AccueilDossiersRévolution palestinienneLes pressions exercées par l’occupation ne peuvent briser la volonté du peuple palestinien » Comité Action Palestine 23 avril 2014 Révolution palestinienne 2 706 vues Ziad Nakhale, secrétaire général adjoint du mouvement du Jihad islamique en Palestine Dans une interview accordée au quotidien arabe « al-Quds al-Arabi » publié à Londres, le secrétaire général adjoint du Mouvement du Jihad islamique en Palestine dénonce la « coordination » sécuritaire entre l’Autorité palestinienne et l’occupant. Le 19 avril 2014 Q. M. Ziad Nakhale, certains ont jugé que l’ajout de votre nom sur la « liste du terrorisme » au moment où les mouvements islamistes affirment leur présence dans la région vise le projet de la résistance. Quelles sont les conséquences d’une telle catégorisation que certains régimes arabes adoptent, comme c’est le cas récemment en Egypte concernant le mouvement Hamas ? R. Il n’est pas étonnant que l’administration américaine prenne de temps à autre des mesures visant la résistance. Que ce soit sur le plan moral ou pratique. Mais qu’une grande puissance nomme un individu et le classe dans ce qui est appelé « la liste du terrorisme », cela a suscité étonnement et surprise parmi les hommes d’opinion et les observateurs. Ce qui nous intéresse, c’est de savoir si une telle décision aura un impact ou modifiera quelque chose ? Je ne suis pas le premier et ne serai pas le dernier dans ce qu’ils appelle les listes du terrorisme. Si nous allons plus loin, je peux dire : les Etats-Unis considèrent terroriste toute personne qui est en désaccord avec elle ou avec sa politique, et même des Etats et de nombreuses organisations ont été mises sur les listes des terroristes, et tout cela pour servir « Israël ». Q. La recrudescence des assassinats commis par « Israël », est-ce que vous y voyez un lien avec les tentatives américaines coordonnées avec des parties palestiniennes pour imposer une solution quelconque ? R. l’intensification de l’agression contre notre peuple palestinien n’a jamais cessé, même pas un jour, mais elle prend des formes différences en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, comme les meurtres, le blocus, la destruction, les arrestations et autres. Elle vise à plonger le peuple palestinien dans le désespoir et à lui dire que l’occupation est son sort final, que la résistance est interdite et illégale, et que le seul espoir qu’il peut caresser est ce que Israël lui propose à la table des négociations, dans le cadre de l’équilibre de forces actuel. Ce qui veut dire être soumis à des directives israéliennes, avec une collaboration américaine et un parti-pris total envers Israël. Les Etats-Unis oublient, ainsi que le monde, que les pressions militaires, politiques et économiques, ne peuvent briser la volonté du peuple palestinien et ne changeront rien à la réalité, et ne pourront obliger personne à accepter n’importe quelle solution. En réalité, il n’y a rien pouvant être nommé solution, car Israël ne veut pas de solution, il veut tout. Q. Gaza a pris une bouffée d’air après l’arrivée du président Mohammad Morsi au pouvoir, et après son écartement, la question du blocus est devenue une matière de chantage envers les Palestiniens de Gaza. Que pensez-vous du rôle égytien quant à la levée du blocus contre Gaza ? R. La situation complexe en Egypte et les événements qui se bousculent jusqu’à présent ont mis la bande de Gaza en situation de victime à tous les niveaux, mais il faut savoir que la punition collective contre le peuple palestinien à Gaza est injuste et illégale, quelles qu’en soient les raisons. Les frères égyptiens doivent revoir les mesures prises qui occasionnent des préjudices au peuple palestinien, qui, de son côté, porte beaucoup d’amour et de reconnaissance au peuple d’Egypte. Ne savent-ils pas qu’ils mènent un blocus contre le sang des martyrs égyptiens tombés pour défendre la Palestine, et