Les intellectuels israéliens aiment la guerre
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le 18/11/2006 8:50:00 (744 lectures) |
Article de Gilad Atzmon publié le 9 novembre 2006 sur son site . L’auteur est musicien de jazz et écrivain. Radicalement anti-sioniste, il a quitté Israël après son service militaire pour s’installer en Grande-Bretagne Gilad Atzmon déconstruit dans cet article le discours pseudo humaniste et universaliste de l’intellectuel israélien en vogue, David Grossman. Derrière sa vitrine d’homme de gauche, David Grossman ne propose rien d’autre que la bonne vision sioniste caractéristique, mélange d’admiration grossière pour l’Etat d’Israël, de croyance au mythe de l’universalisme juif, de racisme «suprématiste» juif et de paternalisme colonialiste. Le sionisme de la gauche laïque représenté par David Grossman n’a rien à envier à celui de droite au point de se demander si Israël a encore besoin d’une droite. Et notre intellectuel se trompe décidément toujours lorsqu’il envisage la solution à deux Etats car la Palestine est Une et ne sera jamais partagée.
Le monde, apparemment, est en train d’offrir une ovation debout au nouvel orateur israélien dans le vent, l’écrivain David Grossman. Les relations publiques israéliennes ont désespérément besoin d’un intellectuel honnête, d’un auteur qui « tienne un langage de paix », d’un homme qui prêche la « réconciliation ». Bref, d’un homme de shalom [et non d’un homme de paix, la nuance est loin d’être mince… NdT] Hier, le quotidien britannique The Guardian a publié le discours d’hommage prononcé par Grossman, la semaine dernière, lors de la cérémonie à la mémoire d’Yitzhak Rabin, à Tel Aviv. Grossman est un « Israélien éclairé ayant de la bouteille », c’est un sioniste de la gauche light, qui aspire à un certain changement. J’ai lu son discours, et je dois dire que, bien que son auteur soit considéré par d’aucuns comme un intellectuel israélien de gauche, je ne vois rien d’autre, dans son speech, que la bonne suprématie juive pur sucre, et même le vieux programme sioniste raciste sans fard. Grossman, à l’instar de beaucoup de ses concitoyens israéliens, est totalement immergé dans un discours chauvin siono-centré, un discours de déni de la cause palestinienne, en particulier de ce qu’elle comporte de plus essentiel : le droit au retour . J’ai rassemblé et souligné certains passages outranciers du discours de l’orateur ascensionnel de la gauche hébraïque. Grossman et le mythe des « valeurs juives universelles » Grossman, cet Israélien que certains parmi nous se plaisent à aimer, nous offre un aperçu magistral de la mentalité sioniste laïque . « Je suis », dit-il, parlant de lui-même, « un homme totalement dépourvu de croyance religieuse . » Mais Grossman ne s’en tient pas là. ; il affirme : « Pour moi, la création – et l’existence même – de l’État d’Israël tient d’un miracle, qui nous est advenu, à nous, en tant que peuple ; un miracle politique, un miracle national, un miracle humain… » Alors, je me demande, comme ça : « Mais… depuis quand un laïc croit-il aux miracles ? » Il faut sans doute rappeler à notre « intellectuel israélien agnostique » qu’un miracle, c’est « un effet, ou un phénomène extraordinaire, dans le monde physique, surpassant toutes les puissances naturelles connues par la raison de l’homme, et attribuable, par conséquent, à une cause surnaturelle. » De fait, Grossman, comme beaucoup d’Israéliens, a réussi à nous inventer une nouvelle forme d’agnosticisme : il s’agit de rien moins que d’un athéisme « référant à certaines causes surnaturelles » ! Très bizarrement, les laïcs sionistes sont quasiment des orthodoxes fondamentalistes de leur nouvelle religion pathétique. Puis-je filer un coup de main à Grossman et lui suggérer l’idée qu’Israël n’a strictement rien d’authentiquement héroïque, ni, encore moins, de miraculeux ? Israël est un vulgaire État raciste ultra-nationaliste. Point barre. Si le relatif succès d’Israël semble miraculeux à d’aucuns, c’est simplement parce qu’il a fallu deux ou trois générations à ses voisins arabes pour parvenir à s’adapter au niveau atteint par le sionisme dans la barbarie. D’après Grossman, Israël aurait dilapidé ce fameux « miracle », cette « immense et précieuse opportunité que l’Histoire lui aurait offerte – celle de créer un État démocratique et éclairé fonctionnant correctement et agissant conformément aux valeurs juives et universelles. » À suivre la vision de l’esprit juif que nous propose Grossman, les Lumières et la démocratie sont étrangers aux juifs, et leur occurrence dans la sphère juive doivent donc être perçue comme un miracle. Sans doute sans en avoir conscience, Grossman avoue ici que les « Lumières » et la « démocratie » sont antithétiques de la mentalité juive. En cela, ce courant intellectuel n’a rien de particulièrement nouveau, ni de particulièrement original. En effet, les premières générations d’idéologues sionistes pensaient qu’à Sion, un nouveau juif émergerait : un juif civilisé, laïc, démocrate et éclairé, qui se rebellerait contre son ancêtre diasporique moralement dégénéré… Mais il y a plus préoccupant : Grossman cherche délibérément à embobiner ses lecteurs en faisant référence à des « valeurs juives universelles », comme si ces valeurs n’étaient rien d’autre qu’un lieu commun admis par tout un chacun. Aussi bizarre cela que cela puisse paraître à certains, il n’existe aucun ensemble universellement reconnu de « valeurs juives universelles. » Existerait-t-il un seul ouvrage explicitant cette notion de « valeurs juives universelles » ? Je ne le pense pas. S’il est un ensemble de valeurs qui peut être considéré incarner des « valeurs juives universelles », c’est bien celui qui est véhiculé par le consensus juif. Ainsi, les juifs de la Torah, qui soutiennent sincèrement la cause palestinienne, savent certainement, quant à eux, ce que sont des valeurs universelles. Le hic, c’est que Grossman se revendique laïc. Ce n’est donc certainement pas à l’interprétation juive orthodoxe qu’il pense lorsqu’il se réfère à une universalité juive. En fait, c’est le christianisme qui donne du judaïsme une traduction dans un système universel de valeurs. C’est le christianisme, qui transforme le « voisin » en un « prochain universel ». Il y a sans nul doute beaucoup d’humanistes universalistes qui se trouvent être d’origine juive. Mais il n’existe aucun ensemble reconnu de « valeurs juives universelles ». Grossman et les autres intellectuels juifs qui répandent le mythe de je ne sais trop quel « universalisme juif » ne font que se tromper eux-mêmes et tromper ceux qui les écoutent. De plus, le fait que le sécularisme juif soit exempt de support philosophique explique peut-être la banqueroute morale généralisée de l’État juif. Comme nous allons le lire sans tarder, Grossman tombe personnellement dans le même piège. Il a peut-être conscience de l’existence d’un concept tel la moralité, mais il est incapable de proposer une quelconque vision morale du monde qui ait une quelconque cohérence. Il a peut-être conscience des effets négatifs du racisme, mais il tombe lui-même, la tête la première, dans la bigoterie suprématiste, avec une facilité déconcertante… Grossman, un raciste éhonté Grossman est assez courageux pour ouvrir les yeux et reconnaître que « la violence et le racisme » se sont emparés de son chez-soi, Israël. Jusqu’ici, pas de problème. Pendant une seconde, je veux bien admettre que Grossman est véritablement un juif laïc éclairé anti-raciste. Mais, dès la phrase suivante, il demande : « Comment se fait-il qu’un peuple ayant nos capacités de créativité et de régénérescence » a réussi à se trouver, de nos jours « dans un tel état de faiblesse et d’impuissance » ? Tout lecteur critique est fondé à se demander à quoi Grossman fait en réalité allusion quand il évoque « un peuple ayant nos capacités de créativité et de régénérescence » ? C’est très simple : Grossman est authentiquement persuadé du caractère unique du peuple élu. Autrement dit, Grossman n’est rien d’autre qu’un déterministe biologique. La question à poser, dès lors, est la suivante : comment se fait-il que le Guardian consacre trois pages à un suprématiste juif ? Je pense que les juifs jouissent de certaines libertés qui sont déniées au reste de l’humanité. Ainsi, par exemple, il m’est difficile de croire que le Guardian ouvrirait ses colonnes à un philosophe allemand glorifiant « les capacités de créativité et de régénérescence » du peuple aryen. Or, d’une manière ou d’une autre, un juif intellectuel peut faire ce qui revient exactement au même, en s’en tirant à bon compte. Bien que Grossman ait l’honnêteté d’admettre que les Palestiniens aient choisi le Hamas pour les diriger, il appelle Olmert à « s’adresser aux Palestiniens en passant par-dessus la tête du Hamas ; à s’adresser aux modérés parmi eux… à ceux qui, comme vous et moi, sont contre le Hamas et son idéologie. » Dites-moi, Monsieur Grossman… Si vous êtes vraiment un humaniste universaliste, ce dont je doute fortement, vous feriez bien mieux d’apprendre à écouter le Hamas, plutôt que vous adresser aux Palestiniens par-dessus la tête de leurs dirigeants élus… Grossman, à l’évidence, est incapable de respecter ses voisins, dont il ne respecte pas les choix démocratiques. De manière générale, je suggère que nous nous départissions de la méthode exécrable et minable consistant à passer par-dessus la tête de qui que ce soit, pour nous adresser à Bush et à Blair. Les intellectuels ont le privilège d’écouter et d’agir de manière éthique ; ils doivent s’en montrer dignes. Grossman-la-Victime Mais la chutzpah juive grossmanienne va encore plus loin : « Regardez les Palestiniens, ne serait-ce qu’une seule fois », dit-il à Olmert. « Vous verrez un peuple non moins torturé que nous le sommes nous-mêmes. » Non ; ça n’est pas une blague ! Grossman, ce juif colonialiste qui se pavane dans les territoires palestiniens occupés en pratiquant l’épuration ethnique d’une nation indigène, regarde ses victimes palestiniennes terrorisées tout en disant : « Les Palestiniens sont presque aussi torturés que je le suis moi-même » ! ? !… Voilà probablement qui dit tout, et le reste. Cela résume le niveau atteint par la cécité de la siono-gauche. Vraiment : si ça, c’est la gauche israélienne, Israël a-t-il encore besoin d’une droite ? Et, de fait, dans sa conclusion, Grossman le reconnaît : « Les différences entre la droite et la gauche ne sont plus tellement importantes, de nos jours. » Exact. A l’aune du discours politique européen, Grossman, cet icône intellectuel de la gauche israélienne, n’est rien d’autre qu’un banal néocon de droite. Grossman est un homme qui prêche le racisme, au nom de la bonne volonté. C’est un homme qui parle par-dessus la tête des autres. Grossman et la « solution » à deux États Grossman se trompe lui-même, ainsi que ses auditeurs, en disant que « la terre sera partagée, et il y aura un Etat palestinien. » Vous avez en partie tort, Monsieur Grossman. Cette terre ne sera jamais partagée. Je vais parler très simplement, afin que vous et vos rares semblables sionistes de gauche puissent ouvrir les yeux, une bonne fois pour toutes : La Palestine, c’est une terre. Israël, c’est un État. La Palestine sera toujours la Palestine, c’est-à-dire : une terre. Israël, en revanche, est un État nationaliste raciste, qui disparaîtra. Cette terre de Palestine ne sera pas divisée. Elle sera réunie en Une Unique Palestine. Plutôt que vouloir perpétuer un État nationaliste raciste, j’invite Grossman et ses amis à rejoindre le mouvement palestinien. Un mouvement qui fait sienne l’égalité en terre de Palestine. Cette Palestine, où les valeurs sont authentiquement universelles. Gilad Atzmon Traduction française originale de M. Charbonnier, révisée par F. Giudice, membres de Tlaxcala (www.tlaxcala.es) réseau de traducteurs pour la diversité liguistique. |
Ce texte est un extrait de Ma Non-Violence du Mahatma Gandhi écrit en 1938, édité par le Navajivan Publishing House en 1960 et traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier.
Nous n’adhérons pas à la philosophie de la non-violence de Gandhi mais sa critique de la colonisation juive de la Palestine nous parait pertinente.
Gandhi montre, à la veille de la seconde guerre mondiale, avec une clairvoyance particulière, que la solution à la question juive ne réside nullement dans l’établissement d’un foyer national juif en Palestine.
La raison essentielle, c’est que la Palestine est arabe et que toute implantation collective juive dans ce pays est un « crime contre l’humanité », une spoliation éhontée des palestiniens, une injustice inqualifiable.
Une injustice que rien ne pourrait justifier, ni la répression antisémite dans l’Allemagne nazie, ni le mépris anti-juif généralement affiché en Occident, encore moins le recours à une interprétation abusive et infondée des textes sacrés sur la Palestine biblique.
Bien qu’adepte de la non-violence, Gandhi estime que si les palestiniens choisissaient la voie de la résistance armée, la chose serait dans ce cas tout à fait compréhensible.
La solution à cette question juive se trouve dans le combat pour un traitement plus égalitaire des juifs dans leurs pays respectifs d’Occident et dans une posture de résistance non-violente et déterminée des juifs eux-mêmes face à l’ennemi nazi.
J’ai reçu plusieurs lettres dans lesquelles on me demande d’exposer mes vues sur la question arabo-juive en Palestine et la persécution anti-juive en Allemagne. Ce n’est pas sans quelque hésitation que je me risque à offrir mes opinions sur cette question très délicate.
Toute ma sympathie est acquise aux Juifs. J’ai connu certains d’entre eux, d’une manière très intime, en Afrique du Sud, et certains d’entre eux sont devenus des amis pour la vie. Grâce à ces amis, j’ai pu mieux connaître la persécution à laquelle ils ont été soumis depuis la lointaine histoire.
Ils ont été, en quelque sorte, les intouchables de la Chrétienté. La similarité entre le traitement que les Chrétiens leur ont infligé et celui que les Hindous infligent aux Intouchables est frappante. Un jugement de nature religieuse a été invoqué dans les deux cas pour justifier les traitements inhumains qui ont été infligés aux uns comme aux autres. A part les amitiés qu’il m’a été donné de nouer avec certains d’entre eux, ma sympathie pour les Juifs ressortit donc à des raisons de caractère universel.
Mais ma sympathie ne me rend pas sourd aux exigences de la justice. L’appel à un foyer national pour les Juifs ne me séduit guère. La légitimité en est recherchée dans la Bible et dans la ténacité dont les Juifs ont depuis tout temps fait preuve dans la formulation de leur attachement à un retour en Palestine. Pourquoi ne pourraient-ils pas, comme les autres peuples sur Terre, faire de cette contrée leur pays où naître et où gagner sa vie ?
La Palestine appartient aux Arabes de la manière dont l’Angleterre appartient aux Anglais ou la France aux Français. Il serait injuste et inhumain d’imposer (une domination par) les Juifs aux Arabes. Ce qui se passe en Palestine, de nos jours, ne saurait être justifié au nom d’un quelconque code moral de conduite. Les mandats n’ont pas d’autre justification que la dernière guerre mondiale [la Première, NdT]. Ce serait à n’en pas douter un crime contre l’humanité de contraindre ces Arabes si justement fiers à ce que la Palestine soit restituée aux Juifs en tant que leur foyer national, que ce soit partiellement, ou en totalité.
Une alternative bien plus noble serait d’insister sur un traitement équitable des Juifs où qu’ils soient nés et où qu’ils aient été élevés. Les Juifs nés en France sont Français dans l’exact sens où les Chrétiens nés en France le sont. Si les Juifs n’ont pas d’autre foyer national que la Palestine, vont-ils accepter l’idée de devoir être contraints à quitter les autres parties du monde où ils sont installés ? Ou bien voudront-ils une double patrie, où ils puissent demeurer selon leur bon plaisir ?
La revendication d’un foyer national pour les Juifs ne fait qu’offrir sur un plateau une justification présentable à l’Allemagne qui expulse ses Juifs. Mais la persécution allemande des Juifs semble ne pas avoir de parallèle dans l’histoire. Les tyrans de jadis n’étaient jamais allés aussi loin dans leur folie que semble l’avoir fait Adolf Hitler. Et il continue à le faire avec un zèle religieux. N’est-il pas, en effet, en train de prôner une nouvelle religion faite d’un nationalisme militant et exclusif, au nom duquel toute inhumanité devient un acte d’humanité devant être récompensé, ici et maintenant.
Le crime d’un jeune leader certes intrépide, mais non moins complètement dément, est en train d’être imposé à l’ensemble de son ethnie avec une férocité absolument incroyable. Si jamais une guerre pouvait être justifiée, au nom de l’humanité, et pour elle, une guerre contre l’Allemagne, destinée à prévenir la persécution délibérée d’une race humaine toute entière serait totalement justifiée. Mais je ne crois en aucune guerre. Discuter le pour et le contre d’une telle guerre est, par conséquent, complètement hors de propos pour moi.
