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L’ONU : un leurre au service des puissances impérialistes !

Comité Action Palestine

Depuis le 13 juin dernier, la 6ème commission de l’Assemblée générale de l’ONU est présidée par Israël. Cette commission gère l’ensemble des opérations de l’organisation de l’ONU du droit international que ce soit l’application des conventions de Genève ou la coordination de la lutte mondiale contre le terrorisme. Après son élection à la vice-présidence de la 4ème commission chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation en juin 2014, l’entité sioniste colonise peu à peu les arcanes de l’Organisation.

 L’Etat colonial israélien s’est bâti  sur le terrorisme, l’épuration ethnique et la violation des droits des Palestiniens. Mais que peut-on attendre de l’ONU ? C’est une organisation conçue par les Etats-Unis sur les cendres de la Société des Nations, fondée par le club des vainqueurs de la seconde guerre mondiale, et selon des règles qui leur assurent la suprématie dans n’importe quelles circonstances. Le vote de résolutions par l’Assemblée générale est un leurre puisqu’elles ne sont jamais contraignantes vis-à-vis des Etats dominants. De plus le droit de veto au Conseil de Sécurité garantit les intérêts des grandes puissances.

Ces nominations montrent une fois de plus que les Palestiniens n’ont rien à attendre de cette organisation et de la dite « communauté internationale ». Le mouvement de solidarité internationale doit cesser d’y faire référence comme seul cadre du droit des Palestiniens à l’autodétermination et des conditions de leur lutte nationale. Il est urgent de revenir aux fondamentaux de la lutte anti-coloniale. Le sionisme est un colonialisme, seuls les Palestiniens sont à même de définir les moyens de lutte pour libérer la terre arabe de Palestine car il s’agit de leur survie et de leur devenir. Le mouvement de solidarité doit avoir un seul mot d’ordre : la libération de toute la Palestine.




Les nouveaux oligarques : géants économiques et nains politiques – L’Orient Le Jour – L. Kennouche et T. El Mestari

Dans les anciens pays colonisés, les conséquences de la colonisation sur le développement économique, la structuration sociale et la nature du pouvoir perdurent longtemps après les indépendances. L’établissement post-colonial d’une économie rentière, fondée sur les ressources pétrolières notamment, aggrave ces effets à long terme. La prise en compte de ces éléments d’analyse est déterminante si l’on veut mieux comprendre la situation économique et politique actuelle des anciens pays colonisés, ainsi que leurs difficultés à développer une économie nationale. Cet article paru dans l’Orient Le Jour nous éclaire sur la nature des relations entre l’oligarchie algérienne et le pouvoir.
Etatisation de l’économie ou libéralisation contrôlée, dans les deux cas le développement économique en Algérie semble bloqué par la compétition pour les centres de décisions politiques et, in fine, pour l’accaparement des richesses produites par la rente pétrolière…Les clans et réseaux sont des groupes politiques informels mus par l’appât du gain. Ces nouveaux oligarques en sont l’incarnation.
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Lina Kennouche et Tayeb El Mestari,  pour l’Orient le Jour (14/06/2016)

S’il y a bien une tentation parmi les grands patrons d’investir le champ politique ou de l’influencer durablement, il revient au système politique algérien de les assimiler ou de les écarter.

