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Article de Raghida Ousseiran

écrit pour le Forum Palestine 2009 organisé par le Comité Action Palestine.

Dans cet exposé, nous aborderons quelques phases de la résistance palestinienne :

1) Résistance à l’occupation britannique et à l’invasion sioniste : articulation entre la résistance contre l’occupation britannique et le danger grandissant de l’invasion coloniale sioniste.

2) Résistance à la Nakba pour le retour des réfugiés : unifier le peuple palestinien en exil et stratégie de la lutte armée.

3) La résistance oubliée : Les Palestiniens de 48 au cœur du pays colonisé.

4) Après 2000, une nouvelle stratégie : résistance du camp de Jénine et de la bande de Gaza.

1 – Traits de la résistance palestinienne avant 1948

Avant que la première guerre mondiale ne s’achève par la victoire des Alliés, le corps de l’empire ottoman, dans lequel se trouvaient la majorité des pays arabes, y compris la Palestine, était dépecé entre les puissances victorieuses. L’accord de Sykes-Picot entre la France et la Grande-Bretagne partage la région du Moyen-Orient et la déclaration Balfour (ministre britannique qui promet au mouvement sioniste de l’aider à installer une « patrie » en Palestine) instaurent les nouvelles règles du jeu impérialiste dans la région. Alors que les peuples arabes et leurs élites espéraient obtenir leur indépendance, avec la chute de l’empire ottoman, c’est leur division et leur soumission qui sont conçues et appliquées par les grandes puissances.

En septembre-octobre 1918, la Grande-Bretagne achève l’occupation de la Palestine et installe dès juin 1920 son pouvoir militaire. Affaiblis par les grands bouleversements qui agitent leur région, et auxquels ils ne s’étaient pas préparés, les peuples arabes s’organisent sur les nouvelles bases et élaborent des programmes d’action. Pour le peuple palestinien, le mouvement national naissant revendique : l’abolition de la déclaration Balfour, l’arrêt immédiat de l’immigration juive vers la Palestine, la suspension des achats de terres palestiniennes par les Juifs et l’établissement d’un gouvernement national palestinien après des élections législatives libres. La première conférence arabe palestinienne tenue à al-Quds du 27 janvier au 10 février 1919 refuse le partage de la région syrienne (Bilâd al-sham), dont la Palestine fait partie et réclame l’indépendance dans le cadre de l’unité arabe. Entre 1918 et 1929, le mouvement national palestinien, qui regroupe l’ensemble des forces et personnalités du pays, concentre son effort contre le projet sioniste tout en essayant de faire changer la position de l’occupant britannique vis-à-vis de la déclaration Balfour et du projet sioniste dans son ensemble. Trois soulèvements importants se déroulent au cours des premières années : le premier est la révolte à l’occasion du mawsim Nabi Musa à al-Quds, du 4 au 10 avril 1920. Le second se déroule à Yafa et s’étend dans plusieurs villes et le troisième est celui d’al-Bouraq, du 15 août au 2 septembre 1922.

C’est la révolte d’al-Bouraq en 1929 qui initie un mouvement de lutte plus audacieux, dirigé contre le mouvement sioniste et l’occupation britannique à la fois, le mouvement national ayant réalisé que cette dernière fait intrinsèquement partie du projet de division de la région et de la colonisation sioniste en Palestine.

Au cours de cette décennie qui marque l’apogée de la révolte palestinienne, des partis politiques nationalistes sont fondés comme le parti de l’indépendance (hizb al-Istiqlal), et le parti arabe palestinien (al-hizb al-arabi al-filistini), soutenu par le mufti Hajj Amîn al-Hussaynî. Mais c’est également au cours de cette période que naissent les mouvements de la résistance armée, comme Jihadiyya, dirigé par sheikh Izzidine al-Qassâm, al-Jihad al-Muqaddas, dirigé par ‘Abdel Qadir al-Hussaynî et al-Kaff al-Akhdar, dirigé par Ahmad Tafish, qui lancent leurs opérations contre les troupes britanniques et les colons sionistes. L’orientation anti-britannique des révoltes est clairement affirmée, surtout après l’échec des pourparlers à Londres en 1931. De même, s’affirme la dimension arabo-islamique lors du congrès d’al-Quds, tenu le 17 décembre 1931 sous la présidence de Hajj Amin al-Hussaynî, rassemblant de nombreuses personnalités du monde arabe et musulman (22 pays). En 1933, une révolte générale touche le pays dans son ensemble, sous la direction du mouvement national et Muza Kadhim al-Hussaynî, le maire d’al-Quds et personnalité dirigeante du mouvement, est gravement blessé par la répression britannique qui s’abat sur les manifestants.

L’organisation Jihadiyya est fondée en 1925, par sheikh Izzidine al-Qassam, dans les quartiers populaires de Haïfa. Sheikh Izzidine al-Qassam est d’origine syrienne. Il est né à Jablé, au nord de la Syrie dans une famille religieuse, se rend en Egypte pour faire ses études à al-Azhar, y rencontre les leaders réformateurs musulmans comme sheikh Abdo et participe à leurs discussions et débats. Revenu en Syrie, il mobilise la population contre l’invasion italienne de la Libye et ensuite, contre l’occupation française de la Syrie. Il est condamné à mort, s’évade et se rend en Palestine, à Haïfa où il fait ses prêches dans la mosquée al-Istiqlal. Il organise des cours d’alphabétisation le soir, dans les quartiers pauvres de la ville. Il parvient, selon certaines sources, à rassembler, de manière clandestine, 200 combattants, mais la popularité de sheikh Izzidine al-Qassam s’étend bien au-delà de la région de Haïfa. Bien que les opérations de résistance commence dès la première moitié des années 30 dans la région de Galilée, ce n’est qu’en novembre 1935, lors du martyre du sheikh et deux de ses compagnons dans une confrontation avec les troupes britanniques à Ya’bud, près de Jénine, que l’organisation est connue. Il est remplacé par sheikh Farhan as-Saadi, qui joue un rôle important dans le déclenchement de la révolte populaire de 1936-1939.