Mais s’il ne peut être question d’une guerre contre l’Allemagne, même avec l’énormité du crime commis contre les Juifs, il ne saurait être question, non plus, d’une alliance avec ce pays. Comment une alliance pourrait-elle être conclue entre une nation qui revendique la défense de la justice et de la démocratie et une nation qui est l’ennemi déclaré de l’une comme de l’autre ? Ou bien, alors, peut-être l’Angleterre est-elle en train de glisser vers une dictature armée avec tout ce que cela comporte ?
L’Allemagne est en train de démontrer au monde entier comment la violence peut être utilisée efficacement lorsqu’elle n’est entravée par aucune hypocrisie ni aucune faiblesse se faisant passer pour de l’humanisme. Elle montre aussi à quel point sa violence est hideuse et terrible dans son horrible nudité.
Les Juifs peuvent-ils résister à cette persécution planifiée et éhontée ? Ont-ils un moyen de préserver leur dignité, et de ne pas tomber dans le désespoir et l’abandon d’eux-mêmes ? Je fais le pari que c’est possible. Nul être humain croyant en un Dieu vivant ne doit se sentir impuissant ou abandonné. Jéhovah, le Dieu des Juifs, est un Dieu plus personnel que celui des Chrétiens, des Musulmans ou des Hindous, bien qu’il s’agisse, en fait, par essence, du Dieu commun à tous ces croyants, c’est leur Dieu unique, sans associé et échappant à toute description.
Mais comme les Juifs attribuent à Dieu une personnalité et croient qu’Il commande chacun de leurs actes, ils ne devraient pas se sentir impuissants. Si j’étais juif et né en Allemagne, si j’y gagnais ma vie, je proclamerais que l’Allemagne est mon pays, autant qu’elle peut être le pays de l’ aryen gentil le plus baraqué, et je le défierais de me tuer ou de m’enfermer dans sa forteresse ; je refuserais d’être expulsé ou soumis à un traitement discriminatoire. Et pour ce faire, je n’attendrais pas que mes coreligionnaires juifs viennent me rejoindre dans la résistance civile, mais j’aurais la certitude qu’à la fin du compte les autres seraient amenés à suivre mon exemple…
… Et maintenant, un mot aux Juifs de Palestine. Je suis absolument persuadé qu’ils se fourvoient. La Palestine biblique ne correspond à aucun territoire géographique. Elle est dans leurs coeurs. Mais s’ils doivent absolument considérer la Palestine de la géographie comme leur foyer national, c’est un péché inexpiable d’y pénétrer à l’ombre du canon britannique. Un acte de nature religieuse ne saurait être posé avec l’assistance des baïonnettes et des bombes. Ils ne peuvent s’installer en Palestine qu’en respect de la bonne volonté des Arabes. Ils devraient s’efforcer de se gagner le coeur des Arabes.
C’est le même Dieu qui commande aux coeurs des Arabes et à ceux des Juifs… Ils trouveront le monde à leurs côtés dans leur aspiration religieuse. Il y a des centaines de manières de s’entendre avec les Arabes, pour peu qu’ils écartent résolument l’aide que leur apporte la baïonnette britannique. Telles que les choses se déroulent actuellement, ils sont co-responsables avec les Britanniques de la spoliation d’un peuple qui ne leur a jamais porté un quelconque tort.
Je ne défends pas les excès des Arabes. J’eusse aimé qu’ils eussent adopté la non-violence dans leur résistance à ce qu’ils considèrent à juste titre comme une agression inqualifiable contre leur pays. Mais si l’on se réfère aux lois généralement admises du bien et du mal, rien ne peut être dit contre la résistance des Arabes à une injustice massive.
Laissons les Juifs qui prétendent être le peuple élu en apporter la preuve par choix qu’ils feront de la non-violence afin de revendiquer une place sur cette terre. Tout pays est le leur, Palestine y comprise, non pas en conséquence d’une agression, mais en vertu d’un service altruiste envers leur prochain. Un ami juif m’a envoyé un livre intitulé « La contribution juive à la civilisation », écrit par un Cecil Roth. Ce livre énumère tout ce que les Juifs ont apporté à la littérature, aux arts, à la musique, au théâtre, à la science, à la médecine, à l’agriculture etc… de part le monde. Avec un tel héritage, les Juifs sont fondés à refuser d’être traités comme les déchets de l’Occident, d’être méprisés ou traités avec condescendance. Ils peuvent obtenir le respect et l’attention du monde en se montrant dignes d’avoir été choisis par Dieu, au lieu de tomber dans la déchéance des brutes oubliées de Dieu. Ils peuvent ajouter à leurs contributions, innombrables et inestimables, (à l’Humanité) celle, suprême, de l’action non-violente.
Mahatma Gandhi
Extrait de « Ma Non-Violence » par le Mahatma Gandhi, édité par Sailesh Kumar Bandopadhaya – Ahmedabad : Navajivan Publishing House – 1960]
Traduit de l’anglais par M. Charbonnier, membre de Tlaxcala, réseau de traducteurs pour la diversité liguistique.
le 15/11/2006 19:30:00 (759 lectures) |
Article d’Alain Dieckoff paru à l’automne 1999 dans la revue Sociologie et Société vol XXXI, n°2. L’auteur est directeur Nos conceptions diffèrent de celles de Dieckoff dans la mesure où il n’appréhende pas d’emblée la situation des palestiniens comme une réalité coloniale et part de la notion de démocratie pour étudier le système politique israélien. Cependant nous avons tenu à publier cet article car Dieckoff a le mérite de pousser à fond la réflexion dans le cadre de sa démarche pour étudier les limites consubstantielles de la « démocratie » israélienne. L’idée démontrée par Dieckhoff de manière rigoureuse dans cet article, en s’appuyant sur un large éventail de dispositifs juridiques et de faits historiques, est que le caractère démocratique d’Israël est contrebalancé par la nature ethnique de cet Etat. Si la nation israélienne peut se prévaloir de reposer sur des élections démocratiques, si elle peut prétendre avoir fait avancer l’égalité juridique en matière de droits civils, politiques et sociaux, en revanche, demeurent ancrés au cœur de l’Etat une discrimination institutionnalisée autorisant la suprématie juive ainsi qu’un traitement différentiel des juifs et des arabes dans l’application des lois. Les lois d’expropriation terrienne corrélées à une stratégie de transfert des palestiniens et à une politique autoritaire vis-à-vis des non expulsés, l’accès différentiel à la citoyenneté pour les juifs (automatique) et pour les arabes (conditionnel), l’absence de ces derniers dans les instances de pouvoir de l’Etat, la discrimination dans l’accès à l’emploi, dans le bénéfice des droits sociaux, tout cela prouve clairement l’essence juive de l’Etat d’Israël, son caractère ethno-national et les contradictions inhérentes à la démocratie israélienne. SOMMAIRE 1. Les arabes en Israël : citoyens et/ou étrangers ? Au nombre des succès que les dirigeants israéliens portent volontiers à leur crédit figurent, en bonne place, le fait d’avoir établi au Proche-Orient la seule véritable démocratie qui ait fonctionné de façon ininterrompue depuis un demi-siècle. Ce sentiment, non dénué d’autosatisfaction, repose certainement sur d’incontestables réalités, et les spécialistes de la démocratie n’ont jamais manqué de ranger Israël parmi les pays démocratiques (Dahl, 1971, p.246 ; Lijphart, 1984, p. 34-45). Que la démocratie israélienne soit vigoureuse, la convocation en mai 1999, pour la quinzième fois depuis 1948, du corps électoral pour choisir 120 députés parmi une trentaine de listes suffit à le prouver. Parallèlement, et pour la seconde fois depuis 1996, les 4,285 millions d’électeurs étaient appelés à élire directement leur Premier ministre. Ces choix ont été effectués à l’issue d’une campagne électorale rythmée par d’intenses débats publics, relayés par une presse libre, sous le contrôle vigilant d’une Cour suprême particulièrement attentive depuis deux décennies au respect des libertés publiques. Le bilan apparaît comme d’autant plus flatteur si l’on tient compte de la situation géopolitique d’Israël dans la région. En effet, cette démocratie a fonctionné bien que le pays ait été entouré pendant des décennies par des États autoritaires avec lesquels il était engagé dans une confrontation totale pendant trente ans (jusqu’en 1979, date de la paix avec l’Égypte). Pourtant, peut-on s’arrêter à ce constat d’une compétition électorale ouverte pour considérer qu’en Israël la citoyenneté constitue à la fois un concept et une pratique « allant de soi »? Quelle place cette appartenance citoyenne a-t-elle dans l’ordonnancement politique d’un État qui se définit officiellement comme « État juif en Terre d’Israël »? Comment cette citoyenneté fonctionne-t-elle dans un État qui comporte une minorité arabe regroupant près du cinquième de la population? 1. LES ARABES EN ISRAËL : CITOYENS ET/OU ÉTRANGERS ? Les signataires de la déclaration d’indépendance ont proclamé avec force leur adhésion à une citoyenneté à fondement universaliste puisqu’on y lit : « l’État d’Israël assurera la plus complète égalité sociale et politique à tous ses habitants sans distinction de religion, de race ou de sexe[…] nous demandons aux habitants arabes de l’État d’Israël de préserver la paix et de prendre leur part dans l’édification de l’État sur la base d’une égalité complète de droits et de devoirs et d’une juste représentation dans tous les organismes provisoires et permanents de l’État ». Voilà pour les principes. En réalité, les choses se passèrent de façon quelque peu différente. Entre 1949 et 1952, date de l’adoption de La loi sur la citoyenneté, les débats furent vifs au sein du parti dominant au pouvoir, le Mapai (parti des travailleurs d’Eretz Israël), quant au sort qu’il convenait de réserver aux résidents arabes présents sur le territoire israélien. Deux courants nationalistes s’y affrontaient : les modérés et les intransigeants (Kafkafi, 1998). Si les deux « écoles » partageaient la même adhésion idéologique au sionisme et à ses objectifs (rassemblement des Juifs de diaspora en Israël, développement de la présence juive sur le terrain…), elles divergeaient quant à l’évaluation des conditions favorables à la réalisation du sionisme. Pour les premiers — représentés par le ministre des Affaires étrangères, Moshé Sharett, ou le secrétaire général du syndicat Histadrout, Pinhas Lavon –, il était dans l’intérêt d’Israël d’adopter une ligne politique conciliante tant vis-à-vis des États arabes voisins que des Arabes demeurant sur le territoire israélien. A l’inverse, les seconds — représentés par une pléiade « d’experts en affaires arabes » (Yehoshua Palmon, Uri Lubrani, etc.) et par des responsables de l’armée ayant l’oreille du Premier ministre, David Ben Gourion — penchaient pour une ligne dure, seule susceptible à leurs yeux d’imposer Israël comme fait politique incontournable dans la région. Le courant activiste donna, incontestablement, le la. À l’évidence, nombre d’Arabes qui se trouvaient désormais sous juridiction israélienne étaient hostiles au sionisme et avaient combattu, les armes à la main, le projet de création d’un État juif. En même temps, cette minorité arabe constituée d’une population largement rurale, privée d’élites (car elles avaient pour la plupart gagné les pays arabes voisins) se résigna assez vite à son nouveau statut et admit que son destin se jouait désormais à l’intérieur de l’État d’Israël. Pourtant, les Arabes furent considérés collectivement, dans une logique étroitement sécuritaire, comme une cinquième colonne. Traités en ennemis, et non comme de futurs concitoyens, ils furent soumis à toute une série de mesures coercitives. La plus violente fut l’expulsion par la force, après la fin de la guerre et jusqu’en 1951, de 20 à 30 000 Arabes habitant les zones frontalières vers la Syrie, la Jordanie ou la bande de Gaza. Ce nettoyage des frontières était officiellement motivé par des raisons de sécurité (éviter que les villages arabes ne deviennent des points d’appui éventuels en cas d’offensive arabe) mais la perspective de réduire le nombre d’Arabes au sein de l’État d’Israël était présente dans l’esprit de nombreux décideurs (Morris, 1987). Il ne pouvait d’ailleurs en être guère autrement puisque des responsables de haut rang tant civils (Ben Gourion) que militaires (Moshé Dayan) avaient prôné le transfert, si possible volontaire, mais éventuellement forcé, des Arabes hors des frontières de l’État (Morris, 1998). L’écho que rencontra cette idée du transfert dans le courant activiste est, nous semble-t-il, le reflet de l’aporie majeure du sionisme : son extrême difficulté à prendre en compte l’existence de l’Autre (arabe) qui préexistait à son projet de reconstruction nationale. Comme projet politique, le sionisme n’a guère laissé de place à l’altérité, il n’a su ni penser, ni intégrer dans sa pratique la différence ethno-nationale. Dans ce contexte, la tentation de se débarrasser de cet Autre en le transférant ailleurs ne pouvait qu’être forte. En déclarant « je ne suis pas disposé à accepter même un Arabe supplémentaire [car] je veux qu’Israël soit totalement juif » (Scheffer, 1996, p.484), le député Eliahu Carmeli ne faisait qu’exprimer en 1949, de façon extrême, l’impossibilité d’aménager une place à l’Autre. Ce fait découle logiquement d’une perception réductrice de l’État d’Israël comme grande communauté juive, et non comme un État coiffant une société où résident des Juifs (mais pas nécessairement qu’eux). Or, alors que les communautés juives de diaspora fonctionnent, dans un contexte minoritaire, comme des structures volontaires ne rassemblant, par définition, que des Juifs, l’État est une institution rationnelle fonctionnant sur une base territoriale et qui a juridiction sur l’ensemble de la population quelles que soient ses origines ethniques, religieuses… À l’évidence, les implications de ce passage de l’autonomie des communautés à la souveraineté étatique échappaient à certains dirigeants du jeune État, et non des moindres. Ben Gourion avouait ainsi qu’il ne voyait rien de moralement, ni de politiquement répréhensible à envisager le transfert de la minorité arabe puisque les « droits de l’État avaient préséance sur ceux des individus » comme la Hongrie et la Roumanie l’avaient montré en expulsant certains de leurs citoyens (Kafkafi, 1998, p. 353). La référence à deux pays d’Europe orientale qui étaient loin d’être des parangons de démocratie est hautement significative. Elle atteste que nombre de dirigeants sionistes qui venaient précisément de la zone russo-polonaise avaient une familiarité, d’ailleurs douloureuse, avec des États autoritaires, fondés sur un nationalisme ethnique souvent exclusiviste (Sternhell, 1996). De ce fait, ils étaient plus accoutumés aux logiques d’exclusion — dont les Juifs étaient d’ailleurs fréquemment les victimes toutes désignées — qu’aux pratiques d’inclusion, en particulier par le biais d’une citoyenneté de nature universaliste. Si le recours à l’éviction pure et simple des Arabes hors du territoire israélien fut limité, comme nous l’avons dit, aux zones frontalières durant la période de fondation de l’État, deux autres méthodes furent employées, à l’instigation du cercle des activistes nationalistes, envers l’ensemble de la population arabe : l’imposition d’un gouvernement militaire et l’expropriation des terres (Dieckhoff, 1993). L’administration militaire fut imposée aux Arabes en octobre 1948 « pour raison de sécurité ». Elle instaurait un système de contrôle général qui limitait strictement l’exercice des libertés publiques de tous les Arabes, et non pas seulement de ceux soupçonnés d’activités hostiles. Restrictions sévères des déplacements, assignations à résidence, détentions administratives — soumises à un contrôle judiciaire minimal –, censure de la presse arabe furent fréquentes durant cette période tandis que la liberté d’association politique était soumise à d’innombrables contraintes. Les possibilités d’expression politique des Arabes étaient d’ailleurs d’autant plus limitées qu’à l’exception d’une petite formation de gauche (Mapam), les partis sionistes, y compris le Parti travailliste de Ben Gourion, étaient tout simplement fermés aux adhérents arabes. Pas étonnant dans ces conditions que beaucoup d’Arabes se soient reconnus dans le Parti communiste, seule formation ouvertement binationale, qui prônait la transformation de l’État d’Israël en une collectivité de citoyens (Greilsammer, 1978). Si certaines mesures appliquées à la population arabe répondaient à de réels impératifs de sécurité comme la prévention de l’espionnage, la lutte contre le terrorisme, etc, leur application généralisée sur une longue période (le gouvernement militaire ne fut définitivement supprimé qu’en 1966), en faisaient autant d’éléments d’un véritable système de mise en subordination (Lustick,1980). Dans le domaine foncier, les Arabes d’Israël furent soumis dès 1948 à toute une kyrielle de lois qui conduisirent à un transfert massif de la propriété (Kretzmer, 1990, p. 49-76). En tant qu’État successeur, Israël prit possession de toutes les terres publiques et de celles considérées comme sans maître, mais un tiers des terres restaient légalement la propriété privée d’Arabes. Une législation appropriée y mit rapidement un terme : non seulement toutes les terres et immeubles des Palestiniens réfugiés dans les pays arabes voisins furent progressivement transférés à l’État, mais il en alla de même pour la moitié des terres appartenant à des Arabes israéliens qui furent considérés, pour la moitié d’entre eux, comme « présents-absents »[1] en vertu de la Loi sur les absents de 1950. Cette fiction juridique proprement