leurs tombes à Gaza témoignent encore de l’histoire grandiose qui lie le peuple d’Egypte au peuple de Palestine ? Malgré cela, nous, les organisations nationales et islamiques à Gaza, nous sommes prêtes à nous asseoir avec les frères en Egypte et à ouvrir le dossier des relations, sans limite aucune, pour mettre fin à ce qui brouille la relation entre les deux peuples frères. Q. Est-ce que la décision prise en Egypte considérant les frères musulmans comme une « organisation terroriste » sort l’Egypte de sa crise ? R. L’Egypte est le plus vaste des Etats arabes et vit des problèmes complexes qui touchent tout le peuple égyptien, et le fait d’éloigner un groupe et notamment un groupe de l’importance des Frères musulmans, de la vie politique, accentue les problèmes et installe l’Egypte dans une situation instable. Cela accentue sa crise et son état mouvementé qui caractérise l’Egypte depuis quelques années, qui a par ailleurs entraîné la suppression d’une partie aussi importante que les Frères. Je ne pense pas que ce soit la voie la plus sûre pour sortir l’Egypte de sa crise et pour qu’elle puisse reprendre son rôle et sa place, que tout le monde attend. Q. Comment voyez-vous l’affrontement des tentatives américaines, sur le plan palestinien, visant à faire admettre le projet de la « reconnaissance de la judéité » de l’Etat « israélien » ? R. Les tentatives américaines pour imposer une solution pro-israélienne au peuple palestinien et à la région ne se sont jamais arrêtées. Ces tentatives ont toujours échoué, et elles reprennent à nouveau. A présent, les Etats-Unis essaient, dans le cadre de ce qui est appelé « le printemps arabe » de profiter de l’état de dispersion généralisée dans la région pour imposer une solution faisant d’Israël un Etat religieux dans tout le sens du terme. Mais cela n’est qu’une introduction à la dislocation de la région sur une base confessionnelle et religieuse, et instaurer le droit de chaque confession ou religion ou nationale de réclamer un Etat spécifique. C’est le projet de dislocation de ce qui fut appelé la patrie arabe. De plus, l’Etat juif en tant que tel sera la bombe qui mettra fin et pour toujours au projet ou l’idée d’instaurer un Etat palestinien. Sera expulsé de la terre historique de Palestine tout ce qui n’est pas juif, d’autant plus que nous remarquons la masse imposante de la colonisation qui se répand comme un cancer en Cisjordanie et qui pille la terre au vu et au su de « la légalité internationale », y compris les Nations-Unies et le conseil de sécurité. L’Etat juif signifie en fin de compte que la Palestine, toute la Palestine, est une patrie pour les juifs du monde, et qu’il n’y a pas de peuple palestinien sur la terre de Palestine. De là vient l’idée de la patrie alternative proposée par « Israël » à l’Est de la rive du Jourdain pour le peuple palestinien. Q. La campagne de judaïsation d’al-Quds s’intensifie alors que l’Autorité palestinienne continue à parler d’occasions pour parvenir à un accord ou semi-accord. Ne faut-il pas plutôt réclamer l’unité palestinienne pour affronter un tel projet ? R. Non seulement al-Quds est en train d’être judaïsé, mais tout est devenu sous la domination « israélienne », le cancer de la colonisation se répand comme des champignons tout au long de la Cisjordanie et il ne reste aux Palestiniens que les villes peuplées, qui sont toutes encerclées par les colonies et séparées les unes des autres. La politique du fait accompli se poursuit. Les négociations et leur prolongement ne sont que des moyens pour gagner du temps pour que l’on arrive à l’étape du fait accompli. Que ferons-nous des juifs qui se sont installés et qui ont colonisé, qui ont leurs villes, leurs écoles, leurs hôpitaux et leurs usines ? Pouvons-nous les expulser ? Quiconque le réclamera sera taxé d’inhumain. Les accusations sont prêtes, celui qui refuse sera accusé de terrorisme et poursuivi, à commencer par