Al-Jihad al-Muqaddas a plutôt concentré ses opérations dans la région d’al-Quds et al-Khalil. Il est dirigé par le jeune Abdel Kadir al-Hussaynî, fils de Mûsa Kâdhim al-Hussaynî. En 1935, l’organisation militaire rassemblait 400 combattants.

Abdel Qadir al-Hussaynî est né en 1908, à Istanbul où sa famille vivait, puisque son père était un haut dignitaire de l’Etat ottoman. Il commence ses études dans les écoles d’al-Quds. Dès son jeune âge, il participe aux manifestations et agitations qui soulèvent al-Quds contre l’occupant britannique et les colons sionistes. Dès l’âge de douze ans, il se met à rassembler les armes et se préparer à la lutte armée. Aux côtés de son père, il participe aux manifestations générales en 1933. Il prend la direction du parti arabe palestinien à al-Quds et commence à mettre sur pied, clandestinement, son organisation militaire, al-Jihad al-Muqaddas.

Il fait ensuite des sessions de formation militaire, à Baghdad puis en Allemagne alors que l’occupant britannique le recherchait. Mais avant son départ de Palestine, il commence lui-même la lutte armée, lançant des grenades sur les responsables militaires britanniques, bloquant les chemins de fer et coupant les lignes téléphoniques.

En 1946, il commence à entraîner les combattants à la guerre qu’il sentait proche, contre les bandes militaires sionistes, très bien équipées. Avec l’aide des nationalistes égyptiens et libyens, il met en place un camp d’entraînement à la frontière entre les deux pays pour entraîner les combattants palestiniens. Il installe une usine de fabrication des munitions, fonde une radio à Ramallah en Palestine pour annoncer les communiqués de la résistance, et organise le financement de tous ces préparatifs avec Hajj Amin al-Hussaynî.

Après la décision de partage de la Palestine en novembre 1947 que les puissances impérialistes imposent à l’ONU, Abdel Qadir mène la lutte avec Jihad al-Muqaddas contre les colonies sionistes installées dans la région d’al-Quds. Il s’agissait surtout d’empêcher la liaison entre la région de Yafa, où les sionistes avaient de nombreuses colonies, avec la région d’al-Quds, où leurs colonies étaient relativement faibles. Il participe aux batailles de Sourif, Beit Sourik, Ramallah, al-Latroun, Bethlehem, Nabi Samou’il et finalement al-Qastal, dès le début de 1948, toutes des localités et villes entourant al-Quds.

Fin mars 48, il se dirige à Damas pour réunir des armes et des munitions. Pendant son séjour de quelques jours, il apprend le début de la bataille à al-Qastal, localité située à l’ouest d’al-Quds, surplombant la route de Yafa. Il s’y dirige immédiatement, sans avoir réuni les armes et munitions nécessaires. Le 7 avril, il réorganise les combattants qui parviennent à attaquer les sionistes qui s’étaient emparés de la localité, malgré les lourdes pertes humaines parmi les combattants. Les mujahidins sont encerclés. A peine la nouvelle est connue que les secours arrivent de toutes parts et les attaquants sionistes sont chassés. Les combattants avaient même l’intention de les poursuivre, avant qu’ils ne découvrent le corps du martyr Abdel Qadir al-Hussaynî. Frappés par la douleur, ils s’effondrent. Les bandes armées sionistes réoccupent à nouveau al-Qastal et commettent le jour suivant, le massacre de Deir Yassine (9 avril 48).

La partie occidentale de la ville d’al-Quds est alors occupée, selon le plan conçu par le mouvement sioniste, consistant à lancer une grande attaque, après la proclamation par l’ONU du partage de la Palestine, pour mener un nettoyage ethnico-religieux systématique dans la zone devant constituer l’Etat juif et à élargir cette zone, autant que possible, et occuper notamment la ville d’al-Quds. Entre novembre 1947 et mai 1948, le mouvement sioniste commet massacres sur massacres, selon un plan établi à l’avance. Des dizaines de milliers de Palestiniens seront massacrés et des centaines de milliers expulsés, pour fonder leur Etat ethnico-religieux, « Israël ». C’est la Nakba.

Donc, au cours de cette période historique, la résistance palestinienne s’organise immédiatement contre l’occupation britannique et la colonisation sioniste, mais ne commence sa lutte armée contre la présence britannique qu’après les années 30. La biographie du mujahid martyr Abdel Qader al-Hussaynî souligne l’arrière-base constituée par les pays arabes, Syrie, Egypte, Libye, Irak, par exemple, dans la lutte pour l’indépendance de la Palestine. Celle du mujahid martyr Izzidine al-Qassam souligne l’unité dans le combat des peuples de la région.

2 – Résistance du peuple palestinien en exil et dans les territoires occupés

Après la Nakba, il faut attendre une dizaine d’années pour que les Palestiniens se réorganisent dans les camps. A l’écoute de toute voix appelant à la résistance, ils adhèrent aux divers mouvements nationalistes qui prônent la lutte armée et l’unification du monde arabe face à Israël et l’impérialisme. Les Frères musulmans, qui avaient largement participé à la guerre contre Israël en 1948, se retrouvent dans les prisons et poursuivis par les régimes nationalistes, notamment en Egypte. Les régimes et mouvements arabes sont divisés, les puissances impérialistes interviennent encore plus massivement dans la région. C’est dans ce cadre que les Palestiniens retournent l’équation qui avait cours : « l’unité arabe en vue de libérer la Palestine » pour dire : « Diriger les fusils pour libérer la Palestine pourra unifier la nation arabe », ce qui signifie en clair recentrer la bataille pour libérer la Palestine, au niveau de la nation arabe. C’est la naissance du mouvement Fateh, bientôt suivie par d’autres organisations qui se définissent palestiniennes, des branches palestiniennes des mouvements nationalistes arabes (FPLP, FDLP, etc..)