orwéllienne signifiait que bien que présents physiquement sur le territoire israélien ces Arabes étaient considérés comme « des propriétaires absents » parce qu’ils s’étaient trouvés à un moment ou à un autre, après le 29 novembre 1947 (date de la résolution de l’ONU sur le partage de la Palestine mandataire), dans une zone contrôlée par des forces hostiles à Israël. Cette législation d’exception en vigueur jusqu’à la fin des années 1950 conduisit à la réduction drastique de la propriété arabe qui ne couvre plus aujourd’hui que 3,5 % de la surface du pays tandis que l’État en contrôle désormais fermement 93 % (le reste appartient à des particuliers juifs). Dans le domaine foncier, il est clair que les Arabes d’Israël n’ont guère été mieux traités que leurs frères réfugiés au Liban ou en Syrie et leur citoyenneté ne leur fut, en l’occurence, d’aucun secours. L’État les considéra d’abord, non comme des citoyens israéliens dont il fallait avant tout respecter les droits, mais comme des Arabes palestiniens, membres d’un groupe ethno-national qu’il convenait de transformer en minorité dominée. L’octroi de la citoyenneté aux Arabes demeurés sur le territoire israélien n’alla d’ailleurs pas sans mal. Ben Gourion, fidèle à son inflexibilité coutumière, était partisan de restreindre au maximum l’accès à la citoyenneté des Arabes qu’il soupçonnait de déloyauté générale envers l’État. Le projet de loi initial mentionnait des conditions très restrictives qui auraient exclu deux tiers des Arabes du droit d’obtenir automatiquement la citoyenneté israélienne et en auraient fait des étrangers permanents…dans le pays qui les avait vu naître. Sur ce dossier, le courant nationaliste modéré finit par l’emporter, et la loi de 1952 accorda la citoyenneté quasi-automatique aux Arabes d’Israël. Ce succès, non négligeable, doit être mis à l’actif des « libéraux », et en premier lieu de Moshé Sharett. Toutefois, ces derniers n’obtinrent ni l’abolition immédiate du gouvernement militaire, ni la restitution des propriétés aux personnes déplacées (« présents-absents »). À quoi attribuer ces échecs? Sans doute à l’opposition tenace de l’appareil militaire et de l’homme fort du pays, Ben Gourion, à toute « faiblesse » excessive envers les Arabes d’Israël. Plus profondément, l’insuccès des modérés était lié à leurs propres amiguïtés. Leur opposition se situait en effet à l’intérieur du consensus sioniste. Ils adhéraient totalement à l’idée de créer un État juif et, pour en consolider l’assise, ils n’étaient pas hostiles à certaines mesures qui furent adoptées dans l’immédiat après-guerre, comme le refus du rapatriement des réfugiés palestiniens ou la destruction des villages abandonnés afin d’empêcher leur retour. Leur divergence avec les tenants de la ligne activiste venait de leur volonté de favoriser au maximum l’intégration socio-politique des Arabes présents sur le territoire israélien (d’où leur souhait de supprimer le gouvernement militaire ou leur désir de voir les Arabes admis comme membres du syndicat Histadrout — ce sera chose faite en 1965). Cette aspiration à hâter l’insertion des Arabes dans la société israélienne n’était toutefois pas uniquement contrariée par l’intransigeance de Ben Gourion et de ses alliés, elle était aussi entravée par la nature bicéphale de l’État comme État juif et démocratique. 2. LES CONTRADICTIONS ENTRE DÉMOCRATIE ET ETHNICITÉ La loi de 1952 qui fixe les conditions d’octroi de la citoyenneté israélienne établit une distinction majeure entre l’acquisition Si l’assignation d’identité ethnique revêt une pareille importance, c’est parce qu’elle confère des droits non négligeables. Outre l’obtention automatique de la citoyenneté, le nouvel immigrant en vertu de la Loi du retour[5] bénéficie lors des premières années de son installation de larges exemptions fiscales et d’emprunts à taux préférentiel. Une partie de ces aides est versée, non par l’État, mais par l’Agence juive, organe dépendant d’une institution internationale, l’Organisation sioniste mondiale, dont la vocation est de faciliter l’immigration des Juifs de diaspora. De façon significative, l’Agence juive est désignée, avec deux autres organisations internationales (le Keren Hayessod qui collecte les fonds dans la diaspora juive et le Fonds national juif chargé de l’achat des terres), comme « institution nationale », cette expression désignant une institution ayant vocation à servir les seuls intérêts des Juifs en Israël. L’Agence juive ne se contente pas de fournir des aides multiformes aux nouveaux immigrants. Elle crée des villages pour les Juifs, paye le raccordement aux réseaux électrique et de l’eau, encourage le développement de l’agriculture et de l’industrie. Si on peut considérer comme normal que l’Agence juive, dont les fonds proviennent des contributions volontaires des Juifs de diaspora, s’emploie à améliorer le sort des seuls Juifs, il est clair toutefois que cette intervention unilatérale, effectuée dans le cadre d’une convention avec de l’État, accroît les disparités avec les 850 000 citoyens arabes. De plus, par l’entremise de ces institutions nationales — organisations volontaires financées par la diaspora –, l’État bénéficie d’un moyen idéal de privilégier les Juifs tout en ne violant pas officiellement l’égalité entre les citoyens puisqu’il n’intervient pas directement. Ainsi en est-il avec le Fonds national juif qui gère 19 % des terres en Israël, en particulier, fait significatif, les « terres abandonnées » — appartenant aux Arabes ayant fui la Palestine ou déclarés « absents ». Ces terres sont régies par un rigoureux principe d’incessibilité : non seulement ces terres, « propriété perpétuelle du peuple juif » ne sauraient être vendues à un particulier, mais elles ne peuvent même pas être louées à un non-Juif, fût-il citoyen de l’État d’Israël (Dieckhoff, 1995). Le fonctionnement des « institutions nationales » donne une bonne indication de la façon dont s’opère une discrimination insidieuse. Rarement explicite, la discrimination structurelle dont sont victimes les Arabes est la plupart du temps indirecte et voilée (Kretzmer, 1990). Ainsi, jusqu’en 1997, les familles juives percevaient des allocations familiales proportionnellement plus élevées par enfant que les familles arabes. Le critère choisi n’était pas explicitement ethnique, il était simplement précisé que les « familles de soldats » obtenaient des compléments d’allocations. Or, étant donné que les Arabes ne sont pas appelés sous les drapeaux, ils se voyaient ipso facto exclus du bénéfice de ces aides. Sans doute, la logique ethnique n’est pas totale : les Druzes et les Circassiens, les deux seules communautés non-juives à devoir envoyer leurs enfants à l’armée, ainsi que les volontaires bédouins, obtenaient aussi ces allocations supplémentaires. Mais le référent ethnique est bien sous-jacent. La preuve en est fournie par le sort réservé aux Juifs ultra-orthodoxes. N’effectuant pas leur service militaire, ils auraient dû théoriquement être privés de cette manne. En fait, ils la reçurent. D’abord, parce qu’ils furent traités de facto par l’État comme d’anciens conscrits puis, par la suite, parce que les étudiants des institutions religieuses obtinrent les mêmes avantages que les anciens militaires. Cette discrimination dissimulée se retrouve dans les pratiques d’aménagement du territoire, de distribution des aides Ce florilège qui pourrait être rallongé montre que l’existence d’une citoyenneté partagée ne constitue pas une garantie quant au traitement égalitaire des citoyens. En cela, la « citoyenneté à l’israélienne » rompt clairement avec le principe majeur de la citoyenneté démocratique qui consiste à octroyer « un statut juridique conférant des droits et des obligations vis-à-vis de la collectivité politique » (Leca, 1983) aux citoyens sans tenir compte de leurs appartenances particulières. En l’occurence, la logique ethnique permet d’accorder, dans certains domaines, un traitement préférentiel au groupe majoritaire, « propriétaire » de l’État, et de contourner ainsi la logique citoyenne à fondement égalitaire. Ce favoritisme institutionnalisé ne doit pas être confondu avec les politiques d’affirmative action. Alors que ces dernières ont pour objectif de permettre à des groupes ethniques minoritaires et défavorisés d’accéder à une réelle égalité en leur octroyant des facilités diverses et en leur permettant de se prévaloir de droits spécifiques, les avantages dont bénéficient la majorité juive en Israël ont pour objectif de maintenir sa suprématie, non de la résorber. En aménageant une place privilégiée au groupe ethno-national juif tout en octroyant la citoyenneté sur une base inclusive, Israël apparaît comme une démocratie d’un genre spécifique que Sammy Smooha a proposé d’appeler « démocratie ethnique » (Smooha, 1990). Cette qualification correspond bien à la nature duelle de l’État d’Israël où la souveraineté politique appartient à l’ensemble des citoyens (Juifs et Arabes) mais où l’État appartient, non à une nation israélienne — qui regrouperait tous les citoyens israéliens –, mais à la nation juive. Un tel alliage fait des démocraties ethniques des ensembles politiques traversés par des contradictions récurrentes entre égalité citoyenne formelle et prépondérance du groupe ethno-national associé à l’État [6]. En fait, si l’asymétrie entre la majorité et les minorités peut se réduire, la persistance du référent ethnique maintient une différenciation structurelle entre citoyens qui empêche la pleine égalité de se réaliser. Ce constat se vérifie bien dans le cas israélien où l’égalisation juridique des conditions entre individus juifs et arabes a progressé au cours des dernières décennies sans pour autant que le système asymétrique n’ait été fondamentalement remis en cause dans sa structure profonde. 3. AVANCÉES DÉMOCRATIQUES, PERMANENCE DE L’ETHNICITÉ Cette oscillation est repérable dans les trois champs de la citoyenneté isolés par T.H. Marshall (1977) en ce qui concerne la minorité arabe en Israël. Dans le domaine des droits civils, la tendance globale a été à une égalisation des conditions entre Juifs et Arabes depuis l’abolition définitive du gouvernement militaire en 1966. Les libertés publiques (de déplacement, d’expression, d’organisation etc.) sont respectées et garanties par les tribunaux. Les Arabes sont désormais membres à part entière du syndicat Histadrout dont le département arabe a été supprimé en 1992. À la même date, le poste de conseiller aux affaires arabes, rattaché au Premier ministre, qui fleurait un peu trop le paternalisme colonial, a été supprimé [7]. La pratique religieuse est libre, l’État versant même des salaires aux ministres des cultes et distribuant des fonds publics pour l’entretien des églises et mosquées. Les différentes communautés religieuses bénéficient d’une très large autonomie et d’une compétence de juridiction exclusive en matière de statut personnel (mariage, divorce). Remarquons que la reconnaissance de droits de nature communautaire est parfaitement en consonnance avec la nature sioniste de l’État : si l’État d’Israël est celui d’un groupe national particulier (celui des Juifs), il est naturel que les minorités ethno-nationales qui, par définition, ne pourront jamais s’y identifier totalement bénéficient de droits religieux et culturels collectifs qui leur permettront de préserver leur identité spécifique. Une différence notable subsiste néanmoins dans le maintien de l’ordre public : la répression policière a tendance à être plus vigoureuse lorsqu’il s’agit de mettre un terme aux manifestations dans le secteur arabe. Le 30 mars 1976, une protestation contre la confiscation des terres en Galilée s’acheva tragiquement par la mort de six Arabes lors d’échauffourées avec les forces de l’ordre. De telles extrémités ne se sont plus de mise aujourd’hui. Néanmoins, en tirant, fin septembre 1998, des balles en caoutchouc pour disperser une marche de protestation arabe, alors que ce type de projectile n’a jamais été utilisé à ma connaissance contre des manifestants juifs mais a été par contre abondamment employé contre les Palestiniens pendant l’Intifada, la police soulignait, fût-ce involontairement, que les Arabes n’étaient pas traités avec le même égard que leurs concitoyens juifs [8]. Dans le domaine de la citoyenneté politique, si le droit de vote a été accordé dès le départ aux Arabes, l’expression politique a été, elle, fortement bridée durant les deux premières décennies puisque, sous couvert d’impératifs de sécurité, des formations politiques ont été interdites tandis que des publications voyaient leur parution suspendue. Dans les années 1970, ces restrictions avaient disparu tandis que l’intégration politique des Arabes avait progressé : à compter de 1973 les citoyens arabes purent ainsi adhérer au Parti travailliste qui, jusqu’alors, n’accueillait que des Juifs. Une citoyenneté authentique ne se limite toutefois pas au droit de participer aux processus électifs et aux organisations politiques, elle passe aussi par des possibilités réelles de prendre part à l’exercice du pouvoir politique. Or, sur ce plan, il reste un chemin considérable à parcourir. Si, dans le cadre municipal, maires et conseillers sont nombreux dans les localités arabes, au niveau de l’État, la présence arabe est extrêmement modeste. Le constat amer du romancier David Grossman est sans appel : « il n’y jamais eu un ministre arabe dans le cabinet israélien […] en 1989, sur les 1 310 postes de hauts fonctionnaires au gouvernement et dans ses organismes associés, seulement 17 étaient occupés par des Arabes […] parmi les médecins employés par la caisse de maladie, 2 % étaient arabes » (Grossman, 1993, p. 140). Si des représentants de partis arabes siègent à la Knesset, ils ne furent inclus qu’une seule fois, entre 1992 et 1996, dans une majorité parlementaire, celle qui soutint le gouvernement Rabin. Ce fut d’ailleurs une raison suffisante pour que la droite nationaliste représentée par le Likoud dénonce sans relâche un gouvernement « privé de majorité juive » (puisque sa survie parlementaire dépendait de l’appui de cinq députés « arabes [9] »). La règle démocratique qui veut que tous les parlementaires soient des représentants égaux de la nation se trouve ici contestée par l’ethnicité et une distinction est, de fait, introduite entre la communauté politique légale (regroupant tous les citoyens) et la communauté politique légitime (restreinte aux Juifs). Cette différenciation est la conséquence de la dualité structurelle de l’État d’Israël comme État juif et démocratique qui instaure deux espaces référentiels concurrents, celui de l’appartenance ethno-nationale et celui de la citoyenneté. La judéité de l’État qui a une véritable valeur constitutionnelle [10] pourrait d’ailleurs, en principe, entraver la liberté politique en milieu arabe. En effet, si un parti se présentait au suffrage des électeurs en exigeant explicitement la désionisation de l’État (ce qui passerait, par exemple, par l’abrogation de la Loi du retour), il serait disqualifié. Il en serait de même s’il réclamait la transformation d’Israël en État binational, judéo-arabe. Pour l’heure, les « ambiguïtés constructives » des partis arabes comme l’interprétation souple des dispositions légales par la Cour suprême ont évité les disqualifications intempestives, mais le risque de voir le jeu démocratique contrecarré en invoquant l’atteinte au caractère juif de l’État demeure. Restent les droits sociaux (à la santé, à l’éducation etc.). Là aussi la tendance est allée au fil du temps vers un rapprochement des droits entre citoyens juifs et arabes. Ainsi, comme nous l’avons dit, les allocations sociales complémentaires ne sont plus réservées, depuis 1997, aux familles de soldats. Le gouvernement a aussi renoncé il y a quelques années à utiliser le critère du service militaire pour instaurer des droits universitaires différents. Toutefois, ces avancées réelles ne doivent pas masquer la persistance d’inégalités réelles. Ainsi, dans le domaine éducatif, le système scolaire juif continue de bénéficier de ressources budgétaires bien plus importantes que les écoles arabes, ce qui maintient une différence qualitative persistante (Al-Haj, 1995). En ce qui concerne les aides sociales, elles ne sont pas distribuées de façon égale parmi la population, les autorités publiques ayant la fâcheuse habitude de mettre en oeuvre de façon imparfaite les dispositions sociales dans le secteur arabe (Haidar, 1991). Autrement dit, elles ne mettent pas systématiquement en oeuvre une autorité « légale-rationnelle » pour traiter de façon impersonnelle les administrés en fonction de règles de nature universelle ; leur action est souvent guidée par des motivations affectives qui les amènent à agir prioritairement au profit du groupe juif. Enfin, pour l’accès à l’emploi, les citoyens arabes sont clairement défavorisés dans les domaines réputés « sensibles » comme l’aéronautique et l’électronique. Ces secteurs d’activité, très liés à l’industrie d’armement, leur sont très largement fermés, les emplois étant réservés aux citoyens ayant rempli leurs obligations militaires. L’existence d’une discrimination institutionnelle est rarement niée frontalement, mais elle est souvent rationnalisée par le recours à un argument qui en dit long sur l’aporie de la citoyenneté en Israël. Ainsi, il est incontestable que, globalement, le niveau éducatif des Arabes se soit amélioré depuis un demi-siècle permettant la formation