Le nouveau bras de fer engagé entre l’industriel Issad Rebrab, patron de CEVITAL (une multinationale aux activités industrielles diversifiées), et le clan du président Abdel Aziz Bouteflika, après le rachat du quotidien el-Khabar, a relancé la polémique sur la nature des relations entre les élites politiques algériennes et la puissance du capital. Le grief de la transaction illégale proféré par le ministère de la Communication à l’encontre du géant économique qui contrôle aussi la chaîne de télé KBC, une société de diffusion, des imprimeries et des actifs, met à nouveau au jour les rapports de force entre le pouvoir et les hommes d’affaires farouchement opposés au réseau de la présidence. Au-delà des révélations fracassantes de certains médias algériens qui privilégient une approche psychologisante ou moralisatrice de ces pratiques collusives, cette affaire illustre une nouvelle fois la relation complexe entre les grands entrepreneurs et le pouvoir politique. Désignés comme les nouveaux oligarques, ces hommes d’affaires ont mis à profit la dynamique de transformation économique (depuis 20 ans avec le plan d’ajustement structurel), pour tisser d’étroites relations avec certains dirigeants politiques. Dans le passage d’une économie étatisée à une libéralisation contrôlée, le pouvoir a progressivement conduit une stratégie de développement qui s’appuie sur ces nouveaux acteurs économiques. Pour autant, l’affaire Rebrab interroge les limites de leur rôle : la nécessité de s’inscrire dans le sillage du clan dominant reste-t-elle la condition indispensable à la maximisation des perspectives de profit sans faire ombrage au pouvoir politique ? S’il est vrai qu’en Algérie, la nature même du pouvoir entrave le processus d’autonomisation de la sphère économique, et a fortiori l’émergence de nouveaux décideurs, pour autant la représentation stéréotypée de l’homme d’affaires s’inscrivant dans un rapport de servilité à l’égard du pouvoir ne correspond pas vraiment à la réalité.

Historiquement, le rôle de l’État algérien a toujours été fondamental dans la régulation des activités économiques. Les limites de la stratégie de développement et la transition accélérée vers une libéralisation, notamment à travers la privatisation partielle des secteurs publics, a offert des opportunités de profits rapides et entraîné l’émergence d’un nouvelle classe d’entrepreneurs. En dépit d’un allègement délibéré de la législation, les entraves juridiques et administratives persistent et l’influence de l’État reste prépondérante, particulièrement perceptible dans le domaine de l’accès au crédit et au foncier. En 2009, l’adoption d’une réglementation sévère à travers la loi de finances complémentaire (LFC) illustre le poids écrasant des pouvoirs publics dans la gestion du secteur économique, et la relation de dépendance de la classe entrepreneuriale. Cette loi a consacré l’interdiction des crédits à la consommation à l’exception du crédit immobilier, l’instauration du Crédit documentaire (Crédoc) comme seul mode de paiement des importations, une politique de restriction des importations ainsi que l’obligation de recourir à un partenaire algérien majoritaire pour lancer tout nouveau projet d’investissement. Un contexte déroutant pour les entrepreneurs qui sont enclins à rechercher la proximité avec le pouvoir dans le but d’obtenir des avantages spécifiques comme l’octroi de généreux crédits bancaires et l’accaparement d’actifs publics. Cette configuration laisse libre cours à la lutte concurrentielle pour la constitution de monopoles dans des secteurs-clés de l’économie comme le commerce et le transport. Les entrepreneurs, qui ont tiré profit de la politique distributive, renforcée depuis l’accession au pouvoir de Bouteflika, et bénéficié de soutiens politiques significatifs, se sont retrouvés en situation de monopole. Le contentieux entre le puissant industriel Ali Haddad (enraciné dans le réseau Bouteflika), accusé de parasiter les initiatives de Issad Rabrab en intervenant auprès de personnages-clefs au sein de l’establishment politique, et ce dernier accusant M. Haddad d’être la figure oligarchique du système présidentiel, illustre éloquemment la dynamique conflictuelle à l’œuvre entre hommes d’affaires. Issad Rebrab ayant lui-même constitué sa fortune à la faveur de ses liens de proximité avec le clans des généraux.

