1

Les Palestiniens ne renonceront jamais !

Comité Action Palestine, Commémoration de la Nakba (mai 2019)

Le 14 mai 1948, jour de la « création
de l’Etat israélien », est commémorée par les Palestiniens comme la Nakba, la
Catastrophe. Cinq cents villages détruits, 800 000 Palestiniens expulsés de
leurs terres, de très nombreux massacres, les sionistes franchissaient alors
une étape majeure dans leur projet colonial entrepris dès la fin du XIXème
siècle. Cautionné par les puissances occidentales, le mythe sioniste selon
laquelle la Palestine était «une terre sans peuple pour un peuple sans terre» a
constitué l’un des plus grands mensonges de l’histoire et a servi de
justification à la politique sioniste de colonisation et d’épuration ethnique.
Les réfugiés et déplacés palestiniens sont aujourd’hui près de 8 millions. Un
tiers d’entre eux vivent encore dans les 58 camps établis après la Nakba à
Gaza, en Cisjordanie et dans plusieurs pays voisins comme la Jordanie, le Liban,
la Syrie.

L’entité sioniste : plus de 70 ans de
crimes et de massacres

En recommandant la partition de la
Palestine, la Résolution 181, adoptée par l’ONU le 29 novembre 1947, est l’acte
fondateur de la Nakba. Elle attribue aux Juifs 56 % du territoire palestinien,
alors que démographiquement, ils représentent moins du tiers de la population
et possèdent jusqu’alors à peine 7 % des terres. Légitimement refusée par les
Palestiniens, elle permet aux sionistes de rendre effective leur stratégie de
spoliation et de domination du pays. Supérieurs militairement, les sionistes
craignent malgré tout l’union entre la population palestinienne et les armées
arabes. Selon des plans préétablis, ils conduisent dès fin 1947 une politique
de terreur afin d’accélérer le nettoyage ethnique et le vol des terres,
pratiquant ainsi la politique du fait accompli. Le 31 décembre, la Haganah et
le Palmah investissent Balad al Sheik et Hawassa, à la périphérie de Haïfa : 76
victimes dont des femmes et des enfants. Parmi les massacres, Deir Yassine
reste le plus symbolique et reste le prélude à la déportation en masse des
Palestiniens. Le 9 avril, les sionistes de l’IRGUN tuent 254 villageois,
majoritairement des femmes, des enfants et des personnes âgées. Dans les
semaines et les mois qui suivront, 418 villes et villages sont détruits, plus
de 15000 palestiniens sont assassinés et dans plus de 70 villages, la
population est entièrement massacrée. Des dizaines d’autres massacres ont lieu
comme à Balad Esh Sheikh, Sasa, Hul, El Dawayimeh, Tantura… A Lydda, le 11
juillet, des centaines de martyrs sont fusillés dans la mosquée Dahmash. Le 15
octobre, l’un des pires massacres a lieu à Dawayma où 300 civils arabes sont
assassinés. En Galilée, l’opération Hiram, lancée le 29 octobre, fera 70
martyrs assassinés de sang-froid.

La Nakba continue aujourd’hui avec le
soutien renouvelé des puissances impérialistes

Mais la Nakba ne s’est pas arrêtée en
1948. Aujourd’hui la judaïsation de la Palestine et l’épuration ethnique des
Palestiniens, notamment à al-Quds et dans le Naqab, continuent à marche forcée,
avec le soutien total des puissances impérialistes. Les accords d’Oslo ont été
un piège. Pendant que des dirigeants palestiniens et arabes négociaient, la
colonisation et l’expulsion des Palestiniens s’aggravaient, les résistants
étaient emprisonnés ou assassinés. Le transfert de l’Ambassade américaine de
Tel Aviv à al-Quds (Jerusalem), en 2018, à la date anniversaire du 70ème anniversaire de la Nakba, est lourde de conséquences
pour les Palestiniens, le monde arabo-musulman, mais aussi pour le monde
entier. Niant de fait le droit international qui octroie un statut
international à cette ville palestinienne, les Etats-Unis ont souhaité faire
d’al-Quds la capitale d’Israël, conformément au souhait des sionistes. La
décision de Donald Trump montre que les Américains apportent un soutien

inconditionnel à Israël,
sous forme politique, militaire et économique. Qui peut encore croire que les
Israéliens et les Américains sont pour la paix ? La solution des deux Etats, un
Etat palestinien à côté d’un Etat israélien est une promesse jamais tenue et
qui ne sera jamais tenue. Les Palestiniens le savent très bien. Ils ne peuvent
compter que sur leur unité et leur résistance pour libérer la terre arabe de Palestine.

Les Palestiniens ne
renonceront jamais.

Depuis le début de la
colonisation juive de la Palestine, le peuple palestinien a toujours résisté
sous différentes formes à cette terrible entreprise de destruction de sa
société. Malgré toutes les tentatives pour l’anéantir, il apparait clairement
aujourd’hui  que les Palestiniens ne
renonceront jamais à leurs droits et à leur liberté. Après les trois guerres de
Gaza (2008 ; 2012 et 2014), les Gazaouis, malgré le blocus infâme, continuent
de résister. Ils résistent aux sionistes, ils résistent contre l’Occident qui
soutient Israël et contre la trahison de nombreux Etats arabes. La dernière
décision de Trump n’a pas brisé leur volonté, bien au contraire. En organisant
depuis le 30 mars 2018 à Gaza, la Marche du retour, ils montrent que rien ne
les arrêtera. Pour empêcher cette marche, l’armée israélienne n’hésite pas  à tuer des Palestiniens chaque vendredi de
mobilisation, à tuer des Palestiniens qui veulent faire entendre au monde leurs
revendications : retourner chez eux, sur leurs terres, dans leurs maisons que
les colons israéliens ont volées en 1948.