C’est à partir des camps de l’exil que le mouvement national palestinien renaît après la Nakba, avec des organisations palestiniennes auxquelles adhèrent les réfugiés et les Palestiniens dans les territoires sous administration jordanienne et égyptienne. Des opérations audacieuses sont menées dans la Palestine occupée en 48, à partir des frontières au moment où des cellules de combattants dans l’intérieur occupé mènent plusieurs opérations de sabotage, notamment après la guerre défaite de juin 1967.

Dans les camps de l’exil, le mouvement national palestinien s’organise et organise tous les secteurs du peuple en vue de maintenir l’identité nationale, malgré la dispersion et l’éclatement, géographique et politique. C’est la naissance de l’OLP puis la montée en flèche des organisations palestiniennes qui sont majoritairement élues au comité exécutif de l’OLP, et notamment le Fateh.

Puis, après l’occupation du reste de la Palestine et des territoires arabes (Syrie, Liban, Egypte et Jordanie) en juin 1967, l’hésitation à entreprendre des opérations armées par plusieurs organisations, de peur d’engager ou de mouiller des régimes « progressistes », est vite dépassée. Elles se lancent donc dans des opérations audacieuses, comme celle d’al-Karameh, en Jordanie, en 1968, avec une victoire retentissante, en comparaison avec la défaite des régimes arabes en 1967. C’est alors la période des opérations « frappe et retire-toi » avant de passer à celles « frappe et maintiens-toi », comme l’opération du Fateh, à partir du sud-Liban, dirigée par la martyre Dalal al-Moghrabi, en mars 1978.

Après la guerre d’octobre 1973, les institutions politiques prennent le pas sur les formations militaires. Les centres de recherches, les institutions culturelles, éducatives, les unions des masses foisonnent. Ce furent des outils nécessaires pour la mobilisation populaire mais qui ont aussi entamé l’action militaire contre l’occupant. C’est d’ailleurs ce qui peut expliquer, en partie, la nouvelle orientation de l’OLP après la guerre de 73, où le programme en dix points (instauration d’un Etat palestinien sur toute parcelle de territoire libéré) essaie de prendre en compte l’équilibre régional et international pour définir une stratégie de lutte, prendre en compte les vœux des amis, des financeurs et des protecteurs.

Dans les territoires occupés en 1967, avant la première intifada de 1987, il y eut plusieurs révoltes populaires, plusieurs actes de résistance armée ou civile. Rappelons le grand soulèvement de 1977-78, lorsque la population refuse catégoriquement de voter pour les Ligues des villages que l’occupant sioniste avait imposés dans le cadre d’un projet d’autonomie, et élisent des personnalités nationales aux mairies de Naplouse, de Bethlehem et d’al-Khalil. Il faut également rappeler la journée de la terre, initiée en Galilée le 30 mars 1976 dans la Palestine occupée en 48, qui sera également un moment de lutte intense en Cisjordanie et dans la bande de Gaza contre les confiscations des terres et la colonisation.

A part quelques opérations spectaculaires menées par les organisations palestiniennes à partir des camps de l’exil au Liban, la résistance armée a laissé la place à une activité intense diplomatique et politique et ce, dès la guerre d’octobre 1973, qui a prouvé que les pays arabes pouvaient remporter une victoire, s’ils le voulaient et s’ils jouissaient d’une volonté indépendante et non soumise au jeu international. Cette victoire militaire contre Israël sera dilapidée par les régimes arabes qui troquent leur capacité militaire contre des promesses toujours creuses, jusqu’à présent.

La guerre israélienne contre le Liban, à partir de 1978 avec l’occupation et l’installation de milices collaboratrices sur une partie du sud, et en 1982, entraînera la fin de la présence militaire effective dans les camps palestiniens du Liban. Les combattants palestiniens se retirent avant que l’horrible massacre de la population palestinienne dans les camps de Sabra et Chatila ne soit supervisé en septembre 1982 par le général Sharon et son armée qui occupe Beyrouth.

Avec l’occupation du Liban en 1982 et le départ des combattants palestiniens de l’OLP vers Tunis et Alger, c’est une nouvelle phase de la résistance qui commence, où c’est l’intérieur occupé qui prend désormais la première place dans la résistance palestinienne. Au Liban, c’est une aube nouvelle qui commence à poindre, avec le début de la résistance nationale et islamique et la formation du Hezbollah qui parviendra à libérer, en mai 2000, la majeure partie du territoire libanais, en comptant sur ses propres forces et en menant les opérations armées les plus audacieuses, malgré le rapport de forces défavorable sur les plans local, régional et international.

En 1987, est déclenchée, ce qui fut nommée la première intifada, où la lutte à l’intérieur de la Palestine occupée en 1967 (Cisjordanie et bande de Gaza) prend le devant de la scène, et où l’on voit émerger le mouvement islamiste dans la lutte. Notons que si les sionistes pensaient que la première intifada susciterait une direction politique différente et moins combative que l’OLP, ils se sont trompés. Au contraire, même, l’OLP assume pleinement la direction de ce soulèvement populaire, et la manière dont elle a orienté ses résultats. Quant au mouvement islamiste qui a émergé, avec le Hamas et le Jihad islamique, il participe activement à l’intifada, et notamment le Hamas (puisque la direction du Jihad islamique est rapidement réprimée et devra attendre le début des années 90 pour revenir en force sur la scène, avec ses opérations martyres spectaculaires au cœur même de l’Etat sioniste), mais ne maîtrise pas les conséquences politiques de ce soulèvement. La fin de la première intifada et l’instauration de l’Autorité palestinienne issue des accords d’Oslo ouvrent une nouvelle phase.