Une oligarchie divisée traduit en réalité l’absence de conscience de classe et de défense d’un projet commun. Ces acteurs économiques, qui ont consolidé des liens d’affaires avec certains réseaux du pouvoir, ne sont pas uniquement dans une logique de subordination, les réduisant au rôle d’une simple marionnette à la solde d’un clan. Les groupes au sein du pouvoir ont recours à ces businessmen pour conforter leur position. Ali Haddad, qui a fait fortune dans les travaux publics, est apparu comme le principal financeur de la campagne Bouteflika et son représentant au sein du patronat. Ces personnalités sont courtisées dans le cadre du financement des campagnes électorales ou pour remplir une fonction d’intermédiaire dans les relations avec les élites politiques et économiques à l’étranger. Les relations reposent donc sur une convergence mutuelle d’intérêts. Cercles de pouvoir et d’affaires demeurent très imbriqués dès lors que la relation ne fait pas peser d’incertitude sur les intérêts du pouvoir (logique concurrentielle entre clans). Le jeu d’influence des hommes d’affaires, à distance des décisions politiques stratégiques, n’entrave pas la toute-puissance économique de l’État. L’ascension fulgurante et la déchéance du milliardaire Rafik Kahlifa, condamné à la prison à perpétuité, éclairent la nécessité pour ces oligarques de rester dans les bonnes grâces du pouvoir. S’il y a bien une tentation de la caste des grands patrons d’investir le champ politique ou de l’influencer durablement, il revient au système politique algérien de les assimiler ou de les écarter. Une évolution structurelle, dans laquelle l’État resterait confiné dans un rôle régulateur, laissant le champ économique à l’initiative des investisseurs privés, semble encore bloquée.

http://www.lorientlejour.com/article/991006/les-nouveaux-oligarques-geants-economiques-et-nains-politiques.html




Le Sahara occidental, dernière colonie d’Afrique

Un mouvement anticolonialiste sincère doit avoir pour principe la centralité de la cause des peuples, le soutien à leurs revendications, notamment le droit à l’ autodétermination, ainsi qu’une solidarité inconditionnelle pour leurs modes de résistance quels qu’ils soient.
Par sa dimension pédagogique, ce dossier publié dans le journal l’Orient le Jour a pour objectif de sensibiliser les consciences sur le devenir du peuple sahraoui en restituant une synthèse sur les enjeux essentiels du conflit.

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par Lina Kennouche, Tayeb El Mestari et Chafik Gaouar, pour l’Orient le Jour (27 mai 2016)

Le 29 avril 2016, le Conseil de sécurité de l’Onu adopte une résolution prorogeant jusqu’au mois d’avril 2017 le mandat de la Mission des Nations unies pour le maintien de la paix au Sahara occidental, conformément au vœu formulé par son secrétaire général Ban Ki-moon, qui a activement plaidé en faveur de sa reconduction.
La résolution 2285 réhabilite donc la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso). Après la querelle diplomatique l’opposant au secrétaire général de l’Onu, Rabat décide d’expulser 83 membres du personnel civil de cette mission suite aux propos de Ban Ki-moon sur l’« occupation du Sahara ».

41 ans après le début du conflit déclenché par l’octroi au Maroc (et pour un temps à la Mauritanie) du Sahara occidental sans consultation des Sahraouis qui subissent les modalités d’une décolonisation espagnole imposée, les positions apparaissent irréconciliables. Cependant, l’approche sous l’angle exclusif des relations internationales ou des rivalités politiques entre l’Algérie et le Maroc brouille encore trop souvent la perception de la nature d’un conflit dont l’enjeu central demeure celui du droit à l’autodétermination d’un peuple. La tentative de délégitimation des revendications sahraouies, présentées comme du séparatisme par la monarchie marocaine, n’est certainement pas étrangère à l’opération idéologique de construction d’un récit mythique autour des droits historiques « naturels » du Maroc sur le Sahara occidental.

Ce récit s’enracine dans la fiction d’un « grand Maroc » (qui comprendrait le Sahara espagnol, la Mauritanie, le nord du Mali, la région de Tindouf et l’Ouest algérien) et donne une tonalité expansionniste à la politique régionale du royaume. Ainsi, l’examen des véritable enjeux d’un conflit qui empoisonne les relations intermaghrébines et hypothèque l’avenir de la coopération régionale dans un contexte sécuritaire instable ne peut faire l’économie d’une analyse des lacunes et des contradictions que renferme le discours d’une souveraineté « historique incontestable » de Rabat sur le Sahara occidental. Elle impose également une réflexion plus profonde sur la responsabilité de la communauté internationale à travers l’ambivalence d’une position qui, sans reconnaître la souveraineté du Maroc, tend à nier la nature « coloniale » du conflit, en prenant part aux logiques perverses d’humanitarisation du problème des réfugiés sahraouis, ou d’aide au Maroc en matière de coopération économique pour le développement de la région. Les pesanteurs historiques et les intérêts économiques des grandes puissances expliquent l’abandon progressif de l’option référendaire qui, pourtant, réglerait définitivement le sort de la dernière colonie d’Afrique.

