenir le combat de la résistance jusqu’à la victoire de la liberté en Palestine, en France et partout dans le monde.

Photo : Comité Action Palestine




APPEL : Journalistes marocains contre la normalisation sioniste

« Nous, journalistes marocains, signataires de l’appel « Journalistes marocains contre la normalisation » :

Nous suivons avec une grande inquiétude la dangereuse voie de la normalisation poursuivie par l’État marocain, depuis décembre 2020, à travers plusieurs accords et décisions qui permettent aux institutions de l’occupation sioniste de profaner notre pays. Le dernier acte de cette vague est l’octroi d’une licence à une chaîne israélienne à ouvrir deux bureaux au Maroc, à un moment où la blessure est encore vive de l’assassinat, de sang-froid et devant les yeux du monde, de notre collègue journaliste Shireen AbuAqleh par l’armée d’occupation.

L’occupation israélienne a toujours été un ennemi de la liberté d’expression et de la presse en Palestine. Comme en témoigne son ciblage des journalistes avec des arrestations et des assassinats. Le nombre de journalistes abattus par l’armée d’occupation a atteint 55 martyrs depuis 2000. Le 31 mai dernier, notre collègue, Ghoufran Warasna à Al Khalil, est tombée sur le champ de bataille pour la liberté de la presse. 

Sans oublier plus de 368 violations israéliennes contre des journalistes en 2021, et 100 violations depuis le début de cette année, lors de leur couverture des événements.

Face à ces violations et provocations, que les organisations internationales considèrent comme des crimes de guerre, qualifiant l’occupation israélienne de régime d’apartheid contre les Palestiniens, l’insistance de l’Etat marocain à aller de l’avant dans ses relations avec l’occupation est un signe d’encouragement implicite de ces manœuvres. Une normalisation qui ne fait qu’intensifier les violations du droit des Palestiniens. 

La normalisation des médias marocains avec les institutions israéliennes est également une implication claire dans la falsification de la vérité, l’encouragement au meurtre d’innocents, le vol de terres, la démolition de maisons et l’effacement du récit palestinien et son remplacement par un faux récit sioniste qui déforme le présent et l’histoire. 

A cet égard, les journalistes signataires de cet « appel » annoncent à l’opinion publique nationale et internationale ce qui suit :

– Nous affirmons que la normalisation des médias avec l’occupation sioniste est un crime contre les Palestiniens, les Marocains et l’humanité.

– Nous condamnons des violations israéliennes contre les journalistes et tous les Palestiniens et notre solidarité absolue avec les victimes et leurs familles.

– Nous condamnons l’ouverture du bureau d’une chaîne sioniste au Maroc et l’organisation de la cérémonie d’ouverture en grande pompe et notre demande de fermeture immédiate du bureau. Cette démarche est une provocation pour nous journalistes partisans de la vérité, surtout une immense provocation aux sentiments des Marocains dont le cœur et la raison sont liés à la Palestine, une cause nationale, comme l’est le Sahara marocain. 

– La défense de la question du Sahara par les médias marocains ne signifie pas notre implication dans le marchandage de la juste cause palestinienne.

– Nous avertissons contre le danger de l’infiltration sioniste de la conscience de la société marocaine, à travers les médias, la culture et l’éducation sous les yeux de l’État et des instances politiques, associatives et médiatiques.

– Nous avertissons à éviter le piège du récit factice autour de « notre communauté juive en Israël ». Nous rappelons que les colons israéliens, y compris ceux d’origine marocaine, sont des criminels et des occupants. Et que les juifs marocains vivant dans leur patrie (le Maroc) ou les expatriés sont nos concitoyens, et même parmi eux plusieurs impliqués dans la lutte contre le régime d’apartheid.

– Nous appelons tous les collègues à s’engager en tant que journalistes dans la lutte contre tous les discours de haine, y compris les discriminations à l’encontre des juifs.

– Nous appelons les médias et les journalistes indépendants à faire la lumière, en toute indépendance, sur la cause palestinienne et à dénoncer les violations sionistes en cours contre le peuple palestinien.

– Nous appelons les partis politiques, les organisations des droits de l’homme et les organisations de la société civile à renforcer le mouvement de boycott culturel, académique, économique et médiatique, comme arme pacifique de résistance à l’occupation qui a prouvé son efficacité sur tous les continents du monde.

– Nous exigeons de l’État marocain d’arrêter le processus de normalisation et de continuer à soutenir le droit palestinien par tous les moyens, y compris la promulgation d’une loi criminalisant la normalisation avec l’occupation, jusqu’à ce que la Palestine soit libérée.