La violence de l’occupant face à
des Palestiniens désarmés est signe que la peur a définitivement changé de
camp. Très sérieusement menacé par la résistance à l’intérieur et à
l’extérieur, l’avenir de l’entité sioniste sur la terre arabe de Palestine
parait, plus de 70 ans après sa création, plus compromis que jamais. Les
multiples initiatives de Trump en faveur d’Israël (déplacement de l’ambassade
américaine à Jérusalem, retrait de l’accord nucléaire signé avec l’Iran)
témoignent de la crise de légitimité de la politique israélo-américaine dans le
monde. Israël est en grande difficulté comme le sont les Etats-Unis au
Moyen-Orient et dans le monde. La guerre perdue en Syrie et le peu
d’empressement des autres  Etats à suivre
l’exemple américain en installant leur ambassade à Jérusalem accentue le
processus d’affaiblissement de la politique des Etats-Unis dans la région.

 Israël joue sa survie et résiste à son
dépérissement inéluctable. Pour cette raison, chaque initiative est
soigneusement pesée et doit avoir des retombées politiques positives. Or,
systématiquement les Palestiniens faussent 
les calculs des Israéliens. Les bombardements israéliens à Gaza du 4 et
5 mai 2019 n’ont pas duré plus de 36 heures en raison de la spectaculaire
riposte de la résistance palestinienne. Avec près de 700 missiles lancés dont
la plupart ont atteint leurs cibles, les Palestiniens ont contraint les
agresseurs israéliens à reculer et à conclure en urgence un cessez-le-feu.
Cette quatrième défaite israélienne à Gaza démoralise l’ennemi et renforce la
détermination du peuple palestinien à obtenir justice et indépendance.

Le Comité Action Palestine le soutient sur ce chemin et
réaffirme les quatre principes suivants :

  • La condamnation du sionisme
    comme mouvement politique colonialiste et raciste.
  • Le soutien inconditionnel à
    la résistance du peuple palestinien et à son combat pour son auto-détermination
    et son indépendance nationale.
  • La reconnaissance du droit
    inaliénable au retour de tous les réfugiés chez eux.
  • La libération de tous les
    résistants emprisonnés et de Georges Ibrahim Abdallah, résistant de la cause
    palestinienne détenu depuis 33 ans dans les geôles de l’Etat français, alors
    qu’il est libérable depuis plus de 10 ans.

Photo : www.h24info.ma




Algérie, Palestine : deux drapeaux, un destin commun !

«Si Israël est la fille gâtée
de l’Amérique, la Palestine est la fille chérie de l’Algérie».
C’est avec ces mots qu’un internaute algérien
a choisi d’illustrer la séquence d’un drapeau palestinien hissé avec le drapeau
algérien lors d’une manifestation.

Des résistants palestiniens
brandissant un drapeau algérien pour faire face à l’armée d’occupation
israélienne et d’immenses drapeaux palestiniens flottant au cœur de toute
mobilisation populaire algérienne…La force du symbole ne trompe pas. Le destin
de ces deux peuples se confond, tant leur histoire et leur résistance à
l’oppression sont communes.

Ces deux peuples sont en effet
liés à plus d’un titre. Si la Palestine fût au 19ème siècle le
refuge de résistants algériens fuyant la colonisation française, l’Algérie, la
Mecque des révolutionnaires, accueillit de nombreux réfugiés et combattants palestiniens,
notamment en 1967. Et c’est à Alger en 1988 qu’est proclamée l’Indépendance de
l’Etat de Palestine. Mais au-delà de leurs chemins croisés, c’est bien la
résistance à la barbarie coloniale qui soude Palestiniens et Algériens.

Les drapeaux palestiniens en
Algérie attestent que « l’Algérie est avec la Palestine en toutes
circonstances » et que le seul chemin conduisant à la victoire des peuples
est celui de la résistance. Les drapeaux algériens en Palestine disent au monde
que le combat n’est pas vain et qu’il existe une solution et une seule, la
libération de toute la terre de Palestine, de la Mer au Jourdain.

Ces inséparables drapeaux, symboles de la fraternité
de combat contre l’ennemi colonial, enseignent  qu’«un peuple qui lutte
pour sa liberté et son indépendance est invincible». Face à l’unité des
oppresseurs, les deux peuples préfigurent la nécessaire unité des opprimés.




Les Palestiniens : toujours debout sur le chemin du retour.

Journée de la terre en Palestine (mars 2019)

Comité Action Palestine

Le 30 mars
1976, six Palestiniens de l’intérieur (c’est-à-dire ceux qui ont pu rester en
1948 après la création par la force de l’Etat d’Israël) étaient abattus par
l’armée d’occupation d’Israël, 96 blessés et 300 autres étaient arrêtés. Leur
crime ? Avoir manifesté contre l’État sioniste qui avait confisqué et déclaré “
zone militaire ” 1700 hectares appartenant à des villages palestiniens.

Depuis,
tous les 30 mars, la “ Journée de la Terre ” commémore cet assassinat, partout
dans le monde où se trouvent les défenseurs des droits du peuple palestinien.

Cette journée est avant tout symbolique. Rappelons qu’en 1948, l’Etat juif avait expulsé près d’un million de Palestiniens et détruit plus de 400 villages. La majeure partie des terres palestiniennes avait été confisquée dans la perspective de fonder le “ Grand Israël ”. Dès lors, cette politique de confiscation des terres en vue de judaïser la Palestine (c’est-à-dire voler des terres aux Palestiniens pour les donner aux juifs), s’est poursuivie sans relâche et s’intensifie, accumulant crimes de masses, assassinats de leaders politiques et emprisonnements de résistants : la colonisation de toute la Palestine est inscrite au cœur du projet sioniste. Avec l’expansion coloniale qui vole chaque jour plus de terre aux Palestiniens et la judaïsation actuelle de la vallée du Jourdain, du Naqab, d’al-Quds et des lieux saints, rien ne semble arrêter cette machine à tuer et à coloniser.