Ce dossier tente de revenir sur les raisons de la persistance du blocage de tout processus de règlement à travers l’analyse de la position du droit international, et la fausse dichotomie intégrité territoriale /droit à l’autodétermination. Il resitue l’importance des enjeux internes de cette question pour la stabilité politique de la monarchie, ainsi que l’impact des enjeux économiques qui aiguisent les appétits de puissance.

Lire dans ce dossier spécial :

 

Intégrité territoriale vs droit à l’autodétermination

Le Front populaire de libération de la Saguia el-Hamra et du Rio de Oro (Polisario, dont le premier congrès constitutif s’est tenu le 10 mai 1973) fonde ses revendications sur le principe inaliénable du droit à l’autodétermination, principe qui est en profonde contradiction avec les prétentions « souverainistes » de Rabat et ses visées hégémoniques sur la région. Lire la suite

 

Un enjeu de survie pour la monarchie marocaine

Au lendemain de la décision rendue par la CIJ, le Maroc organise une marche verte, qui devait faire pression sur l’Espagne pour l’amener à négocier, mais les principaux enjeux étaient internes : permettre à une monarchie fragile de construire sa légitimité sur l’unité nationale. Lire la suite

 

Les appétits commerciaux et le droit international

Avec ses 1 700 km de côtes, son accès à l’océan Atlantique et la richesse des ressources halieutiques qu’il recèle, le Sahara occidental recouvre une importance capitale pour le dynamisme de l’économie marocaine et pour les partenaires économiques et commerciaux du Maroc. Lire la suite

 

Et notre chronologie ici

http://www.lorientlejour.com/article/988018/le-sahara-occidental-derniere-colonie-dafrique.html




Projection – débat : Syrie, une guerre de trop pour l’Occident ? 31 mai 2016

Pour mieux comprendre les enjeux de cette guerre ainsi que les forces en présence,

le Comité Action Palestine

vous propose une soirée-débat

le mardi 31 mai à 20h à l’Athénée municipal-Bordeaux.

Un documentaire sur le sujet sera présenté, suivi d’un temps d’échanges.

En soutenant militairement, financièrement et politiquement les rebelles syriens, le bloc occidental pensait répéter le scénario libyen qui avait vu la chute rapide du régime avec le parachutage tout aussi rapide au pouvoir d’une clique de déserteurs ou d’opposants anciennement exilés gouvernant un pays plongé dans le désordre le plus profond, de guerre entre tribus et de règne des milices. Cependant, tout opposait la Libye et la Syrie tant sur le plan interne que sur le plan des relations internationales, et les dirigeants états-uniens et européens n’ont pas su le voir.

Mais 5 ans après ses débuts, on assiste à un enlisement de ce conflit dont les enjeux sont tout autant régionaux qu’internationaux. Derrière la complexité apparente des acteurs, se cache une guerre pour l’appropriation des ressources en hydrocarbures et l’affrontement entre deux camps, porteurs de deux visions du monde : le camp de l’impérialisme occidental et de ses vassaux qui soutiennent  l’Etat islamique et le Front al-Nosra ainsi que toutes les forces opposées au gouvernement syrien, et le camp des forces de la résistance au sionisme et à l’impérialisme soutenues militairement par la Russie qui y défend ses propres intérêts stratégiques et économiques.

De quelle manière cette guerre détermine l’avenir des peuples de cette région, et notamment des peuples syrien et palestinien ? Quels en sont les conséquences et les enjeux à long terme sur la Syrie et toute la région ? Nous vous invitons à débattre autour de ces questions cruciales qui auront un impact durable sur les relations entre l’Occident et les peuples de cette région.