3 – Résistance populaire et institutionnelle dans les territoires occupés en 1948 (Etat d’Israël)

Nous appelons « Palestiniens de 48 » les Palestiniens qui sont restés dans leur pays après la fondation de l’Etat sioniste. Du fait de l’expulsion (forcée ou encouragée) de près d’un million de Palestiniens, et la colonisation humaine sioniste, les Palestiniens de 48 sont devenus une minorité dans l’Etat d’Israël. A peine 150.000 dans les frontières de cet Etat en 48, ils deviennent un million en 1976 et sont presque 1,5 million aujourd’hui (sans compter la population de la partie orientale d’al-Quds, ni les Syriens du Golan occupé). Ils sont répartis surtout dans la région nord (Galilée), dans le centre (Triangle) et dans le sud du pays (Naqab), mais aussi dans les villes devenues mixtes du fait de l’invasion coloniale comme Akka, Haïfa, Yafa, Lod, Ramleh, et depuis peu, dans les colonies sionistes devenues mixtes comme (Nazareth-Ilit, plantée au-dessus de la ville arabe de Nazareth).

Sans vouloir faire l’historique de la lutte des Palestiniens de 48 qui est aussi longue que l’occupation, nous exposerons la résistance qui s’est développée depuis 2000, avec l’Intifada al-Aqsa, qui a pris le nom de Habbat (soulèvement) d’al-Aqsa et/ou d’Octobre, date à laquelle les Palestiniens de 48 ont manifesté massivement contre la répression sanguinaire qui s’est abattue sur leurs frères et sœurs en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, et pour la protection d’al-Aqsa.

Mais avant de souligner les principaux traits de la résistance en Palestine 48 (l’Etat d’Israël), il est important de noter le contexte politique et social dans lequel les Palestiniens se sont soulevés. Politiquement, les accords d’Oslo ont écarté les Palestiniens de 48 du processus politique engagé entre l’Autorité nationale et l’Etat sioniste. Ils ont été considérés comme des « citoyens » israéliens, devant lutter pour l’égalité de leurs droits dans le cadre de l’Etat sioniste. Ce qui signifie que toute la problématique de la colonisation, de la fondation de l’Etat sioniste sur les ruines de la Palestine, du retour des réfugiés, y compris vivant dans le pays, à leurs terres et villages, a été escamotée par les accords d’Oslo, avec la bénédiction du monde arabe et de ce qui s’appelle la communauté internationale. Aux lendemains de ces accords et de l’instauration de l’Autorité palestinienne sur des miettes de territoires en Cisjordanie et Gaza, les Palestiniens de 48 devaient se contenter d’orienter leurs luttes pour réclamer leur citoyenneté dans l’Etat spoliateur et colonial.

Entre les accords d’Oslo et le soulèvement d’octobre 2000, nous assistons à une « israélisation » en surface de cette population : sans espoir de lutte, sans direction politique unifiée sur le plan national et sans perspectives politiques nationales, les Palestiniens de 48 s’organisent localement et régionalement, renforcent les structures des partis arabes dans le but de participer aux élections de la Knesset israélienne, mais avec des programmes nationalistes.

Donc, entre 1994 et 2000, ou même depuis la fin de la première intifada (fin des années 80), les Palestiniens élaborent de nouveaux outils de lutte, autonomes, parfois financés par des ONGs et des Etats soucieux de maintenir la « stabilité » au détriment du droit. Mais c’était sans compter sur plusieurs facteurs ou faits importants : 1 – la nature et l’arrogance de l’Etat sioniste qui profite du climat international qui lui est favorable pour développer ses colonies et rejetter toute concession véritable ; 2 – la victoire de la résistance armée au Liban contre l’occupation sioniste, donnant un élan formidable à tous ceux qui croient à la résistance dans la région. 3 – le piétinement des négociations jusqu’au sommet de Camp David et la rupture, avec le déclenchement de l’intifada al-Aqsa, de ce processus fabriqué et irréel, que ce soit dans le temps ou dans l’espace.

En octobre 2000, les masses palestiniennes de la Palestine de 48 se soulèvent dans plusieurs villes et bourgs arabes, protestant contre la répression et les tueries commises par l’armée sioniste en Cisjordanie et Gaza, et pour défendre la mosquée al-Aqsa, visée par la colonisation : une féroce répression s’abat sur eux, suivie d’une campagne populaire raciste contre leur présence dans leur pays.

Une guerre sourde et ouverte va être menée par l’institution israélienne, officielle, officieuse et ses bras sécuritaires, médiatiques et civils, contre la direction palestinienne de l’intérieur, pour l’abattre avant que son impact sur la société ne s’étende. Le climat ambiant depuis 2000 s’envenime : massacre de Shefa ‘Amr en 2005, campagnes racistes, répression, arrestations, menaces de mort, les masses palestiniennes de l’intérieur se retrouvent devant des défis quotidiens visant à stopper le développement de leur résistance.

De leur côté, les Palestiniens de 48 mènent plusieurs luttes sur plusieurs fronts, avec divers outils :

– Accompagnement de l’intifada al-Aqsa, en s’organisant et apportant leur soutien et aide à la Cisjordanie et Gaza : Sheikh Raed Salah sera arrêté et détenu pendant trois ans, accusé de « soutenir le terrorisme », pour l’aide humanitaire qu’il a mise en place.

– la dénonciation de la nature raciste et coloniale de l’Etat à la conférence internationale de Durban, en 2001. Les organisations palestiniennes de 48 furent les plus actives et les plus dynamiques.