Enfin, nous, signataires de cet appel, annonçons notre adhésion à la Campagne nationale et internationale contre la normalisation, et nous appelons tous les collègues et les institutions médiatiques du Maroc à défendre le droit palestinien par la parole, la voix et l’image pour empêcher l’infiltration sioniste dans le pays.

Vive la Palestine ! « 

Rabat, le 13 juin 2022 

PS : Pour les journalistes souhaitant signer cet Appel, vous pouvez envoyer votre nom en arabe et en français au mail suivant : journoma.palestine@gmail.com

Photo by Latrach Med Jamil on Unsplash




Naqsa : le projet colonial sioniste n’ira pas plus loin

Comité Action Palestine, juin 2022

Selon des plans qui existaient depuis la création de l’Etat-colonie Israël, une nouvelle Nakba s’abattait sur le peuple palestinien le 6 juin 1967. L’entité sioniste occupa alors l’ensemble de la Palestine historique, y compris al-Quds, ainsi que les hauteurs du Golan syrien et le Sinaï égyptien. La mise en place d’un gouvernement militaire pour ces territoires avait été préparée dès 1963.

Comme en 1948, les forces militaires juives bombardèrent de nombreuses régions sans aucun intérêt stratégique militaire. Le seul objectif était de faire fuir la population palestinienne et de poursuivre l’épuration ethnique pour donner réalité au « rêve sioniste du Grand Israël ».

Selon des ordres du général Yitzhak Rabin, plusieurs villes et villages palestiniens furent entièrement détruits. La totalité du quartier marocain dans la vieille ville d’Al-Quds, jouxtant le Mur occidental du Haram esh Sharif, fut réduite à néant pour laisser place à l’Esplanade des Lamentations.

Dans un processus qui visait à terminer le travail d’épuration ethnique démarré 20 ans plus tôt, 400 à 450 000 Palestiniens furent expulsés par la force en juin 1967, la moitié d’entre eux étant déjà des réfugiés de 1948. Les camps de réfugiés de Ein as-Sultan, Aqbat Jabr, Nuweimeh et de al Ajajra près de Jéricho furent bombardés et le camp de Karameh sur la rive orientale du Jourdain totalement détruit en 1968.

Mais en 1967, contrairement à ce qui s’est passé au moment de la Nakba, la majorité de Palestiniens des nouveaux territoires occupés resta en place. Malgré tous les plans mis en œuvre pour finir le nettoyage ethnique, le cauchemar commençait alors pour l’entité sioniste car son projet colonial et raciste en Palestine n’irait pas plus loin. Depuis, le processus s’est même inversé puisque l’entreprise sioniste n’a cessé de reculer sous les coups de la résistance en 2000 au Liban, puis en 2005, 2009, 2012, 2014, 2021 à Gaza. Ne craignant ni la répression, ni les guerres sanglantes menées par les sionistes, les Palestiniens résistent inlassablement. Instaurant dorénavant la peur au sein de la société coloniale, les formes actuelles prises par la résistance sont un facteur supplémentaire de déstabilisation de l’entité usurpatrice. Leur mobilisation au cours des dernières semaines pour défendre al-Quds et la Mosquée al-Aqsa, et faire flotter le drapeau palestinien dans toute la Palestine historique témoigne de leur détermination. Cette terre leur appartient !

Cent ans après la déclaration de Balfour, l’impérialisme occidental est contraint de redoubler d’efforts pour pallier l’affaiblissement de son avant-poste au Moyen Orient et maintenir son hégémonie dans la région. Il s’agit alors de mater toutes les résistances, qu’elles viennent des peuples ou des Etats. Depuis dix ans, et malgré toutes les tentatives de déstabilisation et la propagande orchestrées de l’étranger, les puissances occidentales ont totalement échoué à détruire l’axe de la résistance (Iran, Liban, Gaza, Syrie) épaulé par la Russie. Le nouveau rapport de force issu de ce conflit, faisant obstacle aux plans impérialistes et sionistes, doit maintenant s’inscrire dans la durée car force est de constater que l’impérialisme ne recule devant aucune atrocité pour arriver à ses fins.