Athénée municipal, place St Christoly, Bordeaux, Tram A et B, arrêt Hôtel de ville




Le traitement humanitaire de la Nakba ou le sacrifice du droit au retour

Cet article traite d’une question rarement analysée, celle de la fiction d’un prétendu droit international protégeant les Palestiniens, et en particulier les réfugiés dont le droit au retour chez eux est toujours nié. Si ce droit est une fiction pour la réalisation des revendications palestiniennes, il est en revanche une réalité positive pour les sionistes quand il participe de la transformation de la question politique de ce droit au retour en question humanitaire et morale. L’humanisme est bien une violence quelque part lorsque le dominant en use pour maintenir l’ordre injuste qu’il a lui-même créé (Comité Action Palestine).

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par Lina Kennouche (pour l’Orient le Jour, le 14 mai 2016)

La logique réparatrice, de compensation subvertit le principe de la revendication politique des droits d’un peuple.

Le 14 mai est commémoré par les Palestiniens comme le jour de la Nakba (la catastrophe), épisode traumatique d’un processus colonial antérieur à 1948, et qui se perpétue encore aujourd’hui. Le 15 mai 1948, les opérations d’épuration ethnique et la dépossession planifiée poussent plus de 700 000 Palestiniens à l’exode. Dans son livre, La naissance du problème des réfugiés palestiniens (1987), Benny Morris, qui fut considéré comme l’un des pionniers des nouveaux historiens israéliens, relate dans le détail l’ampleur de cette entreprise de nettoyage ethnique. Dans une interview retentissante qu’il livre au journal Haaretz le 8 janvier 2004, Benny Morris aborde cette dimension terrifiante de la Nakba en légitimant les exactions commises en ces termes : « Il y a des circonstances dans l’histoire qui justifient le nettoyage ethnique. Je sais que ce terme est complètement négatif dans le discours du XXIe siècle, mais quand le choix est entre le nettoyage ethnique et le génocide – l’annihilation de votre population –, je préfère le nettoyage ethnique », une rhétorique de la menace existentielle, vieux ressort de la stratégie coloniale, qui a de tout temps servi à justifier les pires atrocités. Pourtant, en réalité, c’est la résolution 181 des Nations unies qui a constitué l’acte fondateur de la Nakba, en recommandant le partage et la spoliation des droits d’un peuple. Elle contenait en germe les ingrédients d’une destruction irréversible d’une présence en Palestine dont la continuité historique est établie depuis le VIIe siècle. Cette responsabilité originelle de la communauté internationale se confirmera à travers une gestion « humanitaire » des effets de la Nakba. Dans cette approche, la communauté internationale a longtemps sous-traité pour le compte de l’État d’Israël le problème des « réfugiés » palestiniens, catégorie soumise à un régime juridique particulier.

Traitement apolitique

La résolution 194 adoptée le 11 décembre 1948 est la première fissure dans la reconnaissance juridique de l’existence d’un « peuple palestinien » disposant du droit inaliénable à l’autodétermination. Elle introduit une réparation à titre individuel aux Palestiniens qui renonceraient à leur droit au retour sur leur terre : « Des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé, lorsque, en vertu des principes du droit international ou en équité, cette perte ou ce dommage doivent être réparés par les gouvernements ou autorités responsables ». Un an après, la résolution 302 donne naissance à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa) dont la mission est de « fournir une assistance humanitaire, autant que cela est possible, dans l’urgence et en tant que mesure temporaire (…) » aux personnes « déplacées et ayant un réel besoin d’assistance immédiate suite aux récentes hostilités ». Un nouvel instrument juridique est donc mis en place pour soustraire le statut de réfugié palestinien au régime juridique international de protection, applicable à l’ensemble des réfugiés dans le monde et relevant du HCR (Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés) et de la Convention de Genève de 1951.