– Les marches pour le retour des réfugiés. Tous les ans, une marche symbolique est organisée pour réclamer le retour des réfugiés, internes également, vers un village « disparu » de la carte. Cette marche se déroule le jour de la proclamation de la naissance de l’Etat sioniste. Il s’agit d’affirmer le droit au retour de tous les réfugiés, vers la Palestine occupée en 1948.

– La résistance au démantèlement du peuple palestinien :

a – liaison interne entre Palestiniens dans la Palestine occupée en 48 d’abord : liaison entre Palestiniens vivant dans les régions différentes. Cette action fut notamment développée par le mouvement islamique de Sheikh Raed Salah.

b – La liaison avec les autres secteurs du peuple palestinien, ceux qui vivent en exil et les camps de réfugiés et ceux qui vivent en Cisjordanie et dans la bande de Gaza pour faire face, au morcellement goégraphique et politique du peuple palestinien. Il est important de noter le rôle primordial des Palestiniens de 48 et de leurs organisations et institutions diverses dans la préservation et le soutien à la population d’al-Quds.

c – la liaison avec les peuples arabes : La déclaration d’Ittijah (union des associations civiles arabes) en 2002 à l’adresse des peuples arabes, à la conférence du Caire, reste un document important pour mesurer le degré de conscience politique atteint par les responsables de l’action civile en Palestine 48 : cet appel distingue entre la nécessité pour les peuples arabes de maintenir le boycott et le refus de la normalisation avec l’Etat sioniste, mais leur tend la main, d’autre part, pour établir des relations directes contre le sionisme et la politique israélienne.

– développement des outils de lutte : Bien que les Palestiniens de l’intérieur possèdent leurs propres partis, certains participant au jeu électoral israélien, d’autres non, tout un arsenal d’associations et d’institutions est fondé pour permettre à la société arabe de se protéger et de se développer.

– La défense de la terre, la lutte contre la judaïsation, la préservation des lieux palestiniens, saints et profanes.

– Elaboration de charte et documents sur l’avenir et la place des Palestiniens dans l’Etat sioniste : Plusieurs documents ont été rédigés et discutés au sein de la société palestinienne de l’intérieur, allant de la demande des droits égaux dans le cadre d’un Etat sioniste à ceux de la citoyenneté entière dans le cadre d’un Etat israélien, débarrassé de l’idéologie sioniste. Cependant, beaucoup émettent des critiques vis-à-vis de ces documents, qui ne prennent pas en compte, de manière sérieuse et profonde, la question du retour des réfugiés et la nature coloniale de l’Etat.

Suite à la guerre israélienne contre le Liban en juillet-août 2006 et la défaite israélienne qui a suivi, nous assistons à une exacerbation de la tension, entre, d’une part, l’institution israélienne représentée par tous ses organismes, politiques, sécuritaires et civils, et d’autre part, les Palestiniens de l’intérieur, représentés par leurs partis et institutions. Au moment de la guerre, les Palestiniens de l’intérieur ont clairement affirmé leur refus d’être embarqués dans le même navire que la société israélienne, traçant une ligne de démarcation très nette entre eux et les Israéliens, même si les fusées du Hezbollah touchaient leurs quartiers ou leurs maisons. D’ailleurs, ils ont accusé l’institution militaire sioniste de les utiliser comme boucliers humains, puisque les installations militaires israéliennes se trouvent sciemment près des villages arabes. Lors de la guerre israélienne contre Gaz (décembre 2008-janvier 2009), ils ont massivement affirmé leur soutien total à leur peuple, montrant leur dynamisme et l’indépendance de leur volonté, loin des influences de l’Autorité palestinienne et des régimes arabes.

L’institution israélienne frappe un coup, en expulsant Azmi Bishara, prétendant vouloir le juger pour ses prises de position nationales et nationalistes en faveur de la résistance, en Palestine et au Liban. Les attaques des colons se multiplient contre leur présence : à Akka, en 2008, à Umm al-Fahem, en 2009 mais les Palestiniens résistent.

Alors que les accords d’Oslo avaient consacré la division et le démantèlement du peuple palestinien, écartant les palestiniens de l’intérieur et leur fixant pour ultime but celui de se battre pour l’égalité de leurs droits en tant que citoyens dans l’Etat sioniste, nous assistons à présent à une remise en cause, à nouveau, de la nature coloniale de l’Etat d’Israël : il ne s’agit pas de réclamer des droits égaux ou de vivre à égalité avec des colons sur les ruines de la Palestine et des Palestiniens. Si les Palestiniens de 48 sont considérés comme une minorité, c’est bien parce que les autres Palestiniens ont été expulsés ; s’ils sont considérés comme une population marginalisée et effritée par les sionistes, c’est parce qu’ils ne sont pas reconnus en tant que peuple, faisant partie d’un peuple, par un colonialisme et une colonisation de peuplement qui l’ont nié, intrinsèquement. Il n’y a donc pas seulement la question de l’égalité dans une société coloniale, ce que d’ailleurs l’Etat sioniste est incapable d’appliquer, mais une colonisation de peuplement qui rend toute solution dans le cadre d’un Etat colonial et colonialiste, une « solution » viciée et de courte durée.

C’est à partir de là que nous pouvons comprendre les récentes propositions de lois contre leur présence et leur expression autonome. Les médias dans l’ensemble s’accordent pour dire que la demande israélienne de reconnaître Israël en tant qu’Etat juif vise la présence palestinienne de l’intérieur. Ce qui est vrai, mais très peu de médias éclairent la manière dont les Palestiniens ripostent et résistent à ce danger. Il est temps de leur donner la parole, de transmettre leurs luttes et expériences pour éviter de faire croire que là aussi, c’est Israël qui décide et qui a tous les pouvoirs. Car même en plein cœur de l’Etat sioniste, les Palestiniens peuvent empêcher, par leurs luttes, les sionistes de triompher.