l’Autorité palestinienne, et pour finir les Etats-Unis et entre les deux, les Arabes et les non-Arabes. Il est regrettable que l’Autorité palestinienne soit associée directement à ce qui se passe, elle brouille les cartes en acceptant sans cesse de poursuivre les négociations, qui n’amènent à rien, sinon un surplus de négociation et de division interne. A propos, je ne dis pas que la fin de la division interne mettra fin à la colonisation, mais je dis que l’unité palestinienne véritable sera un pas pour affronter à nouveau et avec sérieux les projets illusoires et pour rechercher les moyens et les possibilités qui permettent de dévoiler les illusions de règlement ou de paix avec cette entité, et pour commencer à bâtir un projet de résistance qui s’étend pour inclure tout le monde arabo-musulman et les êtres libres de ce monde, et remettre les droits à leurs possesseurs légaux. Q. Les positions arabes semblent indifférentes envers la situation palestinienne. Quels sont les leviers pouvant être utilisés par les Arabes pour soutenir le peuple palestinien et renforcer sa résilience ? R. Oui, il y a à présent une indifférence arabe manifeste, qui n’a pas besoin de preuves. Mais je pense que nous, les Palestiniens, pouvons changer cette réalité, en nous unissant et en agissant, et en empêchant quiconque de prendre pour prétexte la situation palestinienne pacifique ou attentiste pour justifier son attitude en disant « nous sommes avec ce que décide le peuple palestinien ». Décidons nous-mêmes et nous verrons si les peuples arabes et les peuples du monde seront à nos côtés et soutiendront nos droits. Q. Comment jugez-vous les répercussions de la coordination sécuritaire sur l’action palestinienne, et notamment sur le Jihad islamique ? R. Ce qui se passe en Cisjordanie, et la pratique de l’Autorité, les arrestations et la répression qui vise les activités estudiantines, et même les actions humanitaires en direction des familles des prisonniers et des martyrs, non seulement envers le Jihad islamique, bien qu’il soit le plus visé, tout cela est affligeant et dégradant lorsque ceci se déroule sous le chapitre de la coordination sécuritaire avec les forces de l’occupation et au profit total d’Israël, et sans aucune compensation, au contraire. « Israël » pratique ce qu’il veut, sans aucun frein, il confisque les terres, mène des incursions dans les villes, assassine et arrête toute personne qu’il juge menaçante pour sa sécurité. La question n’est pas seulement liée au Jihad islamique, mais c’est le rôle assigné à l’Autorité par les accords d’Oslo, où elle a accepté d’être le gendarme qui protège « Israël », en situation d’occupation. Q. Où en est le dossier de la réconciliation palestinienne, et que rôle joue le mouvement du Jihad islamique pour rassembler la maison palestinienne ? R. Malgré la blessure dont souffre le peuple palestinien du fait de la division interne, je refuse de comparer entre l’Autorité de Ramallah et ce qui se dit à propos de l’Autorité à Gaza, par principe. Nous avons de grandes divergences avec l ’Autorité de Ramallah, nous lui sommes opposés concernant les accords d’Oslo, qui a fait une concession historique au détriment du droit du peuple palestinien sur la Palestine, et nous sommes en désaccord avec elle sur la gestion de sa politique avec l’ennemi, à tous les niveaux, et notamment en ce qui concerne la coordination sécuritaire au détriment de la résistance et du peuple palestinien. Quant à l’Autorité de Gaza, si nous pouvons ainsi l’appeler, nous sommes d’accord avec elle sur le plan stratégique, mais en désaccord en ce qui concerne les relations inter-palestiniennes et sa gestion. Nous avons essayé et essayons toujours de réunifier la société palestinienne, de manière à préserver l’unanimité et l’unité de la position politique, l’unité des forces de notre peuple pour affronter le projet sioniste, par tous les moyens possibles, de manière à