Ce traitement différentiel qui place les réfugiés dans une situation de précarité et les soumet à l’arbitraire des pays d’accueil traduit le renoncement à une solution politique permanente au problème. L’absence d’assise juridique qui favoriserait une solution juste au sort des réfugiés palestiniens est en même temps une négation de la nature politique de cette question, circonscrite au domaine humanitaire. La démarche humanitaire se résume alors à une logique réparatrice, de compensation qui subvertit le principe de la revendication politique des droits d’un peuple. Elle se présente comme une posture éminemment moraliste. Or, l’approche apolitique conduit à une neutralité fictive. Elle transforme le problème des réfugiés palestiniens en question humanitaire et en revendication individuelle, en traitant moralement les conséquences de la négation de l’existence d’un peuple exclu de sa terre, et du droit collectif à l’autodétermination ; la communauté internationale cautionne donc et sous-traite les conséquences d’un processus colonial d’anéantissement de tout un peuple.

Depuis 2011, et dans un contexte marqué par la multiplication des crises régionales, la gestion humanitaire des réfugiés palestiniens tend à faire place à la liquidation de ce problème. Sous couvert de promotion du droit au retour, les pays arabes d’accueil ont mené des politiques d’asile discriminatoires à l’endroit des réfugiés palestiniens. Alors que ces derniers sont souvent marginalisés dans les sociétés d’accueil, entassés dans des camps, l’extrême précarité finit par encourager les départs, leur dispersion et la perte d’identité collective. Si le statut du réfugié palestinien varie bien en fonction de la législation des pays d’asile, qu’ils se trouvent au Liban, en Jordanie ou en Syrie, de manière générale, les Palestiniens des camps sont dans une situation de vulnérabilité, une vulnérabilité renforcée dans le contexte de violence politique. La destruction de camps palestiniens en Syrie et le déplacement des populations restent une conséquence oubliée de la crise.
Soixante-huit ans après l’expulsion originelle des Palestiniens, le diagnostic alarmant de leur vie dans les camps et le nouvel exode face aux conflits qui secouent la région servent la stratégie de liquidation des droits universels.

http://www.lorientlejour.com/article/985907/le-traitement-humanitaire-de-la-nakba-ou-le-sacrifice-du-droit-au-retour.html




Palestine: la résistance populaire met en échec le projet sioniste

par Comité Action Palestine (mai 2016)

Le 14 mai 1948, jour de la « création de l’Etat israélien », est commémorée par les Palestiniens comme la Nakba, la catastrophe. L’idée initiale selon laquelle la Palestine était «une terre sans peuple pour un peuple sans terre» a constitué l’un des plus grands mensonges de l’histoire et a servi de justification à la politique sioniste de colonisation et d’épuration ethnique.

La responsabilité de l’ONU dans l’épuration ethnique en Palestine

Le 29 novembre 1947, l’ONU adopte la Résolution 181 qui recommande la partition de la Palestine. Celle-ci est légitimement refusée par les Palestiniens. Cette résolution est, en réalité, l’acte fondateur de la Nakba. Elle attribue aux Juifs 56 % du territoire palestinien, alors que démographiquement, ils représentent moins du tiers de la population et possèdent jusqu’alors à peine 7 % des terres. La résolution a déblayé la voie aux sionistes : la destruction programmée de plus de 500 villages palestiniens entre 1947 et 1949, selon un plan, dit Dalet, mis en œuvre afin d’accélérer le nettoyage ethnique et de voler des terres. Parmi ces villages détruits, Deir Yassine est le plus symbolique, avec ses 250 habitants massacrés par les forces militaires juives le 9 avril 1948, en prélude à la déportation de l’ensemble des villageois. Cette catastrophe enfin, c’est 800 000 Palestiniens expulsés de leurs terres sans que leur droit au retour ne soit encore reconnu dans les faits. Chassés de leurs terres et niés de tous, les réfugiés palestiniens, qui sont aujourd’hui 7,2 millions (75% de la population palestinienne), attendent toujours de retourner chez eux.