En ce 55ème anniversaire de la Naqsa, la détermination des peuples est toujours victorieuse face à l’injustice que représentent le colonialisme et l’impérialisme. 74 ans après la Nakba, la Palestine est toujours au centre des revendications des mouvements révolutionnaires dans les pays arabes et des choix stratégiques des Etats de la région. Ce constat est celui de l’échec du projet sioniste et annonce sa fin prochaine. Vive la résistance du peuple palestinien et des peuples arabes.

Comité Action Palestine

Photo: hosny_salah




Suspension de la dissolution d’associations propalestiniennes : Macron rappelé à l’ordre par le Conseil d’État

par Alain Gabon. Article publié le 13 mai 2022 sur le site Middle East Eye

Alain Gabon est professeur des universités américaines et maître de conférence en « French Studies » à l’université Wesleyenne de Virginie (Virginia Beach, États-Unis). Spécialiste du XXe siècle, il a écrit de nombreux articles sur, entre autres sujets, l’islam et les musulmans en France et dans le monde, pour des médias grands publics et alternatifs ainsi que des revues universitaires. 

Dans cet article, Alain Gabon revient sur le caractère historique de la décision du Conseil d’Etat qui a suspendu la dissolution de notre association. Il souligne la clarté et la force des termes utilisés par le Conseil d’Etat pour déclarer illégale les dissolutions. Plus largement, il considère cette décision comme particulièrement importante car elle met un frein salutaire à la politique gouvernementale liberticide qui a conduit à la dissolution de plusieurs dizaines d’associations et à la fermeture de nombreuses mosquées ces dernières années.


La décision du Conseil d’État met en lumière l’illégalité flagrante de la stratégie du président français Emmanuel Macron et de son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin contre des associations islamiques, propalestiniennes et critiques du gouvernement

Le vendredi 29 avril, le Conseil d’État, la plus haute cour administrative de France, a suspendu la dissolution ministérielle de deux associations propalestiniennes, invalidant doublement la décision prise le 9 mars en conseil des ministres par le président Emmanuel Macron et son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Symptomatique de l’alignement tant rhétorique que politique de la France sur Israël – un véritable suivisme de plus en plus prononcé depuis Nicolas Sarkozy –, Macron et Darmanin accusaient en effet le Comité Action Palestine et le Collectif Palestine Vaincra d’incitation à la haine, à la discrimination et à la violence contre Israël ainsi que de soutien à des organisations terroristes (en référence au Hamas), allant même jusqu’à l’accusation gravissime de chercher à provoquer des actes de terrorisme.

À la suite de leur dissolution par décret exécutif, les deux associations avaient immédiatement déposé un recours en référé auprès du Conseil d’État.

Un arrêt historique et potentiellement salutaire

Bien qu’elle semble être passée inaperçue et soit restée très peu relayée, noyée dans le déluge médiatique autour de l’Ukraine, cette nouvelle est en fait importante, voire historique, pour de nombreuses raisons.

D’abord, par la clarté et l’utilisation d’un langage très fort dans la condamnation des décisions d’Emmanuel Macron et de son ministre de l’Intérieur par le Conseil d’État. Celui-ci statue en effet, entre autres choses, que « la mesure de dissolution prononcée par le décret contesté […] porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’association et à la liberté d’expression, qui présentent le caractère de libertés fondamentales ».

« La mesure de dissolution prononcée par le décret contesté […] porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’association et à la liberté d’expression, qui présentent le caractère de libertés fondamentales »

– Le Conseil d’État

Pour paraphraser, le président français et son gouvernement violent eux-mêmes la Constitution, les droits humains et les libertés les plus fondamentales qu’ils ont pourtant pour mission de protéger.

On appréciera l’ironie en mode arroseur arrosé de la part d’un gouvernement et d’un chef de l’État qui ne cessent de stigmatiser et d’attaquer les musulmans de France pour « séparatisme » vis-à-vis des règles et lois de la République, tout en se présentant comme modèles ultimes de vertu républicaine.

Notons également qu’il ne s’agit pas ici de membres secondaires du gouvernement ou d’officiels de bas niveau, mais du chef de l’État en personne et de son ministre de l’Intérieur, à savoir les numéros 1 et 2 de la République.

Lors d’une récente cérémonie en mémoire des victimes du terrorisme à laquelle était convié le président d’Israël Isaac Herzog ainsi que les associations françaises et groupes de lobby juifs pro-israéliens, Emmanuel Macron s’était même vanté publiquement de la dissolution par son gouvernement de ces deux organisations, qu’il qualifiait de façon diffamatoire d’« antisémites ».