Pourtant, depuis la création de l’Etat d’Israël, le peuple palestinien a toujours résisté à cette terrible entreprise de destruction de sa société soutenue par les pays occidentaux et en particulier les Etats-Unis et la France. La résistance est aujourd’hui multiple et menace de toutes parts l’entité coloniale. La Marche pour le Retour, initiée depuis mars 2018 à l’occasion de la 70ème année de dépossession, témoigne de la vitalité actuelle de cette résistance et du génie populaire palestinien. N’ayant plus rien à perdre, les habitants de Gaza se mobilisent en masse chaque vendredi pour marcher vers la barrière qui la sépare de la Palestine occupée. Malgré la répression qui s’abat sur les manifestants (plus de 250 morts, dont 60 en un seul jour pour la commémoration de la Nakba, et près de 26000 blessés), la pression populaire sur l’entité sioniste est maintenue. De plus, la résistance armée est toujours active et efficace. En Cisjordanie les attaques contre les colons se multiplient et à Gaza, les faits d’arme de la résistance tels que la mise en déroute d’un commando terrestre ennemi en novembre 2018 et des tirs de roquettes de longue portée illustrent sa puissance grandissante.  La rapidité avec laquelle l’entité sioniste a conclu un cessez le feu alors qu’une roquette avait atteint le Nord de Tel-Aviv ces derniers jours, témoigne que la peur a vraiment changé de camp. La force symbolique de cette résistance, et celui de la Marche du retour en particulier, est majeure. Le message palestinien est clair. «Le peuple palestinien n’a plus rien à perdre, il ne capitulera pas et rentrera chez lui, le Droit au retour est son droit ». De fait, la politique sioniste pour faire disparaitre le peuple palestinien depuis 70 ans a échoué.

Aux prises avec la résistance
palestinienne sous toutes ces formes, l’entité sioniste doit faire face en
interne à une grande instabilité politique et en externe aux menaces de l’axe
Hezbollah-Syrie-Iran renforcé par la victoire en Syrie. En dépit de toutes les
décisions américaines en sa faveur et son intense activité de normalisation
avec les Etats arabes et africains, elle semble bien incapable de renverser le
nouvel équilibre des forces dans la région. La montée en puissance de la Russie
d’une part et les contradictions au sein du camp occidental- alliés arabes compris-
d’autre part affaiblissent d’autant plus sa position. L’échec de la dernière
visite de l’émissaire américain Pompeo pour rechercher des soutiens arabes au
« Deal du siècle » que les USA souhaitent imposer aux Palestiniens,
illustre bien que les Etats arabes ne sont plus aussi enclins à se plier aux
ordres américains en faveur d’Israël. Les réactions inquiètes ou franchement
négatives, même de l’Arabie saoudite, suite à la décision de Trump de
reconnaitre la souveraineté israélienne sur le Golan occupé montrent également
que la donne a bien changé. Ce contexte pourrait s’avérer favorable aux
Palestiniens. L’espoir est donc permis.

Le 30 mars est une journée qui rappelle au monde que les
Palestiniens sont toujours debout pour libérer leur terre. En cette période où
les classes populaires françaises se dressent face à un système capitaliste à
bout de souffle et subissent l’arbitraire de la répression, les Palestiniens
nous montrent le chemin de la résistance et de la détermination. Soyons sans
répit à leurs côtés
pour réaffirmer
que la Palestine est arabe, et soutenir leur lutte jusqu’à la victoire de la
résistance et la satisfaction de ses revendications légitimes
:

  • La condamnation du sionisme comme mouvement politique colonialiste
    et raciste.
  • Le soutien inconditionnel à la résistance du peuple palestinien et
    à son combat pour son autodétermination et son indépendance nationale.
  • La reconnaissance du droit inaliénable au retour de tous les
    réfugiés chez eux.
  • La libération de tous les résistants emprisonnés, y compris
    Georges Ibrahim Abdallah, emprisonné dans les geôles françaises depuis 1984

Photo: Gaza mars 2018
http://casbah-tribune.com




Gilets jaunes : Pacifisme ou violence ?

Toute société impose des normes, des règles et des institutions pour les faire respecter. En ce sens toute société est violente. Mais ce qui nous intéresse ici, c’est la violence politique. Sous ses formes principales (guerre, terrorisme, révolution), la violence politique est un fait permanent, c’est-à-dire structurel à la société capitaliste. L’intérêt et la violence sont intimement liés. La violence est le moyen de soumettre un individu, un groupe d’individus ou des sociétés entières à la logique des intérêts et, plus concrètement, les soumettre à la logique implacable du profit, de la conquête des territoires et des marchés économiques.

Si la violence est l’instrument de la domination, elle peut être, dans d’autres cas, celui de l’émancipation quand les opprimés s’en emparent. A la violence de l’asservissement et de l’extermination s’oppose la contre-violence libératrice. Les révolutions et les décolonisations sont les exemples de cette violence libératrice.

Le peuple palestinien nous montre le chemin pour faire face à la violence sociale et au mépris des classes dominantes. Il est le symbole de toutes les luttes émancipatrices.

——————————————————————————————————————

Tayeb El Mestari (Le Grand Soir, 23 mars 2019)

« Factieux », « séditieux », « casseurs », « antirépublicains », « antisémites », les mots pleuvent comme des balles de LBD dans la grande bataille sémantique pour qualifier et tenter de disqualifier les gilets jaunes. A l’unisson, les médias inféodés aux puissants, les experts propagandistes “ larbinisés ” et une très large partie de la classe politique dépassée et désorientée dénoncent chaque jour la violence des gilets jaunes. Mais tous les samedis avec un sens de l’effort incomparable, les gilets jaunes manifestent. Et tous les samedis les scènes de violence se répètent inlassablement.

Le caractère inédit de ce mouvement a été largement souligné, mais sa force réside à la fois dans sa durée et sa violence intrinsèque, l’une alimentant l’autre. Les cris d’orfraie d’un Macron ou d’un Castaner n’y peuvent rien. Leurs incantations et leurs menaces, parfois la larme à l’œil, face à la violence populaire, sont désormais sans effet. Le glaive du ministère de l’intérieur censé faire peur est systématiquement un coup d’épée dans l’eau. La raison en est simple : la violence est enracinée dans ce mouvement. Elle en est le principe de vie qui refuse l’assignation à des conditions sociales d’indignité et de pauvreté dans lesquelles cette société capitaliste a plongé des millions de personnes.

