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Comité Action Palestine, 2 juillet 2022

A l’occasion du procès de trois policiers inculpés d’homicide involontaire dans le meurtre d’Amadou Koumé en 2015, qui succomba d’une « asphyxie mécanique lente » des suites d’une clé d’étranglement, le Comité Action Palestine revient dans ce court article sur cette violence d’Etat qui frappe depuis trop longtemps les classes populaires. La violence policière est l’ultime recours d’une société qui cherche à maintenir un ordre social injuste. Face à cette injustice républicaine, il ne reste qu’une seule voie : la mobilisation de tous les concernés pour résister à l’oppression.

Au tribunal de Paris, ce 28 juin 2022, c’est le deuxième jour du procès de trois policiers jugés pour « homicide involontaire. La victime : Amadou Koumé. L’avocat de ce dernier pose une question simple et précise : pourquoi aucun geste de premier secours n’a été réalisé alors que la victime était inconsciente ? Le policier ayant constaté le premier l’absence de pouls chez Amadou Koumé répond : « mes collègues ont pensé que c’était du bluff » ! S’il n’y avait pas de victime dans cette histoire, on aurait mis cette réponse sur le compte de la bêtise policière et ri au dépend de cette bande des gardiens de l’ordre. Mais Amadou a été abandonné, agonisant de nombreuses minutes sans que le SAMU soit appelé, sans le moindre geste de secours porté. Et dans ces circonstances, le juge d’instruction n’a pas considéré nécessaire de poursuivre les policiers pour « non-assistance à personne en danger ». Traduction : un Arabe ou un Noir inconscient et sans pouls est un bluffeur jusqu’à preuve du contraire. Circulez y’a rien à voir. Rappelons qu’Amadou, étranglé par la police pendant plus de six minutes, a été asphyxié jusqu’à la mort, lors d’une intervention dans un bar où 16 policiers ont voulu maîtriser un homme noir en grande détresse psychologique en raison de problèmes de santé connus.  Amadou Koumé n’a, à aucun moment, présenté de geste ou parole violents envers les personnes présentes au bar ce jour-là. Le bon sens aurait voulu qu’on appelle des médecins ou les pompiers. Là où la crise psychotique du bourgeois dépressif conduit à une prise en charge médicale, les classes populaires ont droit à la clé d’étranglement. Police républicaine ? Justice dites-vous ? Ces pratiques brutales, présentées comme exceptionnelles, sont pourtant subies au quotidien par les jeunes des quartiers populaires.

Amadou vient rejoindre la liste déjà longue des victimes de violences policières. Comme tant d’autres avant lui, il a été victime deux fois de la violence d’Etat : une première fois de la part de la police, une deuxième fois de la part de la justice. Cette violence s’abat sans pitié sur les habitants des quartiers populaires, une population pauvre et issue des anciennes colonies françaises. Le racisme d’Etat tue dans les quartiers populaires, tue des Noirs et des Arabes, tue sans espoir de justice pour les victimes et leurs familles qui expérimentent depuis trop longtemps ce fruit pourri de l’histoire coloniale : l’Apartheid à la française. Ce legs colonial d’une discrimination dans tous les domaines, avec sa violence policière raciste, sa justice raciste, son école raciste, son embauche raciste, ses contrôles au faciès, persistera tant que ces populations seront assignées à des conditions sociales d’indignité et de pauvreté dans lesquelles cette société capitaliste a plongé des millions de personnes.

La violence économique et la violence policière sont intimement liées, les gilets jaunes en ont fait les frais. L’usage de la force contre la masse populaire a agi comme un révélateur sur le système dont le réflexe premier est de préserver les intérêts des puissants qui contrôlent, à travers le président Macron, tous les leviers de la domination politique. La lutte des gilets jaunes a déchiré le voile démocratique pour laisser apparaître au grand jour ce visage familier bien connu des habitants des quartiers populaires, invisibilisé par des médias inféodés au puissant : le visage froid de la dictature de la matraque et du LBD qui gouverne sans le peuple et contre le peuple. Ce dernier ne s’y trompe pas en désertant massivement les bureaux de vote.