d’une intelligentsia dynamique et active. Il est vrai aussi que le taux de scolarisation des Arabes en Israël est bien meilleur que celui de leurs « frères » en Jordanie ou en Égypte. Certains jugent dès lors que les Arabes ont largement bénéficié de la modernisation socio-économique (Landau, 1993) qui a accompagné leur insertion dans la société israélienne comparativement à ceux qui ont vécu au sein des États arabes voisins, et que les pratiques discriminatoires actuelles ne sont que des phénomènes marginaux. Un tel constat est irrecevable dans la mesure où, dans la logique de la citoyenneté démocratique, les seules comparaisons pertinentes sont celles qui sont effectuées entre membres du même corps politique : il convient donc d’évaluer la situation des Arabes israéliens par rapport à leurs concitoyens juifs, non par rapport à leur « parentèle ethnique » au-delà des frontières. Que ce type de comparaison soit pourtant ainsi fait spontanément, dans l’opinion publique juive en Israël, montre la prégnance du référent ethno-culturel et les déficiences dans l’appréhension de la citoyenneté. Que cette idée de citoyenneté demeure dans le fond incertaine et, partant relativisée, tient encore une fois à la nature même de l’État d’Israël comme État du peuple juif. Cette définition implique en effet que l’État est celui d’une collectivité transnationale dont seulement un tiers des membres sont des citoyens israéliens, les deux autres tiers demeurant en diaspora. Autrement dit, Israël est l’État des Juifs qui y ont immigré (citoyens effectifs) et, virtuellement, celui des Juifs de diaspora qui, bien que possédant déjà la citoyenneté des pays où ils résident, sont autant de citoyens potentiels de l’État. A contrario, l’État d’Israël n’est pas juridiquement l’État de ses citoyens arabes. Lors des débats sur l’amendement à la Loi fondamentale en 1985, la proposition de définir Israël « comme l’État du peuple juif et de ses citoyens arabes » a été clairement rejetée par le Parlement. Dans un tel contexte où l’État « appartient » tout à la fois à certains qui n’en sont pas citoyens tandis que d’autres qui bénéficient des droits de citoyenneté demeurent irrémédiablement extérieurs à cet État (dont ils doivent pourtant reconnaître la légitimité et scrupuleusement respecter les lois), la notion de citoyenneté, comme statut juridique uniforme conférant des droits et des devoirs et instituant une communauté politique d’égaux sur une base territoriale, devient nécessairement floue. Cette citoyenneté insaisissable découle de la dualité structurelle de l’État d’Israël, laquelle n’est pas, contrairement à l’affirmation du président de la Cour Suprême, exempte de tensions. Meir Shamgar, qui était alors à la tête de la plus haute institution judiciaire israélienne, avait dans un arrêt fameux affirmé que « l’existence de l’État d’Israël comme État du peuple juif ne met pas en cause sa nature démocratique, de même que la francité de la France ne remet pas en question sa nature démocratique » (Neiman, 1988, p. 189). L’analogie est malencontreuse dans la mesure où judéité et francité n’ont pas du tout le même statut : la première a une véritable force légale qui influe profondément sur l’organisation de l’État et entraîne toute une série de conséquences juridiques dans la distribution des droits ; la seconde constitue simplement une réalité sociologique (langue partagée, legs historique commun etc.) qui n’a aucune implication quant à la place des individus à l’intérieur de la société. Alors que dans une démocratie républicaine comme la France, la francité est purement descriptive, dans une démocratie ethnique, la judéité est éminemment normative (Dieckhoff, 1999). Par conséquent, alors que dans le cas français la démocratie fonctionne en étant aveugle aux appartenances ethno-culturelles particulières (du moins d’un point de vue légal), dans le cas israélien, les principes démocratiques butent constamment sur la logique ethnique. Ces tensions ne sont pas près de disparaître dans la mesure où la « dé-ethnicisation » de l’État d’Israël, c’est-à-dire sa transformation en État de ses citoyens, n’est pas pour demain. Cette demande avancée par certains hommes politiques arabes et l’extrême-gauche juive n’a, à l’heure actuelle, aucune chance d’être honorée parce que l’écrasante majorité de la population juive est attachée à la spécificité juive de l’État. Même l’évolution d’Israël vers une démocratie consociationnelle où l’État central gèrerait, de façon impartiale, un authentique pluralisme culturel tout en aménageant une place plus grande aux droits individuels, paraît fort problématique. Une récente enquête a montré que seuls 8,1 % des Juifs souhaitent la mise en place d’une démocratie consociationnelle où un État neutre traiterait les Arabes comme un groupe national, à parité avec les Juifs. Par contre, 71,5 % des personnes interrogées sont favorables à une démocratie ethnique améliorée, l’État conservant sa spécificité juive tandis que les Arabes bénéficieraient, en plus d’une meilleure protection de leurs droits individuels, d’une autonomie plus large (éducative, religieuse, culturelle). Cette option est celle qui correspond aux évolutions perceptibles au cours de la dernière décennie. D’un côté, l’État a procédé à des ajustements pour que les droits (civils, politiques, sociaux) des Arabes soient davantage alignés sur ceux des Juifs et pour que les discriminations les plus criantes soient révoquées. D’un autre côté, le système de traitement préférentiel n’a pas été été remis en cause dans son économie générale. Rééquilibrage de la citoyenneté donc, avec maintien de l’asymétrie structurelle : ce double mouvement continuera de rythmer l’État d’Israël dans les années à venir. AL-HAJ, Majid (1995), Education, Empowerment and Control : The Case of the Arabs in Israel , Albany, State University of New York. CATANE, Moshé (1972), Qui est juif?, Paris, Robert Laffont. DAHL, Robert (1971), Polyarchy, Participation and Observation , New Haven, Yale University Press. DIECKHOFF, Alain (1999), « L’ethno-démocratie israélienne », in Christophe JAFFELOT, Démocraties d’ailleurs. Démocraties et démocratisations hors d’Occident , Paris, Karthala, à paraître. 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Nokhehim nifkadim (Présents-absents), tel est d’ailleurs le titre original du livre du romancier israélien David GROSSMAN dans lequel il a rassemblé les témoignages de ses rencontres avec les Palestiniens d’Israël. Traduit en anglais dans GROSSMAN (1993). 2. Le sort de ces résidents privés de la citoyenneté israélienne ne sera définitivement réglé qu’en 1980, date à laquelle ils devinrent des nationaux israéliens. 3. Deux autres modes d’acquisition de la citoyenneté méritent d’être évoqués brièvement. Le premier qui a gagné en importance au fur et à mesure que l’État d’Israël se consolidait est l’acquisition par la naissance : tout enfant né d’un père ou d’une mère israélien sera Israélien. Cette règle s’applique pour les naissances en Israël mais aussi à l’étranger : le jus sanguinis joue ici à plein. À l’inverse, le jus soli n’intervient que de façon très marginale à travers l’autre modalité d’octroi de la citoyenneté, la naturalisation. Cette procédure complexe, qui concerne un nombre limité de non-Juifs soucieux d’obtenir la citoyenneté, suppose une période de résidence minimale mais comporte surtout deux conditions extrêmement révélatrices : la connaissance de la langue hébraïque et la renonciation à la nationalité antérieure. En outre, le requérant est tenu de signer une déclaration de loyauté envers l’État d’Israël. Ces dispositions précises et strictes contrastent fortement avec la libéralité avec laquelle la citoyenneté est accordée par la voie du retour. Dans ce cas, la double nationalité est parfaitement tolérée et l’ignorance totale de l’hébreu ne constitue pas un obstacle à l’acquisition de la citoyenneté. Quant à la fidélité à l’État, elle est comme contenue implicitement dans l’acte d’immigration lui-même. 4. Dans les cas, de plus en plus fréquents, de personnes dont seul le père est juif, elles sont enregistrées sous leur « nationalité de passeport » : russe, française, canadienne etc. La nationalité, au sens de l’appartenance officielle à un État donné, se transforme donc pour eux en nationalité au sens ethnique. Les intéressés ont également la possibilité de laisser cette rubrique en blanc, ce qui signifie que leur nationalité est indéterminée. 5. En 1970, le droit au retour a été élargi à certains proches non-juifs d’un Juif : le conjoint, les enfants et leurs conjoints, les petits-enfants et leurs conjoints. Cette disposition introduite pour préserver l’unité de familles « mixtes », confère à leurs bénéficiaires les mêmes droits que les Juifs (y compris l’octroi de la citoyenneté). Cet amendement, incontestablement libéral, ne fait pourtant que souligner davantage la dimension ethnique puisque le critère retenu est celui de la parenté avec un Juif (jusqu’à la seconde génération), non celui de l’appartenance religieuse. Est à l’oeuvre ici un principe d’ethnicité « étendue ». 6. Nombre d’États d’Europe de l’Est sont des « démocraties ethniques » où l’État est fondé sur une nation principale. Ainsi, la Macédoine se définit-elle constitutionnellement comme « État national du peuple macédonien », lequel entend assurer la cohabitation avec « les Albanais, Turcs, Roms et autres nationalités qui y vivent ». La Croatie a adopté une définition plus généreuse en se présentant à la fois comme « État national du peuple croate » et « État des membres des autres nationalités et minorités qui en sont les citoyens ». 7. On peut néanmoins se demander si la Section des minorités qui a pris le relais du Bureau des affaires arabes ne s’inscrit pas dans la même logique de monitoring de la population arabe. 8. Cette manifestation à Umm el-Fahm, deuxième ville arabe d’Israël, avait pour origine l’expropriation de plusieurs dizaines d’hectares au profit de l’armée. Cet épisode montre que la question de la terre demeure, pour les Arabes d’Israël, extrêmement sensible, et cela d’autant plus qu’ils ne disposent plus, en pleine propriété privée, que de 3,5 % de la surface du pays (contre un tiers en 1948). 9. Les députés dont les voix sont ainsi récusées ne sont pas nécessairement tous ethniquement arabes (bien que quatre d’entre eux le soient) mais ils doivent leurs suffrages à l’électorat arabe. 10. Un amendement introduit en 1985 dans la Loi fondamentale sur la Knesset précise que ne peuvent participer aux élections les partis qui nient l’existence de l’État d’Israël comme État du peuple juif, rejettent la nature démocratique de l’État ou encouragent le racisme.
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le 10/11/2006 17:50:00 (1402 lectures) |
Contribution d’Ali Huwaydi à l’occasion de la Rencontre élargie palestinienne. A. Huwaydi est le représentant du centre palestinien al-Awda, au Liban. La rencontre a été organisée par l’organisation palestinienne des droits de l’homme « Huquq », en collaboration avec l’institution palestinienne des droits de l’homme « Shahed », et l’Union générale des Juristes palestiniens au Liban, à Beirut, du 30 septembre au 3 octobre 2005. Cet contribution a pour objectif central de démontrer que la question du retour des réfugiés palestiniens est une question politique centrale et que le droit au retour est un droit collectif inaliénable pour le peuple palestinien. Ali Huwaydi montre en effet que l’autodétermination palestinienne n’aurait aucun sens si l’on privait le peuple palestinien de son droit le plus élémentaire a savoir de recouvrer ses terres et de vivre uni sur son territoire. L’auteur insiste aussi sur le fait que le droit international reconnaît pleinement que le droit au retour d’une population sur son territoire est un droit fondamental en détaillant les différentes conventions internationales et résolutions de l’ONU. Il montre enfin que ce droit est sans cesse bafoué par Israël dans les différents « plans de paix » proposés par la volonté d’implantation des palestiniens à l’extérieur de la palestine. Ainsi, les dirigeants palestiniens seront responsables devant leur peuple et devant l’histoire s’ils transigent avec ce principe du retour de tous les palestiniens sur la terre de Palestine. SOMMAIRE 1. Les Nations-Unies et le double standard La question des réfugiés palestiniens et celle du droit au retour sont les questions politiques les plus importantes posées en vue d’un règlement , car elles reflètent le fondement et l’avenir du conflit dans la région, depuis et avant même la Nakba de 1948, dans leurs deux dimensions, démographique et géographique. L’occupant israélien a commencé à mesurer la réalité du droit au retour en tant qu’élément essentiel dans l’équation du conflit, c’est pourquoi il n’a pas cessé de vider ce droit de son contenu en proposant divers projets et plans politiques, depuis la création de l’entité israélienne jusqu’à présent. Le premier ministre des affaires étrangères Moshe Sharett avait décrit l’expulsion des Arabes de Palestine comme étant « l’événement le plus important dans l’histoire contemporaine de la Palestine et beaucoup plus excitant que la création de l’Etat Juif » (lettre de M. Sharett à Nahum Goldman juin 1948). Les gouvernements successifs israéliens essaient de tourner la page des réfugiés à tout jamais. Le gouvernement Sharon a même publiquement appelé à exécuter des politiques d’implantation des réfugiés dans les lieux où ils se trouvent, avec des aides internationales et arabes. Le 5ème congrès d’Herzelia, qui s’est tenu entre le 14 et le 16 décembre 2004, fut le point culminant de l’attaque israélienne contre le droit au retour, demandant clairement l’implantation des réfugiés avant le règlement de la question palestinienne, la posant comme condition pour parvenir à un règlement avec l’Autorité palestinienne. Silvan Shalom a même déclaré devant le congrès : « le fondement essentiel pour instaurer la confiance a été et reste la revendication des Palestiniens du droit au retour et l’utilisation du terrorisme. C’est pourquoi nous devons agir pour supprimer ce fondement représenté par les prétentions palestiniennes au retour. Pour ce faire, il faut agir par le biais des paroles et actions palestiniennes, que les Palestiniens disent qu’ils ont l’intention de remettre en état les camps de réfugiés dans les lieux où ils se trouvent actuellement, et le monde entier doit participer à cela. Les efforts pour réhabiliter les camps de réfugiés palestiniens ont une grande utilité, pour les Palestiniens, pour nous et pour le monde « . Il a ainsi confirmé le vrai objectif d’Israël concernant le règlement voulu, en tournant la page des réfugiés, en disant : « Il est nécessaire que les Palestiniens disent clairement que leurs ambitions nationales n’incluent pas le retour des réfugiés aux alentours d’Israël « . Mais ce n’est pas tout. Sharon a montré sa satisfaction vis-à-vis de son accord avec les Etats-Unis concernant l’annulation du droit au retour des réfugiés palestiniens aux frontières de 48, et a affirmé, après le retrait de la bande de Gaza « il n’y aura pas d’autres désengagements unilatéraux, ni négociations sur Jérusalem ni sur le retour des réfugiés » au moment où Netanyahu demandait que se déploie « l’effort pour démanteler les camps de réfugiés et éloigner la violence de cette société « . Pour Netanyahu, l’attachement des Palestiniens au droit au retour et leur insistance à le faire appliquer est considéré terrorisme et violence. Aux côtés de ces positions publiques de l’entité israélienne en vue de mettre en avant l’idée d’implantation des Palestiniens, nous avons également les déclarations du directeur général du ministère israélien des affaires étrangères, Ron B., à la radio de l’armée israélienne le 15 décembre 2004, disant que son ministère prépare un plan pour implanter les réfugiés palestiniens en Cisjordanie, la bande de Gaza, la Syrie et le Liban. La communauté internationale financerait l’amélioration de la situation des réfugiés palestiniens, dans la bande de Gaza, au début, et ensuite en Cisjordanie, puis en Syrie et au Liban. Le ministère israélien des affaires étrangères, Silvan Shalom, s’est dirigé récemment vers les pays donateurs et la Banque Mondiale pour réclamer le financement du plan israélien. Ce plan exigerait que des Etats dans le monde intègrent sur leurs sols des réfugiés palestiniens ! 