La violence, un mal nécessaire

Cette violence répond à une violence première : la violence économique capitaliste. A partir de la fin des années 1970, le capitalisme est entré dans une phase où le capital devait croitre au détriment du travail salarié, en sécrétant un chômage massif et une baisse des salaires. Mais ce processus ne concerne pas seulement les travailleurs et les classes moyennes paupérisés. Toutes les catégories populaires, qui doivent leur survie quotidienne aux prestations sociales, n’arrivent pas, elles aussi, à « remplir leur frigo », selon la fameuse expression des gilets jaunes.

D’un côté cette détresse sociale des classes populaires, de l’autre des richesses insolentes et ostentatoires. Lorsque le vote est dévoyé et qu’il n’a d’utilité qu’à promouvoir, à chaque élection, un nouveau personnel politique dans sa grande partie corrompu ; lorsque les manifestations ressemblent souvent à des promenades organisées par les syndicats ; lorsque le Sénat et l’Assemblée nationale donnent à voir le spectacle piteux d’une classe politique impuissante qui se dispute les places et les prébendes ; lorsque la politique telle qu’elle s’exerce ne peut provoquer que le rejet, la violence s’invite pour la grande explication.

Les gilets jaunes n’avaient plus le choix. Face à cette violence sociale à laquelle s’ajoute la violence du mépris des classes dominantes, la bataille dans la rue reste la seule issue possible pour instaurer l’égalité. Cette lutte idéologique sur la légitimité de la violence est menée sans concession de part et d’autre pour gagner l’« opinion publique ». Elle se mène aussi dans les rangs des gilets jaunes. Pour convaincre les plus réticents d’entre eux, les gilets jaunes disent, et à juste titre, que la violence est un mal nécessaire. Il va de soi que la violence pour la violence n’existe pas, sinon dans l’esprit étroit des idéologues du pouvoir pour discréditer la lutte des classes. Les gilets jaunes ne sont pas violents par nature.

L’invention des « casseurs » et l’usage de la force

La violence économique et la violence policière sont intimement liées. Lorsque la première jette les mécontents dans la rue, la deuxième est censée les faire rentrer chez eux. Les moments de rude confrontation sont des moments de vérité pour le système tout entier et de l’institution policière en particulier. L’usage de la force contre les masses populaires agit comme un révélateur sur le système dont le réflexe premier est de préserver les intérêts de la grande bourgeoisie qui contrôle, à travers le Président Macron, tous les leviers de la domination politique. Il a suffi de quelques semaines de lutte dans la rue pour que la police soit dépouillée de son caractère républicain et apparaisse sous les traits d’une milice aux ordres de la minorité des puissants. La lutte populaire a déchiré le voile démocratique pour laisser voir au grand jour le visage froid de la dictature de la matraque et du LBD 40. La France patrie des droits de l’homme se voit sermonnée par l’ONU pour un usage disproportionné de la violence contre les plus faibles de la société ! Cette démocratie de facture bourgeoise a montré dans quelle considération elle tient les représentants du peuple en matraquant un député girondin. Ou en donnant une quasi immunité à un Benalla, qui du haut de ses 26 ans, se joue des vieux sénateurs, interloqués par autant d’audace républicaine chez un voyou protégé en haut lieu. Tout un symbole qui donne raison aux gilets jaunes lorsqu’ils affirment que les parlementaires n’ont aucun poids politique, leur seule utilité étant de donner un vernis démocratique à un système fondé sur la spoliation des travailleurs et l’oppression de « ceux qui ne sont rien ».

Ces « Gaulois réfractaires », ces « illettrés » ont fait preuve d’une conscience politique aiguë en montrant que le système tient, en dernière instance, par le seul usage de la force. Cette démonstration est d’une limpidité cristalline. Mais un système qui ne tient que par la force est, paradoxalement, un système fragile. D’où le recours à des ruses et à des subterfuges pour discréditer les gilets jaunes et semer la division en leur sein. La distinction que tente d’opérer le pouvoir entre casseurs et gilets jaunes pacifiques ne trompent personne, sinon les experts autoproclamés et la bourgeoisie apeurée des beaux quartiers de Paris, de Bordeaux ou de Toulouse. Ce tour de passe-passe permet de justifier l’adoption de la loi anticasseurs qui sape concrètement le droit constitutionnel de manifester. Le coup de force économique permanent contre les classes populaires prend, peu à peu et au fur à mesure de l’approfondissement des contradictions de classes entre les dominants et les dominés, la forme d’un coup de force politique.

La violence populaire, une légitime défense ?

Face à la réaction populaire légitime, le pouvoir suit une logique qui lui est propre. Il déploie davantage de violence parce qu’il est pour l’instant incapable de donner une réponse politique. Incapable de satisfaire les revendications des gilets jaunes et de transformer la donne institutionnelle par une réelle représentativité populaire. Il est coincé dans une dérive purement autoritaire que d’aucuns qualifient de dictature des riches contre les déshérités. Lorsqu’on s’approprie le bien d’autrui, il faut être prêt, si la persuasion ne fonctionne plus, à lui faire violence pour qu’il courbe l’échine.

Loin de se réduire à une minorité de « casseurs », la violence nourrit la dynamique collective des gilets jaunes. Dans les manifestations ou sur les réseaux sociaux les gilets jaunes disent pour la plupart : « Nous déplorons les violences, mais comment se faire entendre autrement ? ». Depuis les actes III et IV, les gilets jaunes ont compris que la violence paie. L’Acte XVIII du samedi 16 mars 2019 a déboussolé le pouvoir dont les représentants, Macron en tête, inspirent l’apitoiement dans leur recherche désespérée à vouloir dissuader et impressionner les gilets jaunes. Parce que l’histoire est une grande pédagogue, la pensée politique des gilets jaunes se réfère à la Révolution française pour signifier au monde que la marche vers une société meilleure est conditionnée par l’usage politique de la violence. Rien de grand n’a été réalisé sans la violence, nécessairement un passage obligatoire pour renverser le rapport de force. La symbolique de la guillotine très présente dans le mouvement ne signifie pas que les gilets jaunes sont assoiffés de sang. Elle rappelle seulement l’idée incontestable que la non-violence est une illusion et qu’elle n’a pas fait ses preuves historiquement. La défaite de la Commune en 1871 et le massacre de 30 000 communards par Adolphe Thiers, soutenu par une bourgeoisie revancharde et cruelle, enseigne que les ouvriers en armes ont commis le péché de faiblesse face à la violence sans borne des Versaillais. Plus récemment dans l’histoire des luttes, les manifestations enfermées dans le cadre étroit des revendications syndicales et du pacifisme d’obédience bourgeoise a conduit à l’impasse. Un système politiquement verrouillé et une situation économique d’une injustice criante et insupportable ouvre indubitablement une nouvelle ère de violence. Chaque épisode de la lutte des classes dans l’histoire de la France capitaliste le prouve.