4 – Après 2000 : une nouvelle stratégie

Il est indéniable que la victoire de la résistance islamique et nationale au Liban en mai 2000 ayant libéré les zones occupées à partir de 1978 a eu un impact important sur le déclenchement de l’intifada al-Aqsa. C’est pourquoi nous pouvons dire que l’an 2000 représente une nouvelle aube pour la résistance contre l’occupation sioniste.

Nous nous arrêterons sur deux dates, depuis l’intifada al-Aqsa, celle de la bataille du camp de Jénine suivie du massacre en avril 2002, puis la résistance dans la bande de Gaza lors de la guerre en décembre 2008-janvier 2009.

La bataille du camp de Jénine

Dès le début de l’intifada al-Aqsa, le camp de Jénine (entre 10 et 13 mille habitants) participe activement au soulèvement, et à cause de la présence massive et organisée de la résistance armée, les dirigeants israéliens l’appellent «nid de guêpes », mais aussi « citadelle des « terroristes » », parce que plusieurs combattants, ayant mené des opérations martyres en Palestine occupée en 48 (Israël) sont originaires de la région de Jénine, camp et villages autour. Dans le camp, les organisations de la résistance se partagent les membres des mêmes familles parfois : Fateh, Hamas, Jihad islamique, FPLP, FDLP, pour ne parler que des organisations ayant des branches armées, mais il faut noter une présence importante du Jihad islamique et de sa branche armée, Saraya al-Quds.

La résistance du camp de Jénine a duré du 2 au 12 avril 2002, soit dix jours. Les forces israéliennes pensaient pouvoir détruire la résistance en deux jours, au début, puis en six jours. Mais la bataille ne s’est arrêtée que lorsque les combattants ont épuisé toutes leurs munitions. Près de 300 combattants ont défendu un km2 (superficie du camp) contre l’armée la plus puissante de la région, qui a fait participer ses chars, ses hélicoptères, ses compagnies d’élite, ses bulldozers et ses snipers.

Géographiquement parlant, le camp était difficile à défendre . Malgré cela, la résistance a tenu. Les deux premiers jours, les combattants ont repoussé six tentatives d’invasion. Sur tous les axes, les chars israéliens ne pouvaient pas avancer. Les dirigeants militaires de la résistance demandent à la population de quitter le camp, pour se protéger, mais celle-ci refuse, dans sa majeure partie. Les combats se déroulaient de maison en maison et les combattants ont percé les murs entre les maisons pour pouvoir se déplacer, alors que les chars israéliens, eux, avançaient vers les maisons, les écrasant les unes après les autres. Les résistants avaient, avant le début de la bataille, mis des charges explosives partout : le camp entier était piégé, à commencer par l’entrée de ses ruelles. La préparation de la bataille n’avait pris qu’une dizaine de jours, entre la dernière tentative d’invasion et le 2 avril. Les responsables des branches armées se sont réunis, ont coordonné les tâches et se sont partagés les axes. Les armes et les charges explosives ont été rassemblées. Les tâches ont été réparties, dans les quartiers, pour assurer les vivres, soigner les blessés ou les transporter vers l’hôpital où des médecins et infirmiers ont été désignés pour les permanences.

Dans la description de la bataille du camp de Jénine, il est nécessaire d’insister sur l’esprit d’unité : unité entre les diverses branches armées et des organisations, unité entre combattants et population, unité entre le camp et son environnement, et notamment les villages. Le symbole de cette unité est le martyr Abu Jandal, membre de la sécurité nationale de l’Autorité, de son vrai nom Youssef Kubbaha Frayhat, qui a joué un rôle essentiel dans la défense du camp. Militaire de formation, connaisseur dans l’art de la guerre, il a apporté une contribution remarquable dans la préparation et le déroulement de la bataille. Tout le camp et toutes les organisations de la résistance honorent sa mémoire en tant que membre du Fateh et résistant. Il a su désobéir aux ordres de sa direction politique et militaire et rejoindre la résistance. Il avait également sous ses ordres directs plusieurs membres de la sécurité.

Il faut également insister sur l’âge de ces combattants : jeunes pour la plupart, ils avaient à peine 25 ans. La biographie du dirigeant des saraya al-Quds, branche armée du jihad, le martyr général Mahmoud Tawalbeh, peut aider à mieux comprendre qui étaient ces jeunes ayant décidé de se battre jusqu’au bout. Né le 19/3/1979 dans le camp de Jénine (il n’a connu que l’occupation dès sa naissance), il étudie dans les écoles de l’UNRWA avant de commencer à travailler, pour aider son père à nourrir la famille. Il est arrêté au cours de la première intifada, âgé entre dix et douze ans, pour quelques jours. Après les accords d’Oslo, il va travailler en Palestine occupée, à Haïfa et à Nazareth. Dès le début de l’intifada, il arrête son travail et se consacre entièrement à la résistance, rejoignant le Jihad islamique, puis Saraya al-Quds. Dirigeant des Saraya, il est responsable de plusieurs opérations martyres en Palestine occupée. Un an après la bataille et le massacre, les enfants du camp de Jénine continuent à chanter ses exploits.

Au cours de la bataille, 23 soldats et officiers israéliens ont été tués, selon les sources officielles sionistes, plus d’une dizaine avaient été piégés par la résistance : ils furent entraînés puis encerclés par les résistants avant qu’ils ne s’abattent sur eux. Du côté des combattants palestiniens, 25 ont été tués et 27 faits prisonniers. Du côté des civils palestiniens, le massacre a fait périr plus d’une soixantaine, des familles entières ont été ensevelies sous les décombres par les bulldozers qui, par rage, détruisaient les maisons sur leurs occupants. Les familles déplacées se comptent par centaines, vers les villages voisins ou la ville de Jénine. Les Palestiniens arrêtés, de tout âge, s’élevaient à environ 1500. La barbarie israélienne a été exposée dans toute son horreur au cours de cette bataille qui a duré dix jours. Il a fallu des mois pour déblayer et reconstruire les quartiers détruits, pour que les familles déplacées réintègrent le camp.