1. Les Nations-Unies et le double standard Si le droit international est constitué d’un ensemble de principes et de valeurs que la plupart des Etats du monde ont reconnu et signé, voyant dans ces principes un moyen de préserver les droits et de les remettre aux principaux concernés, et d’organiser les relations entre Etats, la communauté internationale a, malheureusement, agi avec ces lois en se soumettant aux rapports de force, à la domination et aux intérêts, en ce qui concerne la question palestinienne. Si nous entendons par légalité internationale la manière d’appliquer le droit international par les appareils des Nations-Unies, celles-ci ont appliqué les lois internationales relatives à la question palestinienne en s’alignant totalement du côté de l’occupant israélien agresseur. Après que les Etats-Unis aient dominé unilatéralement l’institution internationale, les Nations-Unies ont utilisé, sous couvert de légalité internationale, des moyens qui furent des violations flagrantes du droit international. C’est pourquoi il est nécessaire de s’entendre sur le fait que le droit international est une chose et l’application de ce droit une autre, totalement différente, c’est ce qui est clair et évident pour la question palestinienne de manière générale et la question des réfugiés et du droit au retour plus particulièrement. C’est pourquoi il est nécessaire pour le monde qui traite les questions internationales selon différents critères, d’avoir une attitude ferme en ce qui concerne le droit au retour des réfugiés palestiniens. L’accord de paix de Dayton pour l’ancienne Yougoslavie a reconnu le droit au retour des victimes du nettoyage ethnique, et il en est de même pour le Timor-oriental, le Guatémala, le Mozambique et d’autres. Le Haut-Commissariat aux affaires des réfugiés a déclaré au début de 1996 que « près de neuf millions de réfugiés ont pu retourner à leurs pays au cours des cinq dernières années, et que 1,2 millions de réfugiés sont retournés chez eux entre 1985 et 1995, soit au cours de dix ans, plus de 10,2 millions de réfugiés sont retournés dans leurs pays ». Par conséquent, le peuple palestinien a le droit d’accepter ou de refuser toute résolution ou loi, en fonction des principes et des critères qui servent ses intérêts, ce qui veut dire que le peuple palestinien n’est pas obligé d’accepter une décision qui ne prend pas en compte tous ses droits à sa patrie. Nous comprenons et savons parfaitement que la résolution historique de la question palestinienne réside dans tous ces lieux épars de réfugiés. Ce qui est en cause, c’est l’application de la justice, qui exige le retour de tous les Palestiniens à leurs propriétés et leurs maisons en Palestine, et non ailleurs. 2. Le droit au retour et l’autodétermination Les nombreuses contributions aux jugements de la Cour Internationale de justice considèrent que le droit à l’autodétermination fait partie des règles régissant le droit international, de telle sorte qu’il n’est pas autorisé à mettre des freins à ce droit ou de refuser sa confirmation, ou d’agir de façon à empêcher son exécution. Ainsi, le droit du peuple palestinien au retour n’est pas seulement devenu un droit ne pouvant pas être modifié mais un droit fondamental conditionnant le droit à l’autodétermination. Ce qui signifie que tout pouvoir palestinien, qu’il soit nommé ou élu, n’a pas le droit de modifier ce droit, en tant que droit collectif du peuple palestinien et en tant que nécessaire pour l’autodétermination. Car toute modification de ce droit peut priver les deux tiers du peuple palestinien d’exercer son droit à l’autodétermination, mais aussi le priver du retour, essentiellement. Pour cela, le droit au retour est confirmé par le droit international en tant que droit individuel à la base, comme l’indiquent l’article 13 de la déclaration internationale des droits de l’homme et l’article 12 de la déclaration internationale pour les droits politiques et civiques, et l’article 5 de l’accord contre la discrimination raciale. Tous ces articles affirment que « l’individu a le droit de partir vers un quelconque pays et de retourner à son pays, et il est interdit de priver, par la force, quiconque de retourner à son pays « . Le droit au retour est garanti par le droit à l’autodétermination, et c’est ce qu’ont reconnu les Nations-Unies en 1946 en tant que « principe » et « droit ». Ce n’est pas une décision politique ou un accord de bonne entente ou de règlement (Mahmoud Abbas, Conseil Palestinien aux relations extérieures, Gaza, 1998). 3. Droit au retour, sa nature, sa place et son ayant-droit Le droit au retour du peuple palestinien est un droit fondamentalement individuel, mais il a acquis une dimension collective parce qu’il est rattaché à la question d’un peuple dans son ensemble. Il est de nature civile et humaine, ce qui signifie qu’il inclut la réappropriation des propriétés, et il en est même temps de nature politique, ce qui signifie la réappropriation de la citoyenneté ou de la nationalité. Quant au lieu du retour, il n’y a aucune ambiguité ou doute à ce propos, ce qui signifie que le retour est en direction de la Palestine historique, ce qui signifie que le fils de Haïfa revient à Haïfa, le fils de Akka à Akka et le fils de Safad à Safad… Quant aux ayant-droits, Géraud de la Pradelle dit que le droit au retour fait de tout Palestinien un ayant-droit, et tout individu de ce groupe jouit de ce droit, individuellement, ce caractère individuel et civil inhérent à l’être humain lui permet en principe de résoudre une question importante qui est l’aptitude à hériter par suite de décès (R. Babadaji, Institut des Etudes Palestiniennes, Beirut, août 1996). L’entité israélienne a inventé en 1951 une loi mensongère de retour pour les juifs, apportant ensuite des non-juifs en Palestine. Le juif et le non-juif viennent de différents pays et s’installent dans nos maisons. Mais le retour auquel nous devons restés attachés, nous, les Palestiniens, est un droit que la légalité internationale a adopté et reconnu, et il n’est pas une invention. Le slogan « retour ou compensations » doit être absolument refusé et supprimé du dictionnaire palestinien. Les Palestiniens revendiquent le retour et les compensations. La compensation n’est pas le prix de la maison, la terre ou le champ, la compensation signifie toute la perte subie par le peuple palestinien n’ayant pas pu mettre à profit les ressources et les moyens de vie tout au long des années de l’exil. Le droit des Palestiniens au retour dans leur patrie, d’y vivre et d’y exercer leur souveraineté est le fondement. La recherche sur le droit à la compensation ne signifie pas une alternative au droit principal, mais il s’agit de montrer les aspects juridiques de ce droit. Le droit du peuple palestinien au retour à sa patrie ne s’évalue pas en monnaie, c’est une question qui n’est pas soumise au troc ou à l’échange, car la patrie et la souveraineté ne se vendent ni ne s’échangent. Rien que de penser à une solution uniquement monétaire pour résoudre la question des réfugiés, comme cela a été proposé un jour « que chaque réfugié palestinien reçoive 20.000 dollars en contrepartie de la reconnaissance par l’entité israélienne de sa reconnaissance morale » est en soi une insulte à la cause et à toutes les valeurs humaines. Sur cette base, il est impossible de chercher à résoudre la question des réfugiés sans rechercher la résolution de la question politique elle-même, qui fut la cause de ce problème. Le maintien et l’accentuation du problème des réfugiés sont le principal indicateur de la permanence et de l’accentuation du problème principal, ce qui pose les Nations-Unies, la communauté internationale, le monde arabe devant leurs responsabilités historiques pour remettre les choses à leur place, ce qui est le seul moyen pour trouver une solution radicale à la question des réfugiés palestiniens. « Ce droit (retour et compensations) a été cité et confirmé plusieurs fois, dans plusieurs résolutions internationales : 4ème convention de Genève, résolution 194 des Nations-Unies (11 décembre 1948), décision de partage 181 (29 novembre 1947), le droit de récupérer les biens et les fortunes garanti par les lois internationales » (S. Abd Rabboh, Centre d’informations alternatives, juin 1996). Mais « il convient de porter l’attention sur certains termes parus dans la résolution 194 du 11 décembre 1948 où il est mentionné « la nécessité de payer des compensations pour les propriétés pour ceux qui décident de ne pas revenir à leurs maisons, pour les pertes ou les dégâts des propriétés « . Concernant ce passage, le peuple palestinien doit refuser la compensation pour ceux qui décident de ne pas revenir, car ces propriétés sont un héritage, et l’individu n’a pas le droit de toucher le prix de ce qui a un caractère collectif (Sh. Abdel Aziz Badir, Politique Internationale, le Caire, octobre 1999). Par conséquent, le droit au retour et aux compensations ne doit pas être laissé comme une question pouvant être réglée entre l’individu palestinien et l’entité occupante, mais il est nécessaire qu’il soit assumé sur le plan international, tout comme les Palestiniens, en tant qu’entité politique, sont dans l’obligation d’adopter cette question, et après eux, les Arabes et tous ceux qui sont concernés. Si l’Autorité ou le gouvernement palestiniens négligent ou renoncent à cette charge, ils perdent immédiatement leur aptitude à représenter (le peuple palestinien). 5. Implantation et transfert Le projet Arezt demande de la Jordanie l’intégration (implantation) de 168.000 réfugiés d’ici 2005, en plus de la naturalisation des 1.182.000 réfugiés présents actuellement en Jordanie, à la Syrie 75.000 et le même chiffre au Liban, et 519.000 à l’Arabie Saoudite, au Kuweit, à l’Iraq et l’Egypte, auxquels s’ajoutent les 446.000 réfugiés présents dans les quatre derniers pays arabes. Le même projet demande l’implantation de 90.000 réfugiés dans les pays européens, les Etats-Unis et le Canada, en plus de ceux qui y sont déjà, tout comme il propose le retour de 75.000 réfugiés des pays arabes vers la Palestine occupée en 48 à condition « de prouver qu’ils ont habité la Palestine avant la Nakba ou qu’ils ont des proches qui y vivent et à ceux-là, il leur sera versé des compensations des caisses des Etats arabes en contrepartie des compensations réclamées par les Juifs ayant quitté les pays arabes après l’occupation israélienne de la Palestine « . Tout cela correspond entièrement à la position israélienne qui demande l’implantation et l’assimilation d’un nombre symbolique limité de réfugiés palestiniens à l’intérieur de l’entité israélienne, le refus de participer à tout financement de ce plan qui sollicite le financement des Etats occidentaux et des pays du Golfe. Pour les Palestiniens, un tel plan signifie encore plus de transfert et d’exil. L’appel le plus récent à l’implantation des réfugiés palestiniens a été émis par Sharon au début de l’année 2005 dans ses propositions à l’Union européenne. Il s’agit d’un plan semblable à celui d’Arezt, dans ses grandes lignes, pour « en finir avec le problème des réfugiés palestiniens de 48 « , par la construction de bâtiments durables dans les camps, en répartissant les réfugiés des camps dans des lieux divers à l’intérieur des pays où ils se trouvent actuellement, afin qu’ils soient assimilés dans les sociétés arabes. Le ministère israélien des affaires étrangères prépare une large offensive diplomatique pour amener les pays arabes et européens à exercer leurs pressions pour soutenir ce plan, qui exige une augmentation du budget de l’UNRWA pour 2005, en vue de la construction de bâtiments fixes et durables. 6. La crainte de la naturalisation En conséquence, toute tentative d’installer les Palestiniens peut réussir dans l’avenir, pour différentes raisons, que ce soit individuellement ou collectivement, mais cela n’annule pas pour autant le droit historique du Palestinien à retourner à sa maison, à son pays d’origine, et l’obtention de sa nationalité en Palestine. Tout comme le fait d’installer ou de naturaliser tout réfugié palestinien, ou ses enfants, dans n’importe quel bout de terre n’annule pas son droit au retour dans sa maison et sur sa terre en Palestine. Il doit y avoir unanimité palestinienne sur le fait que tout palestinien habitant dans tout lieu, quel que soit sa proximité de la Palestine, n’annule pas son droit au retour à son village et sa maison qu’il habitait avant 1948. Pour cela, dans le cas de la création d’un Etat palestinien, si le réfugié palestinien se déplace de tout pays arabe ou étranger vers cet Etat, et se met en place ce dont on parle ces temps-ci, l’installation des milliers de Palestiniens du Liban à Gaza… Selon la loi internationale, ce déplacement n’annule pas son droit au retour au pays d’où il a été expulsé en 1948 ou après, ni aux compensations. 7. La participation à l’autodétermination En conséquence des multiples justifications avancées par le négociateur palestinien, à chaque période, que ce soit des accords intérimaires, ou momentanés, ou à cause de la situation arabe, ou les conséquences de la guerre du Golfe, ou la domination unilatérale américaine sur le monde, et d’autres justifications… Des déclarations sont faites, des positions sont précisées, puis nous assistons à nouveau à des reculs avec de nouvelles justifications, pour finalement arriver à une situation grave, qui exige de nous une attitude ferme… Il est important que le peuple palestinien dise clairement et ouvertement sa position : 1 – le peuple palestinien est un, et indivisible, avec près de 9 millions d’individus il comprend également ceux qui vivent en exil et dans les terres de 48. La question palestinienne est une question de peuple et de terre, qui sont indissociables. 2 – Aucun Palestinien ne peut prétendre pouvoir, au nom du peuple palestinien, revenir sur les droits palestiniens. Personne ne peut ignorer l’opinion de deux tiers du peuple palestinien qui vit en exil. 3 – Tout négociateur, toute autorité ou tout gouvernement, et même toute génération, n’a pas le droit de modifier ni de remplacer les droits des réfugiés à leur patrie, et la création d’un Etat palestinien ne peut se faire au dépens du droit au retour, car la création d’un Etat est une chose, et le droit au retour une autre, et le principe de l’échange est refusé. 4 – Tout signataire d’un quelconque accord mettant en cause les droits du peuple palestinien au retour à sa patrie et à ses propriétés, dans le cadre de règlements politiques ou sécuritaires, quelle que soient les tentatives de lui donner un caractère collectif palestinien ou d’accord arabe, ou de pressions internationales, s’expose au jugement de l’histoire. 5 – Les institutions populaires palestiniennes et les institutions de la société civile palestinienne et arabe doivent surveiller, avec exactitude, toute mesure prise par l’Autorité palestinienne et adopter une position claire et nette vis-à-vis de cette mesure et agir au moment approprié. 6 – Le peuple palestinien a fait échouer des dizaines de projets d’implantation et cela n’est plus à prouver. Il a gardé ses spécificités en tant que partie de la patrie arabe, conservant sa cohésion sociale et ses liens familiaux. … Ali Huwaydi |
Article de Cecilia Toledo paru dans la revue « Le Marxisme Vivant » n°3, Mai 2001.
L’auteur est une journaliste brésilienne, membre du PSTU (Partido Socialista dos Trabalhadores Unificado).
Cet article est une véritable oeuvre de salubrité publique : C. Toledo nous présente ici une histoire du sionisme en s’attachant à remettre en cause tous les mythes fondateurs dont nous abreuve le propagande officielle.
Elle reprend le problème à la base et cherche à comprendre le sionisme et la « question juive » sans partir du point de vue religieux, mais en replaçant « le juif dans son rôle économique et social », suivant en cela K.Marx et A. Leon.
SOMMAIRE
1. Les juifs : un peuple-classe dans les sociétés précapitalistes
2. Le bundisme
3. La naissance du sionisme
4. Une région « vide »
5. La déclaration de Balfour (02/11/1917)
6. Le mandat Britannique (1918-1948)
7. Israël: la tragédie palestinienne
8. Vol, sans autre cérémonie, de la terre et des commerces des arabes
9. Racisme contre le travailleur arabe
10. Le sionisme, le fascisme et les juifs
11. Trahissant la Résistance
« C’était vers une terre sans peuple que lentement, vers la fin du siècle dernier, un peuple sans terre a commencé à se déplacer. » (1) Cette histoire, qui a été propagée tambour battant dans les têtes des peuples du monde entier depuis la fondation d’Israël en 1948, commence à s’émietter maintenant, et cela non seulement par l’activité des marxistes révolutionnaires mais aussi grâce aux israéliens eux-mêmes.
Tom Segev, un des historiens contemporains les plus remarquables d’Israël, a démontré récemment à quel point c’est faux, dans un interview à la Folha de S. Paulo. (2) Auteur du livre « 1949 – Les premiers israéliens », Segev se base sur le journal du père fondateur d’Israël, David Ben Gurion, qui y décrit sa politique pour forcer la sortie des arabes hors du pays nouvellement créé. Le livre, qui avant était répudié parce qu’il montrait que la version officielle à la mode était une fantaisie et que les arabes n’ont pas quitté Israël de bon gré mais ont été expulsé sans pitié, est maintenant adopté même dans les programmes scolaires.
Cette « reconnaissance » de la part de l’histoire officielle vient un peu tard, si on prend en considération que d’autres auteurs, surtout marxistes, avaient déjà raconté amplement la vraie histoire du sionisme et avaient dénoncé une des falsifications les plus spectaculaires de l’histoire jusqu’à ce jour. Une figure remarquable parmi ces historiens marxistes était Abraham Léon, tué dans les chambres à gaz d’Auschwitz quand il avait 26 ans et auteur d’un livre important, « La conception matérialiste de la question juive « . Un autre auteur remarquable est Ralph Shoenman qui a écrit « L’histoire cachée du sionisme « , un compte rendu minutieux et qui ne laisse pas d’espace pour le doute sur l’occupation juive de la Palestine.
Entre-temps, cette reconnaissance est une évidence supplémentaire qui prouve que la situation est tellement sérieuse et la poussée de l’Intifada tellement forte que même des historiens israéliens importants ont dû admettre que l’idéologie de « la terre sans peuple » était une pure invention et démentent le torrent de mensonges que les sionistes ont diffusé pendant des décades et qui ont créé des illusions parmi beaucoup de gens.