lien: https://www.legrandsoir.info/gilets-jaunes-pacifisme-ou-violence.html

Photo: Comité Action Palestine




Vers une nouvelle donne au Proche Orient

Comité Action Palestine (mars 2019)

Après 7 ans, le conflit syrien a connu en 2018 une issue qui traduit l’établissement d’un nouveau rapport de force au Proche et Moyen Orient. Face à la montée en puissance de la Russie, les Occidentaux, en raison de leurs propres contradictions, ne paraissent plus capables d’imposer leur diktat sur la région. Malgré le soutien redoublé des Américains, l’entité sioniste se retrouve alors prise en étau entre les forces armées du Hezbollah et de l’Iran et la résistance palestinienne. Cette nouvelle donne pourrait être favorable à la lutte nationale palestinienne.

Un nouveau
rapport de force établi au Proche et Moyen Orient

Alors que le conflit qui oppose au Yémen les forces
houtis à l’Arabie saoudite à la tête d’une coalition internationale se
poursuit, la Russie intervient également sur ce terrain pour proposer, via
l’ONU, un règlement entre les belligérants, ce qui équivaudrait finalement à
une défaite de l’Arabie saoudite. En 2018, le camp saoudien a continué à perdre
de l’influence et le soutien américain s’est fait plus critique suite au
meurtre du journaliste Jamal Kashogii en Turquie en octobre 2018 et à certaines
révélations concernant des armes américaines vendues à l’Arabie saoudite,
retrouvées aux mains des forces houtis. L’influence majeure de la Russie se
traduit également par une volonté de contrecarrer la stratégie américaine
vis-à-vis des Palestiniens. Un récent sommet organisé à Moscou a en effet rassemblé
toutes les factions palestiniennes, qui, sans arriver à un accord complet, ont
exprimé une position commune rejetant le « Deal du siècle ». Ce projet, proposé
par les Américains pour « régler le conflit en Palestine », semble aujourd’hui
au point mort.

La victoire qu’on peut considérer comme définitive de
l’axe Syrie-Russie-Iran-Hezbollah en Syrie, marque durablement un nouveau
rapport de force dans la région. Début 2019, la quasi-totalité du territoire
syrien est repassé sous contrôle des forces gouvernementales syriennes. Outre
le renforcement du rôle déterminant du Hezbollah comme force de dissuasion face
à l’entité sioniste, et de l’Iran comme puissance régionale, cette victoire
impose la Russie comme un intervenant incontournable dans la géopolitique de
cette région.

Prenant en compte ce nouveau rapport de force, la Turquie
essaie de profiter de la situation et de renforcer ses alliances avec la Russie.
Elle instrumentalise la politique internationale pour détourner l’attention des
Turcs des problèmes économiques auxquels ils doivent faire face, et affiche un
positionnement plus anti-occidental qu’auparavant, illustré, notamment, par sa
prise de position vis-à-vis des ingérences impérialistes au Venezuela.

L’influence
occidentale affaiblie par des contradictions
 :

Le retrait des forces américaines de Syrie initié début
2019 laissent les forces kurdes seules face à la Turquie farouchement opposée à
leur projet d’indépendance. Très actives pour combattre Daesh et l’Etat
islamique, les Kurdes avaient parié sur le soutien occidental. Ils n’ont alors
pas d’autre choix qu’un rapprochement avec les forces syriennes
gouvernementales, ce qui éloigne la perspective d’un éclatement territorial de
la Syrie, souhaité par les Occidentaux.

Alors que la victoire en Syrie et la défaite de l’Arabie
saoudite au Yémen renforce le leadership régional de l’Iran, les USA redirigent
leur pression vers la République islamique avec leur retrait de l’accord sur le
nucléaire et la réactivation du blocus économique au cours de 2018. Un conflit
ouvert avec l’Iran paraissant peu probable, l’objectif principal est
d’affaiblir économiquement le pays en espérant une déstabilisation politique et
des mouvements de révolte en interne pouvant conduire à un renversement du
régime. Pour l’instant, l’Iran n’a pas répondu aux attaques militaires
israéliennes contre ses forces positionnées en Syrie et elle met en place des
dispositifs monétaires pour contourner l’embargo en nouant des alliances
commerciales avec la Russie et la Chine. Par ailleurs les contradictions entre
pays capitalistes depuis l’élection de Trump sont un élément supplémentaire à
prendre en compte. En effet lors d’un récent sommet à Varsovie, les USA ont
tenté de constituer un front anti-iranien uni rassemblant plus de 60 pays. Or
les Européens, qui veulent défendre leurs propres intérêts économiques, en recherchant
des moyens pour contourner l’embargo et échapper aux sanctions, n’ont pas
participé à ce sommet, affaiblissant de fait la stratégie américaine contre
l’Iran.