Nous pouvons dire que la bataille et résistance du camp de Jénine ont préparé celles de Beit Hanoun, en 2006 et celles de Gaza, en 2008-2009, dans des aspects décisifs : décider de résister malgré tous les moyens de l’ennemi et se préparer à la bataille (ce qui fut remarquablement organisé à Gaza, avant la guerre meutrière lancée par l’armée israélienne en décembre 2008). Comme elle inaugure une nouvelle étape, caractérisée d’une part par la sauvagerie de plus en plus marquée de l’occupant et d’autre part, la décision de tenir le plus longtemps possible, malgré les pertes humaines.

La bataille du camp de Jénine a été une épopée, et le massacre qui a suivi une tragédie insoutenable. Comme pour les guerres israéliennes qui suivront (Beit Hanoun, Liban, Gaza), elle va dévoiler le camp des « modérés » arabes et palestiniens, ceux qui mettent en avant les pertes humaines et matérielles pour justifier leur dénonciation de la résistance et railler les armes de la résistance, vivant toujours dans la crainte d’Israël et de ses protecteurs et n’ayant pas tiré les vraies leçons de la libération du sud-Liban.

Guerre génocidaire et résistance à Gaza (2008-2009)

Les sionistes ont préparé leur guerre contre Gaza, la résistance et la population, pendant plusieurs années, soit depuis leur retrait unilatéral qu’ils ont conçu comme une défaite de la résistance. Mais après l’échec de la tentative du coup d’Etat des services de sécurité liés à l’Autorité palestinienne et au général américain Dayton, la date de la guerre contre la résistance n’attendait que le moment propice, lorsque la trêve (jamais appliquée par les sionistes, d’ailleurs) n’a pas été renouvelée par la résistance à Gaza.

Au cours de cette guerre meurtrière, où l’armée sioniste a utilisé toutes sortes d’armes, prohibées ou non, par mer, air et sol, où elle s’est acharnée sur une population emprisonnée depuis plusieurs années sur quelques kilomètres carrés, où elle a commis les pires atrocités envers les civils, surtout, au cours de cette guerre, la résistance a tenu, enregistrant une fois de plus une victoire fracassante. Les sionistes pensaient pouvoir effacer Gaza de la carte en quelques jours. Ils avaient reçu l’aval des puissances internationales, Etats-Unis en tête, et des régimes arabes qui leur sont inféodés. Mais la ténacité de la population et de sa résistance à Gaza ont obligé l’ennemi à poursuivre la guerre pendant 22 jours. Comme au Liban en 2006, l’armée sioniste a subitement commencé par commettre ses massacres en utilisant son aviation terrible qui ont déversé leurs munitions les plus meurtrières indistinctivement sur les quartiers, les hôpitaux, les écoles, les mosquées, voulant faire un effet de surprise et déstabiliser la résistance. Elle échoue, car la résistance et la population reprennent vite leurs esprits et se préparent, dans les décombres, à la défense. Lorsque l’armée sioniste découvre que son aviation ne parviendra pas à détruire la résistance, qui poursuit ses attaques des fusées, sur des cibles de plus en plus éloignées dans l’Etat sioniste, elle décide d’entreprendre une attaque terrestre. Mais après deux semaines de bombardements aériens et terrestres, les sionistes ne peuvent entrer dans Gaza, à l’exclusion de quelques mètres, là où le terrain est entièrement à découvert et rasé.

Tout au long de ces 22 jours de résistance, les combattants de toutes les formations politiques, mais essentiellement du Hamas, bien armés et entraînés, grâce à la solidarité effective de l’Iran et du Hezbollah, entre autres, parviendront à repousser toutes les attaques terrestres, essayeront de kidnapper des soldats sionistes, tous équipés d’appareils de détection pour parer à cette éventualité et continueront à lancer les fusées sur les villages et villes colonies de l’Etat sioniste. Les instances internationales, l’ONU et le conseil de sécurité en premier, sont de plus en plus inquiets, car elles avaient accepté de donner un délai à l’Etat sioniste pour commettre ce crime, mais ce délai s’allonge au-delà de toutes les attentes. Sous la pression des peuples libres du monde, Israël est obligé de mettre fin à sa guerre, sans avoir réussi ni à démanteler la résistance, ni à détruire le moral et l’idée de résistance contre sa présence dans la région, malgré les massacres, les destructions et les crimes contre le genre humain que l’Etat sioniste a commis.

Dans cette guerre, Israël a massacré près de 1500 Palestiniens, décimé des familles entières qui étaient déjà soumises à un blocus meurtrier (en deux ans, 300 personnes tombent martyres faute de pouvoir se faire soigner) et blessé plus de 5500 personnes. Plus de 22.000 bâtiments ont été entièrement ou partiellement détruits, dont 67 écoles. Au cours de cette guerre génocidaire, aucun frein, ni moral, ni politique, ni diplomatique, ni religieux, ni humain, n’a fait hésiter les soldats sionistes à tuer, tuer, et encore tuer. Ils ont montré jusqu’où pouvait aller leur bestialité.

Malgré ces massacres et ces destructions, nous pouvons, sans aucune hésitation, affirmer que la résistance a triomphé, parce qu’après le 22ème jour, lorsque les armes se sont tues, elle est toujours là, pouvant à nouveau frapper le cœur de l’entité sioniste quand elle le jugera nécessaire, parce que la population meurtrie de Gaza réclame justice, supporte dans la dignité tous les malheurs qui l’ont frappée et reste confiante dans sa résistance, parce que les sionistes ont subi une défaite morale, politique et diplomatique incomparable depuis la naissance de cet Etat spoliateur, parce que le mal qui ronge la société israélienne depuis sa naissance inique a fini par la pourrir et elle ne peut plus désormais se regarder en face, lancée qu’elle est dans la course vers sa destruction. La résistance à Gaza est sortie victorieuse car les peuples libres du monde portent désormais le sort de la bande de Gaza et au-delà, de la Palestine, grâce à la résistance de ses combattants et de son peuple, comme une question essentielle devant la communauté internationale.