1. Les juifs : un peuple-classe dans les sociétés précapitalistes
Abraham Léon part de la proposition de Marx pour prouver que l’origine supposée du peuple juif a des causes matérielles et historiques, qui n’ont rien a voir avec Jéhovah ou une soi-disant « essence » raciale immuable, comme cela a été supposé, aussi bien par les anti-semites que par les sionistes. D’après Marx, pour comprendre la question juive, « il ne faut pas chercher le secret du juif dans sa religion, mais le secret de la religion dans le vrai juif. » (3) En partant du point de vue religieux, comme on fait habituellement, on n’explique pas la question juive. Pour la comprendre, il faut comprendre le juif dans son rôle économique et social.
Léon cherche les origines du peuple juif et arrive à la notion importante et riche de peuple-classe . Dans les sociétés précapitalistes , les juifs formaient une classe sociale, un peuple-classe (4), comme sont, par exemple, les Tsiganes. Les juifs représentaient les formes « pre-historiques » du capital, aussi bien dans le monde ancien que dans le monde féodal.
Dans le féodalisme , les transactions en argent ont eu lieu en marge du mode de production, étant donné que ces sociétés étaient productrices de valeurs d’usage et non d’échange. Comme c’était une activité marginale, elle a été exercée par des « étrangers », par des peuples-commerçants tels que les phéniciens, les juifs et les lombards. Ils étaient des peuples-classe qui, comme disait Marx, existaient dans les pores d’une société qui produisait des valeurs d’usage. Donc, les juifs sont la prorogation dans le temps d’une vielle classe mercantile et financière précapitaliste.
Sur ces relations matérielles des juifs c’est développée une superstructure institutionnelle et idéologique : des autorités communautaires, une religion « spéciale » et le mythe de se considérer comme les descendants des peuples hébreux originaux qui ont habité la Palestine au commencement de notre ère. Cette superstructure a aidé pour maintenir la cohésion du peuple-classe, mais en même temps elle a falsifié la vraie nature de leur existence . C’est le phénomène de la fausse conscience qui est commun dans toutes les idéologies. Et elle explique pourquoi il n’y a aucune unité raciale parmi les juifs.
Caché sous ce manteau idéologique-religieux, a eu lieu le phénomène de l’incorporation d’individus ou de groupes entiers dans ce peuple-classe. C’est ce qui explique qu’il y a eu des juifs de « race » mongole dans le Dagestan, des juifs noirs (les falasha) en Ethiopie, des juifs arabes dans l’Islan et des juifs d’origine slave en Europe de l’Est. Cela prouve que l’origine commune comme descendance d’Abraham ou des habitants de la Palestine au commencement de notre ère n’est qu’un mythe.
Avec le développement du capitalisme , la vieille classe commerciale juive pre-capitaliste a commencé à perdre les bases matérielles de son existence comme peuple-classe. En Europe occidentale, et surtout en Angleterre, les juifs ont commencé à s’assimiler naturellement. Mais avant que ce processus pût atteindre l’Europe orientale, avec un capitalisme moins évolué, a commencé l’époque impérialiste du capitalisme, de décadence générale dans le monde entier.
Les juifs de l’Europe de l’est comme de l’ouest ont dû affronter une situation dramatique. Quand la solution au problème juif a été vue dans les termes de la lutte pour le socialisme, le marxisme a commencé à exercer une attraction considérable sur les masses juives. Leur chemin était celui de la fusion avec la classe ouvrière dans la lutte contre le capitalisme, car pour les masses appauvries des juifs de Varsovie ou de Kiev, la trajectoire suivie par leur coreligionnaires plus fortunés de l’Angleterre ou de la France, d’une existence assimilée comme bourgeois dans le cadre du capitalisme, était déjà fermée.
En Russie , pendant que l’empire du Tsar encourageait les confrontations entre russes et polonais ou ukrainiens, ou entre ceux-ci et les juifs, et pendant que l’empire austro-hongrois faisait le même avec la mosaïque des nations qu’il gouvernait, les marxistes révolutionnaires appelaient à l’union de tous les travailleurs, quel que soit leur langue, nationalité ou « race », pour lutter contre ces régimes et contre toute la bourgeoisie impérialiste européenne. C’est pourquoi tant d’ouvriers, étudiants et intellectuels d’origine juive ont rejoint les rangs des socialistes et se sont assimilés avec les travailleurs de leurs pays.
Mais le vieux peuple-classe , sous les conditions du capitalisme moderne, est devenu de moins en moins homogène . Et ainsi, de la même façon, les familles riches telles que les Rothchild et autres millionnaires se sont liées aux bourgeoisies impérialistes des différents pays européens. Et, parmi les solutions bourgeoises pour la question juive posée par ces secteurs, la plus importante a été le sionisme . Une autre solution reformiste a été proposée par ceux qui son entrés dans l’histoire comme les bundistes .
Les bundistes étaient membres du Bund, l’Union générale des travailleurs juifs de la Lituanie, de Pologne et de Russie, fondé en 1897. Ils ont leur origine en Russie comme un secteur de la social-démocratie, au point qu’au début, le Bund faisait partie du Parti Ouvrier Social-Democrate Russe, mais lors de la scission, le Bund s’est aligné contre les Bolsheviks. (5)
La base sociale du Bund était constituée par des secteurs d’artisans, de semi-prolétaires ou d’ouvriers de petits ateliers, surtout dans l’industrie textile. C’était un ample secteur, avec un pied dans le vieux ghetto et l’autre dans le prolétariat industriel moderne.
Cela a eu sa répercussion dans l’idéologie du Bund qui, d’un côté, se revendiquait du marxisme révolutionnaire et, de l’autre côté, niait l’internationalisme en élevant des barrières entre les travailleurs de nationalité différente. Avec l’excuse de défendre la culture nationale, il a propagé que les travailleurs juifs devaient s’organiser séparément des travailleurs polonais, russes et autres. De cette façon, il a fait le jeu à la bourgeoisie , car il a divisé les travailleurs de chaque usine, de chaque ville, d’après leur origine nationale ou « raciale ».
Ce caractère contradictoire, reflet d’une contradiction réelle dans la base sociale, a fait que – malgré la capitulation au nationalisme bourgeois – le Bund n’a jamais proposé aux travailleurs juifs d’abandonner la lutte de la classe, ni de se joindre aux bourgeoisies juives pour aller coloniser la Palestine ou tout autre territoire. Ce sont les sionistes qui ont fait cela.
3. La naissance du sionisme (6)
C’est aussi en 1897, l’année pendant laquelle le Bund est apparu, que le Congrès de Fondation de l’Organisation Sioniste a eu lieu à Bâle (Suisse). La toile de fond sur laquelle a surgit le sionisme a été la capitalisation rapide de l’économie russe après la réforme de 1863, ce qui a rendu la situation des masses juive des petites villes insupportable. Dans l’occident, les classes moyennes, reléguées par la concentration capitaliste, commencent à se tourner contre l’élément juif dont la compétition a empiré leur situation. (7)
Dans ces circonstances est née en Russie l’association des Amants de Sion et apparaît un livre de Léon Pinsker, « L’auto-émancipation « , qui préconise le retour en Palestine comme la seule solution possible pour les juifs. Ensuite, un journaliste juif de Budapest, Theodor Herzl , écrit le livre « L’État Juif » qui – d’après Abraham Leon (8) – est considéré jusqu’à nos jours comme l’évangile sioniste.
En France, le Baron Rothchild, avec d’autres magnats juifs, s’oppose à l’immigration massive de juifs en Europe occidentale et commence à soutenir l’œuvre de la colonisation juive de la Palestine. « Encourager leur ‘frères moins fortunés’ à retourner à la terre de leurs ‘ancêtres’, c’est à dire, s’éloigner le plus possible, n’était en rien désagréable aux bourgeoisies juives occidentales qui craignaient à juste titre l’augmentation de l’antisémitisme » dit Léon. Ainsi, même si l’Organisation Sioniste se disputait la même clientèle sociale que le Bund et même le Socialisme Révolutionnaire, son caractère de classe était clairement différent: elle apparaissait comme le programme d’un secteur de la grande bourgeoisie juive qui finalement allait la dominer.
Au début, le sionisme apparaît comme une réaction de la petite bourgeoisie juive, fortement frappée par la vague d’antisémitisme, forcée d’abandonner un pays après l’autre, et qui essaye d’atteindre la Terre Promise coûte que coûte, pour se sauver de cette situation.
Entre-temps, le sionisme essaie de s’appuyer sur une explication religieuse pour justifier son existence. Dans l’année 70 de notre ère, les juifs auraient été expulsés de Jérusalem, occupée par les envahisseurs romains. Déjà dans la bible, Jérusalem était considéré la patrie des juifs, dont ils ont été expatriés : c’était la fameuse Diaspora qui aurait dispersé les juifs aux quatre coins du monde.
Revenons à Marx. Pour comprendre la question juive il faut partir des conditions matérielles de la vie du juif et pas de la religion, des rêves et des idéologies qui ont été créés au long de l’histoire. Selon A. Léon : « Alors que le sionisme est un produit de la dernière phase de capitalisme, c’est à dire, d’un capitalisme qui commence à tomber en décadence, il se vante d’une origine qui recule plus de deux mille ans dans le passé. Alors que le sionisme est une réaction contre la crise du judaïsme, produite par la combinaison de l’écroulement de la féodalité et de la décadence du capitalisme, il déclare être une réaction contre une situation qui existait depuis la chute de Jérusalem, en l’année 70 de l’ère chrétienne . »
Mais l’apparition même du mouvement sioniste est contraire à de telles prétentions. Comment peut-on croire que le remède pour un mal qui existe depuis deux mille ans est apparu à la fin du XIXième siècle ? Le sionisme trouve dans la chute de Jérusalem la racine de la dispersion, et par conséquent de tout le mal qui est arrivé aux juifs dans le passé, le présent et le futur. « La source des tribulations du peuple juif se trouve dans la perte de leur patrie historique et leur dispersion dans tous les pays , » déclare la délégation « marxiste » de Poalé-Sion au Comité hollandais-scandinave. (9)
Cette histoire des juifs, telle qu’elle est racontée par les sionistes, essaye de construire une origine pour justifier l’occupation de la Palestine. Ainsi, les juifs auraient refusé d’être assimilés après leur dispersion violente par les romains. Imprégnés de leur « cohésion nationale », d’un « sentiment éthique supérieur » et d’une « croyance indestructible en Dieu », ils auraient résisté à toutes les tentatives d’assimilation. C’est faux car, comme nous l’avons signalé plus haut, il y a eu d’innombrables cas d’assimilation (10). Mais d’après l’histoire racontée par les sionistes, cela ne s’est jamais passé : la seule espérance des juifs pendant ces années sombres – deux mille ans – était de revenir à l’ancienne patrie.
D’après A. Léon, le sionisme ne s’est jamais posé la question sérieusement. Pourquoi, demande-t-il, n’ont ils jamais essayé sérieusement de revenir pendant ces deux mille années ? Pourquoi fallait-il attendre jusqu’à la fin du XIXième siècle, que Herzl les convainque de ce besoin ? Pourquoi tous ses prédécesseurs ont été traités de faux Messies ? Pour répondre à ces questions incommodes, le sionisme a recours aux mythes. « Aussi longtemps que les masses croyaient qu’ils devaient attendre dans la Diaspora jusqu’à l’arrivée du Messie, il fallait souffrir en silence , » dit Zitlovsky. (11)
Mais, d’après Léon, cette explication n’explique rien du tout. « Il s’agit précisément de savoir pourquoi les masses juives croyaient qu’ils devaient attendre le Messie pour être capable de revenir à leur patrie . » Comme la religion est le réflexe idéologique des intérêts sociaux, depuis la fin du XIXième siècle elle a cessé d’être un obstacle à l’avance du sionisme et est devenu un écran de la fumée pour son expansion, utile pour masquer et justifier toutes ses misères.
Ces conceptions idéalistes du sionisme sont inséparables du dogme de l’antisémitisme éternel, c’est à dire, que de toute façon les juifs seront toujours persécutés. De cette manière, le sionisme transpose l’antisémitisme moderne à l’histoire entière, sans qu’il soit nécessaire de faire des recherches sur les diverses formes d’antisémitisme et de ses causes, et omettant le fait que dans différents périodes historiques, les juifs n’ont pas été les opprimés mais les oppresseurs, comme membres de la classe dominante.
« En réalité, cette idéologie sioniste, comme toute idéologie, n’est rien d’autre que le réflexe déformé des intérêts d’une classe. C’est l’idéologie de la petite bourgeoisie juive, opprimée par le féodalisme en ruines et le capitalisme en décadence, » synthétise A. Léon. Il met en valeur un fait correct, auquel la réfutation des rêves idéologiques du sionisme ne s’oppose évidemment pas : les vrais besoins de ceux qui l’ont fait naître. C’est l’antisémitisme moderne, et non le mythique antisémitisme « éternel », qui a le mieux agité en faveur du sionisme. La question fondamentale est donc de savoir dans quelle mesure le sionisme est capable de résoudre, non le « problème juif éternel », mais la question juive à l’époque de la décadence capitaliste.
Les défenseurs du sionisme le comparent aux autres mouvements nationaux . Mais le mouvement national de la bourgeoisie européenne est la conséquence du développement capitaliste. Il représente la volonté de la bourgeoisie de créer des bases nationales de production, d’abolir les restes de féodalité. Au XIXième siècle, dans les années où prospéraient les nationalismes, la bourgeoisie juive, loin d’être sioniste, était profondément en faveur de l’assimilation. Le processus économique qui a fait naître les nations modernes, a lancé les bases pour l’intégration de la bourgeoisie juive dans la nation bourgeoise. Ce n’est que quand le processus de formation des nations a atteint sa fin, quand les forces productives – enfermées dans les frontières nationales – cessent de se développer, que le processus d’expulser les juifs de la société capitaliste et l’antisémitisme moderne ont commencé.
L’élimination du judaïsme va de pair avec la décadence du capitalisme. Loin d’être le résultat du développement des forces productives, le sionisme est précisément la conséquence de leur paralysie totale, de la pétrification du capitalisme, dit A. Léon. Ainsi, alors que le mouvement nationaliste est le produit de la période montante du capitalisme, le sionisme est le fruit de l’époque impérialiste . La tragédie juive du XXième siècle est la conséquence directe de la décadence du capitalisme. (12)
A. Léon rappelle à juste titre que c’est là où se trouve l’obstacle principal pour la réalisation du sionisme, la clef pour comprendre la crise qui se vit en Palestine depuis la fondation de l’état d’Israël. « La décadence de capitalisme, base de la croissance du sionisme, est en même temps la cause de l’impossibilité de la réalisation de ce sionisme . » La bourgeoisie juive est forcée de créer un état national et d’assurer les conditions pour le développement de ses forces productives, précisément au moment où les conditions pour un tel exploit ont disparu depuis longtemps. La décadence du capitalisme, si d’un côté elle a posé la question juive de façon si pointue, a simultanément rendu impossible la solution du problème par la voie sioniste. « Et il n’y a rien d’étonnant à ce sujet, » dit Léon. « On ne peut pas supprimer un mal sans détruire ses causes. Le sionisme prétend résoudre la question juive sans détruire le capitalisme, la principale cause de la souffrance des juifs . » (13)
Cela marque, comme une marque de feu, le caractère de classe du mouvement sioniste. Il est vrai que les pionniers de la colonisation de la Palestine étaient des artisans, des commerçants pauvres, des gens sans grandes possessions. De cette façon on a essayé de créer une image « plébéienne » et même « de travailleur », voir « socialiste » du sionisme. Ses avocats, surtout ceux qui se considèrent de gauche, acceptent l’idée que le mouvement sioniste n’était pas un facteur progressiste dans la politique européenne, mais ils avancent l’argument que cela était secondaire par rapport à un fait essentiel : le sionisme aurait été le mouvement de libération nationale du peuple juif, du « plus pauvre des peuples. » Ce serait donc une « juste cause ».
Evidemment, il n’était pas dans les plans de Rothschild ou de la grande bourgeoisie juive d’aller cultiver la terre en Palestine. Ce qu’ils ont fait était, d’un côté, encourager un mouvement qui emprisonnerait les juifs les plus pauvres dans la Terre Sainte et les conduirait ainsi loin de la lutte de classe et des partis de gauche en Europe, et de l’autre côté, se débarrasser – eux d’abord – de la fureur antisémite qui grandissait à toute allure.
Un autre but de ce mouvement encouragé par la bourgeoisie juive était de transférer ces masses hors d’Europe pour construire un état juif en un point stratégique , situé au milieu des plus grandes réserves de pétrole dans le monde, menacées par la poussée des luttes des masses arabes. C’est pourquoi l’état d’Israël est devenu une enclave d’impérialisme dans la région, le gendarme du monde arabe.