Il faut saluer le combat acharné de ces familles, parfois regroupées en collectif, qui, depuis de nombreuses années, apportent une aide inestimable aux victimes et à leurs proches afin notamment de surmonter la bataille juridique, étape primordiale dans le travail de deuil et de reconstruction. Pourtant après des années de lutte judiciaire, il faut regarder la vérité en face : a-t-on déjà vu un seul cas où une victime de violence policière a réellement obtenu justice dans les tribunaux ? A la hauteur du crime commis ? Les violences policières ont-elles diminuées en France ? Est-ce normal de devoir combattre pour obtenir un procès là où le non-lieu est la norme ?

A quoi mène aujourd’hui en France un tir meurtrier dans le dos par la police ? Cinq ans de sursis sans licenciement et une promotion en tant que délégué syndical. Une police en roue libre qui n’hésite plus à tirer au moindre « refus d’obtempérer » dans une quasi-impunité. Des gilets jaunes qui vont en prison pour dégradation matérielle tandis que les éborgneurs et meurtriers ne sont pas inquiétés. Et c’est normal : les policiers sont les gardiens de l’ordre, celui d’une république bourgeoise qui ne tient que par l’usage de la force « disproportionnée ».

Si donc les classes populaires n’obtiennent jamais gain de cause devant les tribunaux, à qui et à quoi sert donc cette justice ? Forte avec les faibles mais faible avec les forts, la justice a la main lourde avec le peuple, mais légère avec les policiers, les agents de la BAC, les Benalla, Balkany, Guéant et autres escrocs de la république. La justice est clémente, quand elle ne ferme pas les yeux, avec LVMH, McDonald et les grands groupes capitalistes qui utilisent l’argent volé aux travailleurs pour éviter les procès. La justice ne pèse rien non plus devant les marchands d’armes et responsables politiques du massacre au Yémen, en Irak et ailleurs.  Où est la justice quand le petit dealer se fait défoncer tandis qu’on déroule le tapis rouge à l’industrie du tabac responsable de millions de morts chaque année ?  A quoi sert la justice si ce n’est protéger les dominants et leurs supplétifs, tandis qu’elle criminalise les opprimés ?

Les décisions de la justice républicaine pourraient se résumer ainsi : les petits voleurs vont en prison tandis que les grands escrocs du parlement et de la bourse de Paris se retrouvent au Fouquet’s.

L’Etat déploie davantage de violence parce qu’il est incapable de donner une réponse sociale, incapable de satisfaire l’aspiration des classes populaires à vivre dans des conditions dignes. Cette violence d’Etat est alors un mode de gestion de l’ordre social, où chacun doit rester à sa place, aussi injuste soit elle. La violence policière et l’impunité qui l’accompagne n’est que le résultat logique de la violence sociale, de cet Etat qui doit maintenir à n’importe quel prix le profit d’une poignée d’individus au dépend d’une majorité d’opprimés, de travailleurs exploités, « ceux qui ne sont rien » victimes des « eaux glacées de l’égoïsme de classe ».

C’est une faillite de civilisation qu’Aimé Césaire résumait ainsi : « Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde ».

Justice de classe, justice raciste et coloniale ! De même que les Palestiniens n’obtiendront jamais justice devant les tribunaux de l’occupant, les classes populaires en France n’obtiendront jamais gain de cause devant l’injustice républicaine. Les tribunaux, le gouvernement Macron, ces opportunistes parlementaires ne sont qu’une clownesque et tragique incarnation des intérêts de la classe des possédants. La police républicaine apparait alors sous les traits d’une milice aux ordres de cette minorité bourgeoise dont le moteur est le profit et rien d’autre. Tenter de nier cette réalité ne changera rien au fait que demain, des pauvres, des Arabes, des Noirs seront tués en toute impunité, encore et encore par la police républicaine, et méprisés par l’injustice républicaine.

Le Comité Action Palestine dénonce la violence d’Etat qui n’a d’autre objectif que de maintenir l’ordre social. Face à cette injustice républicaine, il ne reste qu’une seule voie : la mobilisation de tous les concernés pour résister à l’oppression.

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