Enfin, même si la Jordanie n’est pas une puissance
régionale, les contradictions qui la traversent sont à prendre en compte. Elle
doit composer entre, d’une part, une alliance historique avec Israël et les
Américains et, d’autre part, une population composée à 60% de Palestiniens et
son rôle de garant des lieux saints musulmans d’al-Quds. Pendant la guerre en
Syrie, son territoire a servi de base occidentale, ce qui l’a conduit à
interrompre ses échanges avec ce pays alors que c’était son principal
partenaire économique. Depuis, elle subit une grave crise économique et a connu
en juin 2018 une mobilisation sociale inédite. Afin d’éviter toute
déstabilisation défavorable aux pays du Golfe et à Israël, les Pétromonarchies
sont venues à sa rescousse financière. Les Américains voulaient lui faire jouer
un rôle majeur dans le « Deal du siècle », en lui rattachant une grande partie
de la Cisjordanie et annulant le droit au retour des réfugiés palestiniens et
la souveraineté arabe sur al-Quds. Mais la Jordanie s’y est jusqu’alors clairement
opposée.

L’entité sioniste
fragilisée malgré le soutien américain renforcé

En dépit des décisions américaines en sa faveur, l’entité
sioniste se trouve fragilisée par ce nouveau rapport de force. En 2018, les
Américains ont transféré le 14 mai leur ambassade à al-Quds, reconnaissant de
facto la ville comme capitale d’Israël. Poursuivant les négociations pour
conclure le « Deal du siècle », ils ont aussi cessé de financer
l’UNRWA (l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens), mettant en péril
l’aide internationale aux réfugiés et de ce fait la matérialisation de la
reconnaissance internationale du Droit au Retour. L’entité a, quant à elle, poursuivi
son activité de normalisation avec les Etats arabes (sous la houlette de
l’Arabie saoudite) et avec les Etats africains auprès desquels elle cherche un
soutien à l’ONU. Mais la victoire en Syrie de l’axe Syrie-Iran-Russie-Hezbollah
a renforcé la résistance armée à ses frontières et le retrait des américains de
Syrie a laissé l’entité sioniste seule face à ses ennemis. Les attaques répétées
qu’elle mène contre les forces syriennes et iraniennes basées au sud de la
Syrie ont pour l’instant uniquement conduit à un renforcement des moyens
militaires de défense syrienne par les Russes. Cette activité belligérante de
faible intensité apparait d’ailleurs plus à destination de son opinion interne
car l’entité n’apparait pas de taille, sur le plan militaire, à affronter
l’Iran. En interne, la persistance et l’efficacité de la résistance
palestinienne a conduit à une crise politique majeure suite à la démission de
Lieberman en décembre 2018, et la nécessité de convoquer des élections
législatives anticipées en avril 2019. La démission récente du commandant des
commandos de l’armée israélienne confirme cette instabilité politique au sein
de l’entité sioniste. Illustrant bien cette situation, Benny Gantz, ex chef
d’Etat-major de l’armée israélienne, a récemment déclaré qu’ « Israël
devrait se retirer à moyen terme de la Cisjordanie car il n’arriverait pas à
gérer la prochaine guerre ».

La Marche
pour le retour : un degré supérieur pour la résistance populaire

Alors que les forces politiques palestiniennes peinent
toujours à exprimer de manière unifiée leur rejet du deal du siècle, que
l’Autorité palestinienne maintient sa collaboration sécuritaire avec l’entité
sioniste, et que Abbas tente toujours de prendre le pouvoir à Gaza en coupant
les vivres au Hamas, la résistance populaire palestinienne se renforce. En
Cisjordanie elle ne faiblit pas et a pris, en 2018, une nouvelle forme à Gaza.
La Marche pour le retour est une nouvelle expression du génie populaire
palestinien. Complètement asphyxiée par un blocus depuis plus de 10 ans, la
population de Gaza n’a rien à perdre. Ainsi depuis fin mars, elle se mobilise
chaque vendredi pour marcher vers la barrière qui la sépare de la Palestine
occupée. Malgré la répression qui s’abat sur les manifestants (plus de 250
morts, dont 60 en un seul jour pour la commémoration de la Nakba, et près de
26000 blessés), la pression populaire sur l’entité sioniste est maintenue. De
plus, et même si elle se fait discrète, la résistance armée est toujours active
et efficace (en témoigne l’opération de novembre où elle a réussi à repousser
par surprise un commando terrestre ennemi), et le mouvement populaire est
soutenue par les principales factions palestiniennes. Bien que le rapport de
force puisse paraitre particulièrement disproportionné, la force symbolique de
cette résistance, et celui de la Marche du retour en particulier, est majeure. Le
message palestinien est clair. «Le peuple palestinien n’a plus rien à perdre,
il ne capitulera pas et rentrera chez lui, le Droit au retour est son droit ».
De fait, la politique sioniste pour faire disparaitre le peuple palestinien
depuis 70 ans a échoué. La résistance est aujourd’hui multiple et menace de
toutes parts l’entité coloniale.

Ainsi si la Palestine n’apparait pas actuellement comme
la pièce majeure des équilibres régionaux, le contexte pourrait lui être très
favorable. Sous la menace des forces de l’axe de résistance (Hezbollah, Iran et
Syrie) au Nord et de la résistance populaire palestinienne en interne, l’entité
sioniste apparait dans une situation plus fragile qu’elle ne l’a jamais été
depuis sa création. De plus, les contradictions au sein de l’axe occidental
affaiblissent sa position hégémonique et les intérêts russes dans la région bénéficient
pour l’instant aux forces anti-impérialistes et anti-sionistes. L’espoir est donc
permis pour les Palestiniens.




Gilets jaunes et antisionisme : les médias, des idiots utiles à la cause palestinienne !

Comité Action Palestine (28 février 2019)

           La médiatisation à outrance de la scène, où le raciste Alain Finkielkraut est qualifié de « sale sioniste » par un manifestant le 26 janvier à Paris, a permis d’ouvrir un débat auquel les gilets jaunes ne s’attendaient pas. Beaucoup d’entre eux ne connaissaient pas ou n’avaient qu’une vague idée du sionisme, certains ignoraient jusqu’à l’existence de Finkielkraut. D’autres enfin étaient plus au fait du soutien inconditionnel qu’il apporte à la politique israélienne et de ses multiples propos très ouvertement racistes. Et contrairement à ce que les médias et la classe politique souhaitaient, cet événement n’a pas conduit à un acte de contrition général des gilets jaunes, mais bien à une sensibilisation accélérée à l’antisionisme.