Depuis son implantation en Palestine, le sionisme n’a jamais eu d’autres buts que le nettoyage ethnique. Terre conquise et non terre promise, telle est la réalité de cette colonisation qui se poursuit quotidiennement depuis plus d’un siècle maintenant.

Les racines historiques de la Nakba

Né au XIXème siècle en Europe centrale, le sionisme a d’abord été la réaction politique d’une petite bourgeoisie juive en butte au racisme engendré par un capitalisme en crise. Longtemps privé de moyens économiques conséquents et de structuration politique, il va gagner en puissance en s’inscrivant dans la logique coloniale et en cherchant des soutiens auprès de l’impérialisme occidental. En effet, la Grande-Bretagne et la France comprennent que le sionisme peut devenir un instrument pour imposer leur propre domination au Proche-Orient. Les accords Sykes-Picot de 1916, par lesquels se trouve planifié dans le plus grand secret le dépeçage de l’Empire ottoman, et, ensuite, la Déclaration Balfour de 1917 expriment clairement la convergence de ces intérêts. C’est donc avec la bénédiction de la France et du Royaume-Uni que la grande bourgeoisie juive apporte son soutien en finançant la colonisation juive en Palestine qui débute dès la fin du XIXème siècle. Totalement absents des calculs d’épiciers de la Grande-Bretagne et de la France, inexistants dans l’ouvrage de Herzl qui ne les nomme jamais, les Palestiniens vont apparaître dans la réalisation effective du plan comme l’obstacle à éliminer, les empêcheurs de coloniser en rond. Tout naturellement, le sionisme exprime de façon spectaculaire, en tant que mouvement colonial européen, l’arrogance propre au racisme occidental : les Arabes ne méritent pas qu’on se soucie d’eux, sauf quand il s’agit de savoir comment s’en débarrasser. Ainsi, c’est par cette jonction de l’impérialisme et de la finance juive qu’a pu s’opérer la métamorphose de la « question juive » en « question arabe ».

La responsabilité historique de la France dans la Nakba palestinienne

La France a sa part de responsabilité dans la partition de la Palestine et in fine de la création de l’Etat colonial israélien. C’est en effet la France qui a fait basculer le vote onusien de novembre 1947. La position française en faveur du sionisme s’explique par la question coloniale : la France se sent menacée dans son empire colonial et perçoit le futur Etat colonial juif comme un allié stratégique dans son combat contre la Ligue arabe et les mouvements nationalistes. Léon Blum ne déclarera-t-il pas à Vincent Auriol, alors président de la République « Rien ne serait plus dommageable pour notre domaine d’Afrique du Nord, qu’une marque de débilité de notre part en Palestine. Il faut briser la résistance arabe ». L’ensemble des partis politiques, y compris le Parti Communiste Français, ainsi que la grande majorité des intellectuels français comme Sartre et Camus se sont aussi fortement mobilisés pour défendre les intérêts de l’Etat sioniste en formation. Rien d’étonnant alors à la collaboration continue de l’Etat français avec l’entité sioniste depuis sa création et aux démonstrations d’allégeance des politiques français, notamment des socialistes. Rien d’étonnant non plus à la criminalisation actuelle de l’antisionisme et à la mise en œuvre d’une politique ouvertement raciste et discriminatoire envers la population arabo-musulmane parce que sa condition fait d’elle une catégorie contestataire politiquement d’une part et solidaire de la cause palestinienne d’autre part. La récente « initiative française pour la paix » s’inscrit dans cette politique de soutien inconditionnel à l’Etat colonial sioniste car elle vise tout simplement à liquider droits fondamentaux des Palestiniens.