Or, l’une des conclusions du Conseil d’État est que ce chef d’accusation n’est « pas corroboré ».  En d’autres termes, le dossier est vide, et lorsqu’il s’agit (entre autres) d’organisations propalestiniennes, Macron et Darmanin inventent simplement des excuses.

Il n’est donc pas étonnant que sollicité par l’Agence France Presse (AFP) pour commenter ce cuisant camouflet, le ministère de l’Intérieur n’a pas daigné répondre. Lui-même se voit désormais reconnu hors-la-loi, sans excuses ni réponse.

Invoquer les principes Républicains pour mieux les ignorer

Deuxièmement, cette décision confirme encore davantage ce que nombre de critiques de tous bords expliquent depuis des années, à savoir que très souvent, ceux-là mêmes qui se gaussent de « principes républicains », de « respect de la loi », de références à Samuel Paty et de nobles valeurs comme la liberté d’expression et la laïcité ne le font que pour mieux violer et piétiner les lois, principes et valeurs dont ils se réclament.France : la réaction républicaine, le grand bond en arrière démocratique.

Troisièmement, la décision du Conseil d’État pourrait peut-être offrir une base juridique pour contester l’interdiction de la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS) par le gouvernement français, laquelle interdiction entre en contradiction avec un arrêt la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) jugeant que l’appel au boycott des produits israéliens ne peut pas en soi constituer une infraction pénale puisque couvert par la liberté d’expression.

En effet, une des raisons invoquées dans les décrets de dissolution est que le BDS, y compris le simple soutien à cette campagne en faveur des droits des Palestiniens, constituerait une incitation à la discrimination et à la haine contre Israël et les Israéliens.

Un amalgame entre antisionisme et antisémitisme aussi grossier et fallacieux que typique des gouvernements israéliens, que depuis des années les gouvernements français ne cessent de reprendre à leur compte pour réprimer les activistes pro-palestiniens.

Or, la décision du Conseil d’État semble bel et bien indirectement et implicitement invalider cette interdiction de la campagne BDS en sous-entendant qu’elle constitue elle aussi une attaque flagrante contre les libertés d’association et d’expression.

Un frein à la criminalisation de la critique

Quatrièmement, de façon encore plus large et potentiellement exploitable par les défenseurs de libertés civiques mises à mal par cinq années de macronisme illibéral, autoritaire, liberticide et souvent violent, cette décision de justice semble également invalider une grosse partie des méthodes et alibis utilisés par Emmanuel Macron et Gérald Darmanin pour fermer de nombreuses mosquées, associations islamiques, organisations anti-racistes, écoles musulmanes et autres clubs sportifs ou commerces halal privés.

On appréciera l’ironie en mode arroseur arrosé de la part d’un gouvernement et d’un chef de l’État qui ne cessent de stigmatiser et d’attaquer les musulmans de France pour « séparatisme » vis-à-vis des règles et lois de la République, tout en se présentant comme modèles ultimes de vertu républicaine

De fait, la rhétorique, les méthodes (culpabilité par association, etc.), les raisons, excuses et soi-disant « preuves » énumérées dans ces deux décrets de dissolution du 9 mars sont en tous points similaires à ceux utilisés précédémment pour dissoudre des organisations comme le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et la Coordination contre le racisme et l’antisémitisme (CRI).

Par exemple, l’affirmation ubiquitaire dans ces décrets selon laquelle le simple fait de parler de « racisme et d’islamophobie d’État » constituerait des « incitations à la haine de la France et à des actes de terrorisme » contre ce pays.

Cette criminalisation de libertés civiques fondamentales – une caractéristique majeure du régime Macron –, cette reformulation de l’exercice de la liberté d’opinion et d’expression, ce recodage sémantique de la critique du gouvernement comme constituant désormais une « incitation à la haine et au terrorisme contre la France » représentent en effet depuis des années le tour de passe-passe rhétorique le plus fréquemment invoqué dans cette avalanche sans fin de décrets de dissolution, adoptés essentiellement contre des associations islamiques.

Au-delà de la réhabilitation de ces deux associations pro-palestiniennes, c’est bien toute cette stratégie de fermetures intempestives qui semble invalidée.

Cette décision est donc bien plus importante que la reconnaissance officielle que le gouvernement Macron ne se prive pas de violer les lois fondamentales et les grandes libertés constitutionnelles d’une République qu’il ne cesse d’invoquer. Elle est bien plus importante que les dérisoires 3 000 euros que le gouvernement devra verser à chacune de ces associations.