          Le sionisme est un mouvement colonial, donc raciste par nature, qui a pour objectif de fonder un Etat juif ethniquement pur en Palestine en chassant le peuple arabe autochtone au profit de colons originaires d’Europe. Le processus colonial a démarré au début du XXème siècle, donc  bien avant la seconde guerre mondiale. Il a conduit à la création de l’Etat d’Israël en 1948, date à laquelle une épuration ethnique massive a été perpétrée. En plus des nombreux massacres, 800 000 Palestiniens (environ 80% de la population totale)  ont alors été chassés de leurs terres. Ces Palestiniens et leurs descendants sont encore réfugiés, notamment dans les pays arabes voisins, et se voient privés depuis 70 ans de leur droit au retour chez eux. L’oppression coloniale se poursuit encore aujourd’hui, avec toute la violence qui la caractérise. Les Palestiniens résistent par tous les moyens possibles pour rester sur leurs terres, exercer leur droit à l’autodétermination et permettre le retour des réfugiés chez eux. Etre sioniste c’est soutenir cette politique coloniale. Etre antisioniste, c’est dénoncer ce colonialisme et soutenir la résistance du peuple palestinien.

         Alors que la Palestine et  la résistance permanente de son peuple ne font plus la une des médias français, ces derniers  ont appliqué aux gilets jaunes les méthodes éprouvées depuis longtemps vis-à- vis des antisionistes : désinformation massive et accusations d’antisémitisme. Mais le gilet jaune, avec cette intelligence politique qui le caractérise depuis le début du mouvement, s’est avéré imperméable à cette propagande. Bien mieux, les médias ont finalement contribué à faire connaître la cause du peuple palestinien. La bêtise au pouvoir fait œuvre salutaire !

Photo : https://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com




Au Venezuela comme en France, Macron contre la volonté populaire

« Nous sommes un peuple souverain »

Comité Action Palestine

Dans sa grande tradition impérialiste, la France vient d’apporter officiellement son soutien à la tentative de coup d’Etat fomenté au Venezuela par Juan Guaido, le principal opposant au gouvernement de Maduro. De concert avec dix-huit pays européens, elle emboîte ainsi le pas aux Etats-Unis qui menace d’intervenir militairement si le Président Maduro ne cède pas aux injonctions des grandes puissances occidentales. Le pays des « droits de l’homme », coutumier de l’ingérence internationale, se préoccuperait-il du sort et de la liberté des Vénézuéliens ? Au regard du contexte français, l’initiative française vire au tragi-comique. Aux prises avec un mouvement populaire de contestation sans précédent, miné par de nombreux scandales et accusé de corruption, le gouvernement français n’est pas le mieux placé pour donner des leçons de démocratie au pouvoir vénézuélien. Alors qu’il a opté pour une répression massive et une propagande grossière contre les gilets jaunes, cette prise de position anti-Maduro révèle, en réalité, une France vassalisée aux intérêts impérialistes américains. La dérive autoritaire du régime de Macron et la conduite d’une politique extérieure impérialiste constituent les deux faces d’une même pièce d’un capitalisme français miné par les contradictions.

Pour hâter sa fin, nous nous devons d’être aux côtés de tous ceux qui luttent en France et dans le monde pour l’avènement de la justice et le droit à l’autodétermination des peuples.

6 février 2019




Ain El Helweh: « et cette terre se transmet comme la langue » (M. Darwish)

Calendrier Palestine Libre 2018 « Dans le camp des réfugiés »

Ain El Helweh est le plus grand camp de réfugiés palestiniens au Liban. Il abrite aujourd’hui plus de 50 000 personnes vivant dans des conditions socio-économiques extrêmement difficiles. Bastion de la résistance palestinienne, le camp fût presque entièrement détruit pendant l’invasion israélienne au Liban dans les années 80. Il est aujourd’hui bouclé par l’armée libanaise qui a érigé un mur tout autour. Soumis à d’extrêmes tensions, le camp peut s’embraser à tout moment.

        Pourtant, en dépit des difficultés, et comme tous les camps palestiniens, Ain El-Helweh incarne toujours un fragment de Palestine en exil. Il en porte en lui la mémoire et l’identité palestinienne passée, présente et à venir. De générations en générations, se transmet le récit du pays perdu et de l’exil.

Muhammad Qassim al-Shaib, âgé une dizaine d’années en 1948, réfugié à Ain El-Helweh, vient de al-Ras al-Ahmar près de Safad en Galilée. C’était un village palestinien typique avec ses vergers d’agrumes et d’oliviers, ses champs de blé, sa source, son école primaire construite sous le mandat britannique, ses vestiges datant de la période byzantine. Les habitants ont fui le village, la clef de leur maison dans la poche, fin octobre 1948, alors que les sionistes perpétraient des atrocités dans les villages alentours. Les clefs sont toujours là, pendues au mur des maisons du camp. Les villageois sont partis vers le Nord, à pied, en voiture, en camion, en train, en bateau. Ils ont erré longtemps. Puis ils se sont arrêtés près de Saida où ils ont retrouvé leurs parents et voisins d’ al-Ras al-Ahmar et des autres villages. Cela fait 70 ans, ils y sont toujours et attendent de rentrer chez eux en Palestine.

Les camps de réfugiés, souvent organisés par village d’origine, témoignent de la géographie palestinienne et reproduisent l’attachement à la terre, aux solidarités familiales et claniques, aux pouvoirs locaux. Mais loin d’être un lieu d’expression d’une mémoire figée, ils représentent l’espace de construction de la société palestinienne, un espace de liberté et d’affirmation de son identité, un espace de résistance et d’espoir du retour en Palestine. Alors, malgré les difficultés passées et présentes, les camps sont des lieux d’avenir.