Au cours de cette guerre génocidaire, les camps se sont encore plus démarqués dans le monde arabo-musulman : il y a d’une part, ceux qui utilisent les massacres et les destructions pour baisser encore plus les bras et faire porter à la résistance et au choix de la résistance la responsabilité des crimes israéliens, et de l’autre, ceux, majoritaires, qui portent et sont prêts à assumer le choix de la résistance, seule capable de nous libérer à tout jamais de cette entité spoliatrice et contre-nature qui s’appelle Israël.

Conclusion :

A partir de cet éclairage partiel, où nous avons insisté sur la résistance armée, nous pouvons esquisser quelques conclusions et remarques :

1 – la résistance armée a toujours été un choix prioritaire dans la lutte palestinienne et le fait d’armer la résistance une attitude stratégique de la part des peuples et/ou des régimes arabes. Après la proclamation du plan de partage de la Palestine, en 47, Hajj Amin al-Hussaynî se rend dans les pays arabes pour collecter des armes. Au Liban, avant 48, c’est le député et martyr, Maarouf Saad, qui se charge de rassembler les armes pour la résistance en Palestine. A Gaza, s’il n’y avait pas eu d’armes, suffisantes passées par différentes manières, dans les tunnels ou autres, la résistance n’aurait pas pu se défendre contre l’invasion.

2- Depuis le début de l’invasion sioniste et l’occupation britannique, l’équilibre des forces militaires a toujours été du côté des agresseurs. Avant de quitter la Palestine, l’armée britannique livre son armement aux forces sionistes et l’Etat d’Israël, super-armé par les puissances occidentales, devient rapidement la première puissance militaire dans la région, au côtés de l’Iran du shah. Cette puissance militaire va susciter, notamment après 1967, un sentiment d’impuissance parmi les peuples et les régimes arabes, qui n’oseront plus affronter Israël. C’est d’ailleurs ce qu’il cherche. Ses guerres prennent les traits suivants : – guerres éclair, comme en juin 1967, où des puissants coups sont menés au début, pour paralyser l’adversaire, incluant massacres de populations civiles. – guerres dans le territoire des adversaires, avec une sécurité presque absolue pour ses colons. C’est pourquoi la résistance, pour pallier à sa faiblesse armée, axera son action dans deux directions : allonger le temps de la confrontation, autant que possible, et frapper le front interne israélien, pour instaurer ce qui s’appelle « l’équilibre de la terreur ». Lors des actions de la résistance, avant 1982, à partir des camps du Liban, il s’agissait de frapper le front interne, les colonies situées à la frontière, et même lors de l’opération de Dalal al-Moghrabi, résister le plus longtemps possible à l’intérieur de la Palestine occupée. Mais c’est à partir de la résistance islamique au Liban, dans les années 90, que les choses vont changer lorsque la résistance fait pleuvoir ses fusées sur les colonies situées à la frontière et instaurer l’équation : colonies contre population civile au sud-Liban. Les colonies seront visées par les fusées si la population civile au sud-Liban est touchée.

Avec l’Intifada al-Aqsa et les opérations à l’intérieur même de l’Etat sioniste, c’est une nouvelle phase qui commence, où l’intérieur sioniste n’est plus en sécurité. C’est d’ailleurs le but de la résistance : susciter une instabilité permanente.

Les guerres de juillet-aout 2006 contre la résistance au Liban et en décembre-janvier 2009 contre la résistance à Gaza marqueront plus nettement le déroulement du conflit : d’une part, ce furent des guerres très longues pour l’armée sioniste, ensuite, le front intérieur a été fortement ébranlé par les fusées qui ont été lancées en plein cœur de l’entité.

Pour la première fois depuis sa création, l’Etat colonial craint pour son propre front, pour ses colons et leur sécurité. Ce ne sont pas des armées étatiques qui ont bouleversé la situation, mais des organisations qui mènent une guerilla, dont l’armement est loin d’égaler celui de l’occupant, mais qui comptent surtout, après leur confiance en Dieu, sur l’élément humain : son moral, la justesse de sa cause, sa détermination à vaincre, et qui comptent aussi sur leur aptitude, leur armement, les masses qui les soutiennent dans le monde arabe et musulman, mais aussi des Etats qui croient en la justesse de leur cause.

Une telle résistance, parce qu’elle n’est pas dépendante du jeu de l’équilibre des forces (bien qu’elle en soit consciente et sait le mesurer) dans le monde, et n’est dépendante ni d’un Etat, ni d’un pouvoir, parce qu’elle accomplit le rêve de millions d’Arabes et de musulmans, parce qu’elle se sent poursuivre ce que d’autres ont commencé, parce que son but est de libérer la Palestine, du fleuve (Jourdain) à la mer (Méditerranée) et non pas juste de modifier la situation sur le terrain pour s’engager dans des négociations, une telle résistance ne peut que creuser le fossé entre deux camps : d’une part, celui de la capitulation, qui refuse de changer l’état de fait, qui se soumet à l’injustice et à l’humiliation, arguant son incapacité à pouvoir modifier les choses, et qui s’appuie de plus en plus sur les puissances impériales et coloniales pour le maintenir en vie et en place, et d’autre part, celui de la liberté et de la fierté retrouvées et surtout de l’espoir avec en perspectives, beaucoup de sacrifices encore, jusqu’à la libération de la Palestine et des peuples arabes.

Raghida Ousseiran

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