D’après les sionistes, la Palestine était une région pratiquement vide. « De vastes régions du pays sont restées inexplorées et ont appartenu à des seigneurs féodaux absents. Elles étaient infectées par la malaria et, à l’exception de quelques baraques dispersées de bédouins, elles étaient inhabitées et par conséquent disponibles. » « Dans le voisinage de la Terre Sainte, il y avait à peine quelques noyaux hétérogènes, musulmans, chéquis, chrétiens syriens et grecs orthodoxes. C’est vers une terre sans peuple que graduellement, un peuple sans terre a commencé à se déplacer vers la fin du siècle dernier . » (15)
On est à l’époque de l’expansion coloniale de l’Europe en Asie et en Afrique. C’est dans ce cadre historique que le sionisme commence. Et la Palestine, loin d’être une terre vide et sans propriétaire, était occupée par un peuple : le peuple arabe. C’était un problème pour la bourgeoisie européenne juive, au point que Herzl, dans son livre, ne mentionne jamais le mot « arabe », quoique, évidemment, il était au courant de l’existence des arabes. Cette falsification, dissimulée pendant tant d’années, ne résiste pas à l’évidences des faits, et principalement à la reprise de la lutte palestinienne qui a contraint mêmes les historiens israéliens officiels à admettre qu’il n’y avait là aucune « terre sans peuple. »
Voilà le rôle réservé aux juifs désespérés de l’Europe orientale : servir de pointe de lance des plans de colonisation de la bourgeoisie impérialiste, surtout l’américaine, intéressée à installer un gendarme au Moyen Orient. Sous l’abri d’une approche philanthropique, l’expansion coloniale a utilisé ces masses de juifs pauvres pour des buts qui étaient loin d’être louables. Qui oserait s’opposer à ce que les pauvres juifs abandonnent l’obscurité des ghettos à la recherche de la lumière du soleil palestinien ? Malheureusement, ce changement, pour salutaire qu’il aurait pu être pour eux, a été réalisé au frais des arabes, qui ont été massacrés et expulsés d’une terre qui avait été la leur, de fait et non grâce à un récit biblique.
5. La déclaration de Balfour (02/11/1917)
La politique de Theodor Herzl, le père de sionisme, et de ses successeurs, a été de profiter du processus d’expansion impérialiste pour occuper la Palestine. A cet effet, il fallait qu’une puissance impérialiste embrasse la cause sioniste. Leur activité principale a donc été de négocier avec les différentes puissances européennes et d’essayer de trouver pour le sionisme une place dans leur politique coloniale. Le soutien est venu, en premier lieu, de l’Angleterre , un empire qui, depuis la moitié du siècle, connaissait une expansion à toute allure.
Les négociations de Herzl ont bien été bien reçues à Londres, mais il y avait un problème objectif : à ce moment là, la Palestine était dans des mains turques. L’Angleterre offrait alors à Herzl de coloniser l’Ouganda ou le Sinaï égyptien, mais cette possibilité ne s’est pas cristallisée. Il y avait un autre problème objectif : le sionisme n’était pas très développé parmi les masses juives. Ceux qui souhaitaient émigrer l’ont fait massivement vers l’Amérique, à tel point qu’une des options discutées était de constituer un état sioniste en Argentine . Très peu de juifs allaient en Palestine, et une partie importante de ceux qui y sont restés étaient anti-sionistes ou sous l’influence des partis de gauche.
Avec la première guerre mondiale est arrivée le moment de partager les territoires sous contrôle turc. Pour y avoir accès, l’Angleterre a eu recours au mouvement national arabe qui avait commencé à se réveiller. D’autre part, elle signe un traité avec la France pour se partager la région, et elle signe la Déclaration de Balfour qui est entrée dans l’histoire comme « l’alliance nuptiale » entre le sionisme et l’impérialisme britannique.
Ainsi a commencé la deuxième étape du sionisme , qui a atteint sa culmination avec la création de l’état d’Israël. En plus de donner une aide précieuse aux anglais pour établir un futur protectorat en Palestine, la Déclaration de Balfour a placé une arme puissante dans les mains des anglais pour liquider le mouvement national arabe et fortifier la politique de guerre de l’empire Britannique et sa lutte contre la Révolution Russe.
Le chemin vers Israël prenait forme avec les caractéristiques suivantes: 1) il s’agit d’une déclaration unilatérale d’un grand pouvoir impérialiste; 2) cette déclaration fixe le destin d’une région de l’Asie qui n’avait jamais appartenu à l’Angleterre, qui a donné en cadeau à Lord Rothschild le territoire d’une autre nation; 3) on ne prend nullement en considération les désirs du peuple palestinien, qui étaient pour 93% arabe en 1917. Ce 93% a été réduit à la condition de non-juifs, emprisonnés dans un « foyer national juif », c’est dire, traités comme des étrangers dans leur propre pays.
6. Le mandat Britannique (1918-1948)
Vers la fin de la première guerre mondiale, les Alliés ont créé la Société des Nations, prédécesseur de l’ONU d’aujourd’hui, qui « a concédé » un mandat sur la Palestine à la Grande-Bretagne. Mais ce n’étaient pas des jours paisibles pour impérialisme. Pour la première fois dans histoire, il y avait un État Ouvrier, l’URSS, qui s’opposait à l’expansion coloniale, et le monde colonial entier a été touché par une vague de luttes anti-impérialistes.
Dans le monde arabe, le Moyen Orient était le centre des luttes les plus importantes contre les impérialismes anglais et français. La Palestine était le noyau principal de cette lutte, surtout pendant l’insurrection de 1936-1939 qui a commencé avec une grève générale de six mois, et qui a exigé la moitié de tous les effectifs de l’armée britannique – un des plus puissants de l’époque – pour la suffoquer. Des centaines et des centaines de palestiniens ont été tués, emprisonnés, condamnés aux travaux forcés ou à de longues peines de prison. En 1939, le peuple palestinien a été vaincu. C’est la clef pour comprendre la facilité relative avec laquelle l’état d’Israël a été établi. (16)
L’occupation, explique Jon Rothchild, s’appuyait sur trois piliers du mouvement sioniste: kibush hakarka (conquête de la terre), kibush haavoda (conquête du travail) et t’ozteret haaretz (produit de la terre). (17) « Derrière ces mots sonores il y avait une réalité sévère.Conquête de la terre voulait dire que le plus de terre possible devrait être acquise (légalement ou non) des arabes, et qu’aucune terre juive ne pouvait être vendue aux arabes ou revenir à eux de l’une ou l’autre façon.
Conquête du travail voulait dire que dans les usines et les terres des juif, la main d’œuvre juive devait être préférée. L’ouvrier arabe était boycotté. En réalité, le Histadrut, qui maintenant se présente comme le Syndicat Général Israélien, a été créé pour imposer le boycott contre les ouvriers arabes.
Produit de la terre voulait dire pratiquer le boycott de la production arabe de la part des colonisateurs juifs et ne retenir que l’achat de produits provenant de terres juives ou de magasins juifs ». (18)
Cette politique d’occupation – que les sionistes ont présenté comme étant « socialiste », comme visant à aider les ouvriers et les juifs pauvres – a signifié la misère pour le peuple palestinien, car elle a été imposée sur la terre qu’ils occupaient. Même s’ils étaient une minorité au début (plus tard ils se sont développé beaucoup), les sionistes avaient un pouvoir économique beaucoup plus important que les arabes, car ils pouvaient compter sur l’aide de l’impérialisme.
Cela leur a permis de ruiner le peuple arabe de Palestine, les réduisant en travailleurs sans travail et paysans sans terre. Un type bien curieux de socialisme, qui attaque les travailleurs. Les arabes ont été boycottés ou expulsés des entreprises sionistes ou de capital étranger (concessions, habituellement administrées par des directeurs sionistes). Environ 53% des entreprises étaient des concessions et 40% étaient de propriété sioniste, tandis que seulement 6% étaient de propriété arabe (données de 1939). De cette façon, il ne restait qu’un marché de travail très limité pour les arabes.
Quelque chose de semblable s’est passé avec le t’ozteret haaretz (produit de la terre), une politique qui revenait à un boycott forcé de tout produit arabe, pratiqué par les bandes armées du Histadrut, une répression qui ne ménageait même pas les juifs qui osaient acheter quelque chose produit par des mains arabes.
Aliénés de leur terre, du travail et de la possibilité de vendre leurs produits, les palestiniens sont devenus une masse marginale, prêts à être bannis de leur terre. La résistance palestinienne, sous forme de guérilla, a été écrasé pratiquement en 1939 par l’armée britannique et le Hagana, l’armée non-officielle formée par le sionisme, dans une attaque conjointe qui voulait démontrer « qui était maître en Palestine ».
A cette époque, la deuxième guerre mondiale allait commencer et les sionistes se souciaient davantage de ce qui allait se passer en Angleterre, leur impérialisme protecteur, face à une nouvelle répartition du monde en zones d’influence. Ils voulaient garantir pour la Palestine la protection impérialiste, étant donné qu’il y avait de fortes indications qu’à partir de ce là, ce seraient les USA et pas l’Angleterre qui seraient les seigneurs du monde. La soi-disant lutte anti-impérialiste proclamée par les sionistes n’était en fait que le besoin de passer d’un associé plus faible à un plus fort.
Ben Gurion l’a exprimé très clairement: « Notre plus grande inquiétude était le destin qui serait réservé à la Palestine après la guerre. Il était clair à cette époque que les Anglais ne garderaient pas leur mandat. S’il y avait toutes les raisons pour croire qu’Hitler serait battu, il était évident que la Grande-Bretagne, même victorieuse, serait affaibli comme résultat du conflit. C’est pourquoi, je n’avais pas de doutes de que le centre de gravité de notre force devait être transféré du Royaume-Uni à l’Amérique, qui était en train d’occuper la première place dans le monde « . (19)
Sous l’orbite américaine, le sionisme a commencé à faire de grands pas vers la création de l’état d’Israël. Vers la fin de la guerre, les grands pouvoirs, à travers l’ONU, non seulement fermaient les yeux sur l’occupation et le massacre du peuple palestinien, mais ils légalisaient aussi la situation coloniale créée pendant la domination britannique. Sur la base d’une proposition de division de la Palestine, faite pendant le mandat anglais (20), et qui a mis le feu à la révolte partout dans le monde arabe, on a voté le 29 novembre 1947 la division du pays en deux états : un état sioniste et un état arabe. Une fois encore, personne n’a consulté le peuple palestinien. Et la décision a eu l’aval de la bureaucratie soviétique, qui a même envoyé des armes et des avions pour aider l’impérialisme dans le massacre des arabes. Une fois la résistance Palestine noyée dans le sang, l’état d’Israël est proclamé en mai 1948.
7. Israël: la tragédie palestinienne
En 1947, il y avait 630 000 juifs et 1 300 000 arabes palestiniens (21). Donc, lors de la division de la Palestine par les Nations Unies, les juifs étaient une minorité (31% de la population). Cette division, encouragée par les principaux pouvoirs impérialistes – avec le soutien de Staline – a donné 54% de la terre fertile au mouvement sioniste. Mais déjà avant la formation de l’état d’Israël, l’Irgun et le Haganah (des organisations paramilitaires israéliennes) avaient pris plus des trois quarts de la terre et expulsé les habitants locaux. Ainsi, des 475 villages palestiniennes qui existaient en 1948, 385 ont été totalement anéantis, réduits en cendres, et les 90 restants ont eu leur terre confisquée. Ce processus est entré dans l’histoire comme la « judaïfication » de la Palestine.
Raphael Eitan , alors chef de l’état major des Forces Armées Israéliennes n’aurait pas pu être plus clair quand il a dit, « Nous déclarons ouvertement que les arabes n’ont droit à aucun centimètre d’Eretz Israël. Ceux de bon cœur, les modérés, devrait savoir que les chambres à gaz d’Adolf Hitler seront un jeu d’enfants. La seule chose qu’ils comprennent et comprendront est la force. Nous utiliserons la force la plus décisive jusqu’à ce que les palestiniens s’approchent de nous sur leurs genoux . » (22)
David Ben Gurion , dans un discours prononcé le 13 octobre 1936, formulait la stratégie sioniste comme suit: « Quand nous devenons un pouvoir de poids après la création de l’état, nous abolirons la partition et nous nous étendrons sur toute la Palestine. L’état sera seulement une étape dans la réalisation du sionisme, et sa tâche est de préparer le terrain pour notre expansion. L’état doit maintenir l’ordre, non par des mots mais au moyen de mitrailleuses . » (23)
Et c’est ce qui effectivement a été fait. Entre le 29 novembre 1947, date à laquelle la Palestine a été divisée par l’ONU, et le 15 mai 1948, quand l’état d’Israël a été formellement proclamé, l’armée sioniste et les milices paramilitaires ont pris plus de 75% de la Palestine et banni 780 000 arabes. Ceux qui sont restés ont été victimes de persécutions violentes et d’une boucherie comparable seulement à l’holocauste nazi .
C’est ainsi qu’a commencé la tragédie palestinienne, qui dure jusqu’à nos jours.
8. Vol, sans autre cérémonie, de la terre et des commerces des arabes
Il est nécessaire de comprendre l’envergure et les conséquences de cette politique meurtrière du sionisme. Dans le territoire occupé par Israël après la partition, il y avait 950 000 arabes palestiniens qui vivaient dans environ 500 villages et dans toutes les grandes villes telles que Tiberiades, Safed. Nasare, Shafa Amr, Acre, Haifa, Yaffa, Lidda, Ramle, Jérusalem, Majdal (Ashquelon), Isdud (Ashdod) et Beersheba. En moins de six mois, il ne restait que 138 000 personnes. La grande majorité des palestiniens avait été assassinés, expulsés par force ou mis en fuite devant la terreur des bandes assassines des unités de l’armée israélienne.
Dans un discours dirigé aux étudiants de l’Institut Technologique d’Israël, Moshe Dayan , héros de la « guerre des six jours » ne se souciait guère de dissimuler le fait qu’Israël a été fondé sur une falsification ténébreuse de l’histoire: « Nous voyons ici un pays qui a été habité par les arabes et nous y construisons un état hébreu, juif. Où il y avait des villages arabes, nous avons construit des villages juifs. Vous ne savez même pas les noms de ces villages et nous ne vous en voulons pas pour cela, car ces livres de géographie n’existe déjà plus. Il n’existe plus ni les livres ni les villages. Nahalal a émergé à la place autre fois occupée par Mahalul, Gevat à la place de Jibya, Sarid à la place de Hanifas et Kafr Yehoushu’a à la place de Tel Shamam. Il n’y a pas une seule implantation qui n’a pas été construite à la place d’un ancien village arabe . » (24)
De cette façon, de grandes extensions de terre ont été confisquées sous la protection de la Loi de Propriété des Absents, passée en 1950 en Israël. Jusqu’à 1947, les juifs étaient les propriétaires de 6% de la terre Palestinienne. Quand l’état d’Israël naît formellement, le Fonds National Juif estime qu’il avait pris plus de 90% de la terre. La valeur des propriétés volées des arabes était de plus de 300 millions de dollars, selon les calculs de l’époque. Si nous multiplions ce chiffre par l’actualisation de la valeur du dollar, les masques tombent : Israël a peu à voir avec Jéhovah ou la Terre Sainte et beaucoup avec la piraterie et le pillage.
L’occupation des propriétés palestiniennes était absolument nécessaire pour que l’état d’Israël puisse devenir viable. 370 communes et implantations juives ont été créées entre 1948 et 1953; 350 d’entre eux étaient propriété des « absents ». Il a été estimé qu’en 1954, 35% des juifs en Israël vivaient dans des propriétés confisquées « d’absents » et que 250 000 nouveaux immigrés se sont installés dans les régions urbaines dont les palestiniens avaient été expulsés.
Dix mille entreprises et commerces ont été distribués aux colons juifs. Si dans les zones urbaines le pillage a été généralisé, dans la campagne l’usurpation de la terre a eu libre cours. Toutes les plantations de citrons des palestiniens – plus de 240 000 dunams (21 200 ha) – ont été confisquées. Jusqu’à 1951 un million de caisses de citrons récoltés dans les propriétés enlevées aux arabes – l’équivalent de 10% de toute la monnaie étrangère des exportations – était dans les mains israéliennes. En cette même année, 95% des plantations d’oliviers d’Israël ont été faites dans le territoire palestinien occupé. Les olives qu’elles produisaient constituaient le troisième produit d’exportation d’Israël, après les citrons et les diamants. Un tiers de la production de marbre est venu des 52 carrières usurpées. Les terres confisquées des arabes sont allées aux Fonds National Juif créé en 1954 par le gouvernement israélien.