poursuivre la résistance et ne pas reconnaître « Israël ». Q. Concernant la dernière confrontation à Gaza que vous avez nommée « Briser le silence », quel est le message que vous avez voulu envoyer à l’occupation ? R. Tout le long de l’année qui a suivi la guerre d’agression sur la bande de Gaza en 2012, « Israël » n’a pas cessé les agressions et les assassinats en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, malgré l’accord de cessez-le-feu qui a suivi cette guerre, qui a eu lieu sous l’égide de l’Egypte, et qui a obligé « Israël » à cesser les assassinats. Mais comme d’habitude, « Israël » n’a pas respecté l’accord. La résistance a dû envoyer un message fort à l’ennemi lui disant que nous n’acceptons pas ces agressions. Ce fut l’opération « Briser le silence », qui a été choquante à plus d’un titre. C’est ce qu’ont affirmé les responsables politiques et les médias en « Israël », ce ne fut pas seulement une opération qui a brisé le silence mais un choc et une surprise. Q. Comment jugez-vous votre attitude envers la crise syrienne ? R. La Syrie est la grande blessure, qui devient au fur et à mesure que les jours passent le souci quotidien de tout Palestinien et arabe. La Syrie, qui était un axe essentiel dans la confrontation au projet sioniste, et une base essentielle pour la résistance tout au long de son histoire, est devenue aujourd’hui une réelle menace pour tout ce qui est beau et prometteur pour la nation, à cause des dangers qui guettent. Personne ne peut affirmer aujourd’hui que la future Syrie ne représente pas, au moins, un danger pour l’unité de la nation. Nous sommes très inquiets et l’avenir de la Syrie nous préoccupe incessamment, tout comme nous préoccupe ceux qui la poussent vers l’inconnu. C’est pourquoi nous avons dit dès le début que l’avenir de la Syrie doit être déterùiné par son peuple, dans toutes ses composantes, de manière à ce qu’elle reste unie et forte, et assure les intérêts du peuple syriens, sa liberté et sa dignité, et maintient sa situation exceptionnelle dans l’axe de la résistance. Ce sont les constantes de notre position concernant la crise syrienne, et nous pensons qu’elles sont assez équilibrées pour protéger notre peuple dans ce cher pays, et assurer que la Syrie demeure puissante pour affronter le projet sioniste qui vise son démantèlement et le démantèlement de toute la région. Q. Certains jugent que votre alliance avec l’Iran n’est pas dans l’intérêt de la résistance. Comment jugez-vous cette alliance ? R. Ma cause principale et centrale est la Palestine, ma patrie perdue et envahie. Quant à ceux qui considèrent l’Iran comme une menace concernant d’autres dossiers, la solution à notre avis n’est pas la guerre mais le dialogue et l’entente. Qui doit être prioritaire pour réaliser une réconciliation et la paix ? « Israël » ou l’Iran ? La relation historique avec l’Iran se transforme parfois en accusation, et parfois en atout, et la question devient de plus en plus urgente du fait de nombreux éléments. Mais ce qui m’intéresse en cet instant est une autre question : est-ce que l’Iran représente une menace ou une chance pour la nation ? Cela réclame de nombreuses questions, telles que : la relation avec « Israël » qui occupe la partie la plus importante de notre région arabe constitue-t-elle une menace ou une chance ? la relation avec les alliés d’Israël est-elle une chance ou une menace ? C’est pourquoi j’affirme que notre relation avec l’Iran est une chance pour la nation, en vue de renforcer et consolider sa position pour affronter le projet sioniste qui occupe la Palestine. Ceux qui critiquent notre relation avec l’Iran doivent nous dire si leurs relations avec les Etats-Unis et « Israël » qui occupe notre terre et domine nos lieux saints sont au profit de la nation ou du peuple palestinien ? Ou bien ce n’est qu’une légalisation de l’occupation, afin que la Palestine demeure à tout jamais « Israël ». print