Si l’on veut faire preuve d’optimisme, ce revers cuisant pourra en effet peut-être calmer les ardeurs islamophobes d’un Macron II, après que le Macron I s’est vu décerner l’honneur de faire la couverture du dernier Rapport sur l’islamophobie en Europe.

On espère pour le moins que le président français et son nouveau ministre de l’Intérieur, Darmanin ou un autre, réfléchiront désormais à deux fois avant d’invoquer de fausses excuses pour priver leurs compatriotes musulmans de leurs droits fondamentaux.

– Alain Gabon est professeur des universités américaines et maître de conférence en « French Studies » à l’université Wesleyenne de Virginie (Virginia Beach, États-Unis). Spécialiste du XXe siècle, il a écrit de nombreux articles sur, entre autres sujets, l’islam et les musulmans en France et dans le monde, pour des médias grands publics et alternatifs ainsi que des revues universitaires. 

https://www.middleeasteye.net/fr/opinionfr/france-conseil-etat-suspend-dissolution-associations-propalestiniennes-macron-libertes?fbclid=IwAR1Pb1VoJZJvYuVCZi_bWe8tyoOtATFfcKdo2tn4XMAyWl5UjnfEbvuBlAM




Etre reporter à Jénine

Interview de Ali Samoudi par le Journal Sud Ouest (mars 2007)

Ali Samoudi est journaliste palestinien à Jénine. Il était à quelques mètre de Shireen Abu Akleh, lorsqu’elle a été assassinée par l’armée israélienne le 11 mai 2022. Il a également été blessé.

En mars 2007, Ali Samoudi était l’invité du Comité Action Palestine, pour commémorer la journée de la terre. Il avait donné une conférence sur le thème « de 1948 à nos jours, le seul objectif de la politique israélienne : rayer la Palestine de la carte ». Il avait été interviewé par le journal Sud Ouest. Nous republions ici cette interview.

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Propos recueillis par Régine Jordan

« Comme tous les habitants de Jenine, ma vie est en danger. J’ai déjà été blessé plusieurs fois » Ali Samoudi

Invité par le Comité Action Palestine, Ali Samoudi, journaliste palestinien, donne plusieurs conférences en France au cours desquelles il livre son analyse sur la situation en Cisjordanie. Invité samedi soir à Bordeaux, ce correspondant de Reuters et de al-Jazira à Jenine témoigne des difficultés rencontrées chaque jour pour exercer son métier.

Quelles sont vos conditions matérielles pour exercer votre profession ?
Nous sommes trois dans un bureau de Jenine. Je suis cameraman pour Reuters et al-Jazira, j’écris aussi pour des journaux. Nous sommes chaque jour en relation par téléphone. Je couvre tous les événements produits par l’occupation israélienne, les attentats, les manifestations, les conférences importantes, etc.

Votre vie est-elle en danger ?
Oui, comme la vie de tous les habitants de Jenine. J’ai déjà été blessé plusieurs fois. En 2001, j’ai reçu trois balles israéliennes alors que j’étais en train de filmer. J’enfile toujours le dossard de presse, mais parfois ça ne suffit pas. Même si la renommée internationale de Reuters et de al-Jazira me protège, tous les journalistes palestiniens sont suspects pour les soldats israéliens. Douze journalistes ont été tués dans les territoires depuis 2000, dont deux journalistes étrangers.

Comment circulez-vous ?
Beaucoup de journalistes n’ont pas d’autorisation de circuler. Moi, je n’ai pas le droit d’aller à Jérusalem, où est le siège de Reuters. Chaque fois que je vais couvrir un événement, je préviens al-Jazira ou Reuters pour qu’ils s’assurent que tout s’est bien passé. Lorsque j’ai été blessé une nouvelle fois en 2005, Reuters a protesté auprès du gouvernement israélien et a déposé plainte. Je n’ai pas de laisser-passer. Parfois, je passe facilement, d’autres fois je ne peux pas.

Comment les journalistes palestiniens couvrent-ils la rivalité Hamas-Fatah ?
On voit, on montre, on raconte… On essaie toujours de faire notre métier, mais c’est vrai qu’au plus fort de la crise entre les deux, on a eu beaucoup de problèmes pour transmettre nos informations. Des deux côtés.

Un correspondant de la BBC a été pris en otage. Quelle est votre réaction ?
Les journalistes palestiniens ont fait grève vingt-quatre heures car ils dénoncent de tels actes. Qu’ils soient occidentaux ou palestiniens, les journalistes sont dans le même bateau.