Comme rappelle Shoenman, la mythologie sioniste prétend vendre l’idée que c’était l’esprit de sacrifice, d’abnégation, de travail dur et d’habileté des juifs qui a transformé une région déserte, négligé par ses occupants antérieurs, des arabes nomades et primitifs, en une terre florissante. Les plantations palestiniennes, l’industrie, le bois de construction, les usines, les maisons et les fermes ont été pillées et mises à sac après une conquête sanguinaire, « le bateau de l’état est un bateau de pirate, le drapeau qu’elle porte est un crâne avec deux os traversés . » (25)
9. Racisme contre le travailleur arabe
Mais Israël n’est pas que cela. Son histoire a commencé avec un grand pillage, ce qui a forcé le pays à le continuer, de plus en plus. Le bateau des pillards n’a jamais trouvé un refuge solide. Ce voyage macabre est allé en avant, exploitant aussi le marché du travail des arabes, dans la campagne comme dans les villes. Ce processus de judaisation du travail est basé sur une idéologie raciste envers le travailleur arabe.
Dans la campagne, toute relation entre l’homme et la terre est soumise à la loi raciste : « le locataire doit être un juif, qui doit accepter que toutes les activités en rapport avec la culture de la terre soient réalisées par des mains juives « . (26) La terre ne peut donc pas être louée à un non-juif, ni sous-louée, vendue, hypothéquée ou donnée à un non-juif. Les non-juifs ne peuvent pas être employés comme mains d’œuvre de la ferme ni pour n’importe quel travail en rapport avec les cultures.
En Israël, la terre de l’état, qui est dans les mains du Fonds National Juif, est considérée comme « terre nationale », ce qui veut dire, terre juive. Employer des travailleurs non-juifs est illégal . Dû au manque de travailleurs agricoles juifs, et parce que les palestiniens travaillent pour des salaires plus petits que les juifs, quelques fermiers juifs (tel qu’Ariel Sharon) embauchent une main d’œuvre arabe, en dépit d’une prohibition explicite.
Shoenman fait remarquer qu’Israël utilise toutes les expressions normales dans un sens raciste. « Le ‘peuple’ signifie seulement le juif. Un ‘immigré’ ou un ‘colon’ ne peut être qu’un juif. Une implantation veut dire une implantation seulement pour les juifs. La terre nationale veut dire la terre juive et pas la terre israélienne. » (27)
De cette façon, la loi et les droits, les garanties et le droit au travail ou à la propriété ne sont que pour les juifs. La nationalité ou la citoyenneté israéliennes correspondent strictement aux juifs, dans toutes les applications spécifiques de leur signification et juridiction. Comme la définition de juif est basé entièrement sur le précepte religieux orthodoxe, être d’origine juive du côté de la mère est une condition préalable pour pouvoir prétendre à n’importe quel droit de propriété, de travail ou de protection légale. A présent, 93% de la terre de ce qui est appelé l’état Israël est administré par le Fonds National Juif et pour avoir un droit pour vivre sur cette terre, la travailler ou la louer, on doit prouver au moins trois générations d’ancêtres juifs du côté de la mère.
10. Le sionisme, le fascisme et les juifs
S’il est important que l’histoire officielle commence à admettre que la Palestine n’était pas une terre sans peuple, il est nécessaire aussi de clarifier une autre question, aussi sordide que celle qui concerne la création de l’état d’Israël. Il s’agit de la relation du sionisme avec les juifs eux-mêmes et avec le nazi-fascisme.
Le caractère raciste du mouvement sioniste se révèle de la façon la plus abominable dans la relation qu’il a maintenu avec les juifs eux-mêmes. Ralph Shoenman rappelle que « les fondateurs du sionisme étaient désespérés pour combattre l’antisémitisme et, paradoxalement, considéraient les anti-semites mêmes comme des alliés, parce qu’ils partagaient le désir d’arracher les juifs hors des pays où ils avaient vécu. Petit à petit, ils ont assimilé les valeurs de l’haine pour les juifs et l’antisémitisme, au point que le mouvement sioniste a considéré les anti-semites mêmes comme leurs meilleurs parrains et protecteurs . »
Il cite une lettre que Theodor Herzl a envoyé au Compte Von Plehve, auteur des pires pogroms en Russie – les pogroms de Kishinev – avec la proposition suivante: « Aidez-moi à obtenir la terre [palestinienne] aussitôt que possible, et la révolte [contre le régime du Tzar] terminera . » Von Plehve a consenti et il a commencé à financer le mouvement sioniste.
Il s’agit, en réalité, d’une demande de coopération entre les bourgeoisies sionistes et les classes dominantes des autres pays pour lutter contre les juifs de gauche qui rejoignaient les partis révolutionnaires. De ce point de vue, le sionisme , dans sa collaboration avec le fascisme, a joué un rôle sordide, car il a joué avec les sentiments religieux des juifs pour massacrer les juifs de gauche .
Le mouvement de la jeunesse sioniste, Betar, servait de chair à canon pour Mussolini, en formant les escadrons des chemises noires. Quand Menahem Begin est devenu le chef du Betar, il a changé les chemises noires pour les marronnes, comme celles utilisées par les bandes d’Hitler. C’était l’uniforme que Beguin et les membres du Betar utilisaient dans toutes les assemblées et rassemblements.
La stratégie sioniste était de recruter les européens qui détestaient les juif et de s’aligner avec les mouvements et les régimes les plus pervers afin qu’ils soutiennent la création d’une colonie sioniste en Palestine. Cette stratégie a inclus le nazisme. Le 21 juin 1933, la Fédération Sioniste d’Allemagne a envoyé une note de soutien au parti nazi, qui disait : » … une renaissance à la vie nationale, comme celle qui a lieu dans la vie allemande… doit avoir lieu aussi dans le groupe national juif. Sur la base d’un nouveau état [nazi] qui a établi le principes de la race, nous souhaitons encadrer notre communauté dans la structure d’ensemble, de façon à ce que pour nous aussi, dans la sphère qui nous est assignée, elle puisse développer une activité fructueuse pour la Patrie … « . (29)
Le Congrès de l’Organisation Sioniste Mondiale de 1933 n’a pas répudié ce comportement, au contraire : une résolution qui appelait à agir contre Hitler a été battu par 240 votes contre 43. Pendant ce même congrès, Hitler a annoncé un accord commercial avec laBanque Anglo-palestinienne de l’Organisation Sioniste Mondiale (WZO), qui signifiait la rupture du boycott juif contre le régime nazi, précisément quand l’économie allemande était extrêmement faible. La WZO a rompu le boycott juif et est devenu le distributeur principal des produits nazis dans le Moyen Orient et le nord de l’Europe. En Palestine, ils ont fondé le Ha’avara, une banque destinée à recevoir de l’argent des bourgeoisies germano-juives, avec laquelle un grand nombre de produits du nazisme ont été achetés.
Un des réflexes les plus sordides de cette politique a été l’action du sionisme par rapport à la résistance juive contre les massacres des juifs en Europe. En juillet 1944, le rabbin Slovaque, Dov Michael Weissmandel, a écrit aux fonctionnaires sionistes chargés des « opérations de récupération », proposant une série de mesures pour sauver les juifs d’Auschwitz . Il offrait des cartes détaillées des voies ferrées et planifiait le bombardement des lignes qui menaient aux crématoriums. Il demandait que les fours d’Auschwitz soient bombardés, que soient lancées par parachutes des munitions pour les 80 000 prisonniers et des bombes pour faire exploser le camp et mettre fin à l’incinération de 13 000 juifs par jour.
Dans le cas où les alliés refuseraient de coopérer, Weissmandel proposait que les sionistes, qui avaient suffisamment d’argent pour cela, achètent des avions, recrutent des volontaires et exécutent l’opération.Weissmandel n’était pas le seul à demander une telle chose. Dans les années 40, les porte-parole européens juifs ont appelé au secours, demandé des campagnes publiques, une résistance organisée, des manifestations pour forcer les gouvernements alliés à coopérer.
Chaque fois, cependant, ils ont reçu le silence ou même le sabotage actif du sionisme .
En juillet 1944, une année avant la fin de la guerre, le rabbin Weissmandel a envoyé une lettre de protestation aux sionistes, qui a été publiée en partie dans l’Histoire cachée du sionisme de Schoenman :
« Pourquoi n’avez vous rien fait jusqu’à maintenant ? Qui est le coupable de cette négligence terrible ? Est-ce que vous n’êtes pas les coupables, juifs frères qui avez la meilleure chance du monde, la liberté ? Nous vous envoyons ce message spécial : nous vous informons qu’hier les allemands ont commencé à déporter les juifs de la Hongrie. Ces déportés vers Auschwitz seront tués avec le gaz cyanure. C’est l’ordre du jour pour Auschwitz depuis hier : douze mille juifs seront asphyxiés – hommes, femmes, enfants, vieux gens, bébés, sains et malades.
Et vous, nos frères là en Palestine, vous de tous les pays libres, et vous, ministres de tous les royaumes, pourquoi restez vous silencieux face à une telle massacre ? Vous vous taisez pendant qu’ils assassinent des milliers, cela fait déjà six millions de juifs ? Vous vous taisez maintenant, pendant que des dizaines de milliers sont assassinés ou se trouvent dans la file d’attente pour être assassinés ? Leurs cœurs fracassés demandent votre aide, et pleurent pour votre cruauté.
Vous êtes brutal, vous aussi vous êtes des assassins, par le sang froid du silence avec lequel vous regardez, parce que vous restez assis les bras croisés sans rien faire, même en sachant qu’à ce moment même vous pourriez arrêter ou au moins différer l’assassinat des juifs.
Vous, mes frères, enfants d’Israël, est-ce que vous êtes fous ? Ne savez vous pas quel enfer nous entoure ? Pour qui gardez vous votre argent ? Vous êtes des assassins ! des fous ! Qui pratique la charité ici ? Vous, qui dans vos solides maisons laissez tomber quelques centimes, ou nous, qui donnons notre sang au plus profond des enfers ? «
Pas un seul dirigeant sioniste n’a soutenu cette pétition; et aucun des gouvernements de l’ouest n’a bombardé un seul camp de la concentration.
La coopération entre le sionisme et le fascisme a fait que le premier trahisse la résistance et tourne le dos à une entreprise qui a mené à la mort au moins six millions de juifs. Aujourd’hui, quand un autre anniversaire de l’holocauste est commémoré, il faut dire avec toute la clarté que le sionisme n’a pas lutté pour le prévenir . Pourtant, il l’utilise comme un alibi pour assassiner des palestiniens .
C’est un fait tellement choquant que la journaliste israélienne, Amira Hass, du journal Haaretz, a appelé les survivants de l’holocauste et leurs descendants à ne pas interpréter l’assassinat de leur peuple et de leurs familles en Europe comme un aval éternel pour la suppression et l’expropriation du peuple palestinien et pour présenter ce peuple comme l’ennemi qui remplace les allemands.
En réalité, il est grand temps qu’Israël arrête d’utiliser l’holocauste comme une justification pour opprimer et persécuter les palestiniens, faisant avec eux ce que les allemands avaient fait aux juifs.
Cécilia Toledo
Notes :
1 Frase du livre de Dov Burnir, Les juifs, le sionisme et le progrès, p. 486, citée dans Revista de America, n° 12.
2 Folha de S. Paulo, 4 février 2001.
3 La Question Juive.
4 Abraham Léon était un des dirigeants les plus importants du sionisme de gauche en Europe, juste avant la deuxième guerre mondiale. Il a écrit Conception matérialiste de la question juive, une des études marxistes les plus importantes sur le thème. Léon, qui a finalement rompu totalement avec le sionisme et a rejoint les rangs de la Quatrième Internationale, a été assassiné par les troupes nazis au camp de concentration d’Auschwitz.
5 En 1917, le Bund a soutenu Kerensky contre Lenin et Trotsky et – jusqu’à la deuxième guerre mondiale – était très fort en Pologne.
6 Le mot sionisme vient de Sion (ou Tzion en hébreu), le nom d’une colline en Jérusalem. Dans la bible, ce nom est utilisé aussi bien pour faire référence à la Terre d’Israël que pour indiquer « sa capitale nationale et spirituelle », Jérusalem. Partout dans l’histoire d’Israël, Sion était un synonyme pour Israël et l’expression « retour à Sion » était le drapeau du mouvement sioniste.
7 La question juive, p. 150.
8 Ibidem, p. 151.
9 Ibidem, p. 151.
10 Ibidem, p. 152.
11 Dans Matérialisme et la question nationale, cité par A. Léon dans le travail précité, p. 152.
12 La question juive, page 154.
13 Ibidem, p. 154
14 Dov, Barmir, « Les juifs, le sionisme et le progrès », Inova, Portugal, 1968,
15 Ephraim Tari, El de significado de Israël.
16 Revista de America, p. 16.
17 Jon Rothchild, « Comme les arabes ont été expulsés de Palestine, cité par Revista de America, n° 12.
18 Ibidem.
19 Michael Barre-Zohar, dans The Armed Profet: A Biography of Ben Gurion, cité par Revista de America, p. 24.
20 Proposition de la Commission Peel, de 1937, acceptée par Ben Gurion
21 En 1917 il y avait en Palestine 56 000 juifs et 644 000 arabes. En 1922 il y avait 83 794 juifs et 663 000 arabes. En 1931 il y avait 17 4616 juifs et 750 000 arabes (Schoenman, p. 40).
22 Cité par Schoenman, p. 40.
23 Cité par Schoenman, p. 41.
24 Cité par Schoenman, p. 50.
25 Historia oculta del sionismo, p. 50.
26 Cité par Schoenman, p. 50.
27 Historia oculta del sionismo, page 50.
28 Ibidem.
29 Cité dans Historia oculta del sionismo, page 54.
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Le CRIF voulait empêcher l’expression des enfants palestiniens. Saisie par le Comité Action Palestine, organisateur de l’accueil de la troupe en Gironde, la justice leur rend ce droit à la parole.
VOIR NOTRE DOSSIER AL ROWWAD
Tout était prêt. Depuis six mois, le CAP travaillait d’arrache-pied avec les mairies et les associations locales pour accueillir les 5 et 6 juillet dans la salle Simone Signoret de Cenon, la troupe des enfants palestiniens d’Al Rowwad de Bethléem, et leur pièce « Nous sommes les enfants du camp ». Pourtant le 28 juin 2006, sous la pression communautariste du Conseil Représentatif des Institutions juives de France et intervention de la Préfecture de la Gironde, la Mairie de Cenon et le Festival des Hauts de Garonne, décidaient sans préavis ni discussions d’empêcher la tenue des représentations en annulant la mise à disposition de la salle. La seule raison qui nous a été signifiée était le caractère politique de l’association. Un article de Sud-Ouest paru le 1er juillet rendait publique cette décision en l’argumentant par des accusations censées diaboliser le CAP.
Mis devant le fait accompli, le Comité Action Palestine a tout mis en oeuvre pour que ces spectacles puissent avoir lieu, et contacté plusieurs municipalités et de nombreuses salles. Ces dernières ont à leur tour dû faire face aux mêmes pressions sionistes locales. Toutefois, au nom de la liberté d’expression des artistes, le théâtre en Miettes de Bègles acceptera d’accueillir la troupe et d’organiser les représentations en collaboration avec la Compagnie des Enfants du Paradis.
Parallèlement, le lundi 3 juillet, le CAP dépose trois requêtes en référé contre la mairie de Cenon auprès du tribunal administratif de Bordeaux. La requête en référé suspension et le référé liberté font l’objet d’une audience en urgence le mercredi 5 juillet à 10h30. Le même jour à 16h00, le tribunal administratif de Bordeaux juge qu’il y a bien une atteinte grave à la liberté de réunion et d’expression, lesquelles sont des libertés fondamentales. Il considère comme illégale la décision de la Mairie de Cenon et lui ordonne de mettre à disposition du Comité Action Palestine comme elle s’y était engagée, la salle Simone Signoret et tous les moyens techniques nécessaires pour que les représentations puissent avoir lieu comme prévu et condamne la commune à verser à l’association une somme de 1000 euros.
Un peu tard pour la soirée du mercredi 5 qui s’est déroulée comme prévue au Théâtre en Miettes. L’émotion du public était vive pour apprécier la justesse et la beauté du spectacle proposé par les enfants palestiniens. Le jeudi 6 juillet, la salle Simone Signoret est également comble pour accueillir et applaudir les enfants d’Al Rowwad.
Cette victoire du CAP est d’autant plus importante que toutes les villes de la tournée « Al Rowwad » ont subi les mêmes pressions de la part du CRIF en référence à la décision d’annulation de la ville de Cenon qui créait un fâcheux précédent*. Nous devons nous féliciter qu’à ce jour, aucune nouvelle annulation n’ait empêché la troupe de se produire.
Le Comité Action Palestine remercie tous ceux, très nombreux, qui lui ont apporté leur soutien.
*Il est à noter que le Maire de Vaux en Velin a communiqué à la Société des Amis d’Al Rowwad, le courrier reçu du CRIF et la réponse cinglante qu’il a faite à ce suppôt de l’Etat d’Israël.
Pour plus d’informations, voir notre dossier reprenant les différentes étapes de la lutte …