Au détour d’une des ruelles étroites d’Ain El-Helwhe, on croisera certainement le personnage d’Handala. Son créateur, le dessinateur palestinien Naji al-Ali, réfugié originaire al-Shajara près de Tibériade, a grandi ici. Assassiné en août 1987 par le Mossad, il disait « Handala est le témoin de cette ère qui ne mourra jamais, il pénètre la vie avec une force qui ne le quitte jamais, une légende dont l’existence est un défi à l’éternité. Ce personnage que j’ai créé ne disparaîtra pas après moi. Je ne crois pas exagérer en disant que je serai immortalisé à travers lui. »

Comme Handala immortalise le Martyr palestinien, les camps de réfugiés sont le symbole d’une Palestine bien vivante !




Al Wihdat, sanctuaire du Droit au Retour

Calendrier Palestine Libre 2018 « Dans le camp des réfugiés »

Al Wihdat est un camp légendaire dans l’histoire de la lutte nationale palestinienne. Etabli en 1955 à trois kilomètres au Sud d’Amman, il abritait initialement 5000 réfugiés palestiniens issus des villages situés entre Jaffa et al-Quds. Il fût l’un des principaux centres actifs du mouvement de libération de la Palestine en Jordanie. Le camp, rebaptisé la « République » par les organisations palestiniennes, abritait de nombreux résistants et était le lieu d’une intense activité politique et militaire. Cette mobilisation fut fortement réprimée par l’Etat jordanien qui y perpétra de nombreux massacres. En 1970, sa prise par l’armée jordanienne marqua la fin des évènements de « septembre noir » et l’expulsion des organisations de la résistance hors des frontières du pays.

Aujourd’hui al Wihdat illustre à lui seul les contradictions portées par la question des réfugiés palestiniens, entre attente du retour et intégration dans leur lieu d’exil. Près de 70 ans après sa création, il compte près de 60000 habitants et est complètement inclus dans le tissu urbain d’Amman. Toujours soumis à une administration particulière, le camp garde toutes les caractéristiques d’un espace de vie temporaire. Comme tous les autres camps de réfugiés palestiniens, il reste le symbole vivant de l’identité palestinienne et un sanctuaire du Droit au Retour. Pourtant depuis les années 70, afin d’annihiler le potentiel révolutionnaire de ses habitants, le gouvernement jordanien est intervenu plus directement. Une partie du camp fut détruite pour aménager de grandes artères permettant la surveillance et le maintien de l’ordre. Par ailleurs en espérant réduire les aspirations nationalistes des Palestiniens par l’amélioration de leurs conditions de vie, les règles d’urbanisation furent assouplies pour favoriser le développement économique. Ainsi au fil des années le camp est devenu un espace urbain doté d’une intense activité commerciale, parfaitement intégré au reste de la capitale jordanienne.

Pourtant, contrairement aux attentes des autorités jordaniennes et bien que la citoyenneté jordanienne leur fût octroyée dès 1951, les réfugiés palestiniens en Jordanie ne sont pas prêts à abandonner leurs revendications nationales. Bien au contraire, cette amélioration de leur situation économique renforce leur pouvoir de résistance et leur volonté de mettre en application de leur droit au retour.




Deisheh, de l’exil au contre pouvoir

Calendrier Palestine Libre 2018 « Dans le camp des réfugiés »

L’histoire du camp de Deisheh, à proximité de Bethleem, ressemble à celle de tous les autres camps, notamment ceux de Cisjordanie. Fuyant dès fin 1947, les attaques sionistes et la destruction de leurs villages, les réfugiés commencent une longue errance dont l’objectif est d’abord de survivre en s’éloignant le moins possible de leurs villages. Mais l’entité sioniste refuse dès le départ toute éventualité d’un retour, pourtant inscrit dans la Résolution 194. Au regard des négociateurs internationaux, la question des réfugiés palestiniens devient très rapidement celle d’un flot de main d’œuvre bon marché à fixer là où des perspectives économiques pourraient exister. Sous l’égide de l’UNRWA , il s’agit donc d’installer « provisoirement » les réfugiés les plus démunis dans des zones d’accueil. Alors qu’une justification humanitaire est avancée, la création des camps répond d’abord à une volonté d’empêcher le retour sur leurs terres et de contrôler politiquement et militairement cette masse de déshérités.

Deisheh est établi en 1949 pour regrouper 3000 réfugiés issus de 46 villages situés entre al-Quds et al-Khalil. Comme tous les autres camps, c’est d’abord un regroupement de toiles de tentes, faisant place, au milieu des années 50, à des unités d’habitation en dur, quelques m2 par famille, sans eau courante ni électricité, signe que le provisoire est fait pour durer. D’un lieu de survie et d’attente, Deisheh devient, dès le début des années 70, un lieu de résistance particulièrement actif pendant la première Intifada. La répression y est terrible, le couvre-feu presque incessant, les arrestations quotidiennes. L’occupant transforme même le camp tout entier en véritable prison, en l’encerclant d’un grillage de 6m de haut avec un seul portillon métallique comme point d’accès.

Si la clôture a disparu après Oslo, Deisheh avec ses 15 000 habitants actuels, reste, tout comme les autres camps de Cisjordanie, un espace d’exception. Considérés sous la responsabilité des instances internationales, les réfugiés dans les camps restent des Palestiniens à part, même sur la terre de Palestine. Tous les camps sont gérés par des comités populaires locaux nommés, sur la base d’une représentativité politique ou familiale, par l’autorité palestinienne qui perpétue ainsi un système discriminant, déjà instauré par l’UNRWA et l’occupant. Soumis à un réseau complexe d’autorités informelles, propre à chaque camp, ce sont les lieux d’exception et de chaos, que traduit si bien l’architecture anarchique de l’habitat. Ils sont l’expression encore visible du chaos engendré par la création de l’entité sioniste et du statut exceptionnel des réfugiés palestiniens. A ce titre, ils garantissent la pérennité du droit au retour.

Mais l’exception perpétue un esprit d’inventivité, de rébellion et de résistance sous toutes ses formes. Le dynamisme associatif palestinien renverse parfois des montagnes. Si le processus d’Oslo a marginalisé encore un peu plus la question, les réfugiés n’abandonneront jamais leur droit au retour. Les camps demeurent un espace de contre-pouvoir contre l’autorité palestinienne et les forces d’occupation. C’est en leur sein que se construit la société palestinienne de demain.