La résistance populaire palestinienne porte des coups décisifs à l’ennemi sioniste

Des révoltes menées dans la Palestine historique en 1936-1939 par Ezzedine al Qassam à la création d’organisations de libération de la Palestine établies dans les camps de réfugiés en Jordanie, en Syrie ou au Liban ; des Intifadas de 1987 et de 2000 à la victoire de la résistance armée à Gaza en 2009, 2012 et 2014, en passant par la libération de cette partie de la Palestine en 2005, les Palestiniens ont toujours fait preuve d’une détermination sans faille. Depuis quelques mois, la résistance s’est ré-activée avec l’Intifada al-Aqsa. Face à la poursuite de la colonisation et de la répression, aux menaces grandissantes sur les lieux saints et à l’absence de perspectives politiques, un mouvement populaire spontané a pris naissance dans toutes les parties occupées de la Palestine. De manière imprévisible et indépendamment de toutes organisations, les coups portés au cœur de la société coloniale mettent en péril un des fondements existentiels de l’entité sioniste qui est la sécurité du colon. La peur change de camp. En s’attaquant à tous les membres de la société coloniale, les Palestiniens démontrent qu’il n’y pas de différence entre la population et les forces armées gouvernementales. La société israélienne dans son ensemble est coloniale et donc structurellement raciste, violente et oppressive envers les Palestiniens. En exhibant des drapeaux algériens, les résistants palestiniens expriment également qu’ils ont choisi leur objectif, c’est-à-dire la fin du colonialisme juif et la libération totale de la terre arabe de Palestine. Leur combat rejoint celui de tous les peuples colonisés et opprimés.

Dans cette perspective, le combat pour le droit au retour des réfugiés palestiniens se poursuit, et ce malgré toutes les tentatives de liquidation de ce droit. Il signe l’illégitimité de l’Etat sioniste et démontre, qu’après avoir surmonté de multiples attaques, le peuple palestinien, comme les peuples de la région, n’abdiquera pas.

Le Comité Action Palestine œuvre pour la réalisation des droits nationaux du peuple palestinien, c’est-à-dire la libération de la terre arabe de Palestine.

Il réaffirme les quatre principes suivants :

  • La condamnation du sionisme comme mouvement politique colonialiste et raciste.
  • Le soutien inconditionnel à la résistance du peuple palestinien et à son combat pour son auto-détermination et son indépendance nationale.
  • La reconnaissance du droit inaliénable au retour de tous les réfugiés chez eux.
  • La libération de tous les résistants emprisonnés.



L’autre 8 mai 1945 : aux origines oubliées de la violence coloniale en Algérie

Analyser les déterminants de la violence coloniale pour mieux appréhender les facteurs qui peuvent conduire à l’insurrection généralisée des colonisés et à la victoire. Les massacres et la violence coloniale n’ont jamais empêché un peuple de poursuivre la résistance. Au contraire, dans certaines circonstances, ils peuvent accélérer le processus d’indépendance. C’est ce que nous montre l’expérience algérienne !

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par Lina Kennouche et Tayeb El Mestari,  pour l’Orient le Jour

 

Soixante-douze ans après les massacres de Sétif et Guelma, la question du soutien unanime des Européens au recours à la terreur reste ouverte.

Le 8 mai 1945, le déchaînement de la fureur coloniale conduit aux massacres de milliers d’Algériens dans le Nord constantinois. Une semaine plus tôt, la manifestation organisée par le Parti du peuple algérien (PPA), parti nationaliste indépendantiste, à l’occasion du 1er mai et des célébrations de la victoire contre le nazisme, dégénère. Parmi les manifestants qui réclament la libération de leur leader Messali el-Hadj et revendiquent leur droit à l’autodétermination, un jeune scout déploie le drapeau algérien dessiné par l’épouse de Messali. Il est abattu par un policier d’une balle dans la tête. S’en suivront les insurrections nationalistes de Sétif, Guelma et Kherrata, avec des dizaines de milliers de morts dans des villes qui comptaient moins de deux cent mille habitants. Aviation, marine, tirailleurs, policiers et milices civiles se sont acharnés sur les populations. Les cadavres ont été brûlés dans des fours à chaux qui ont tourné pendant près d’un mois ; corps carbonisés et charniers témoignèrent de l’atrocité de ces massacres. La répression ne s’achève que le 22 mai avec l’organisation de cérémonies d’allégeance à la puissance coloniale où les Algériens étaient sommés de se prosterner devant le drapeau français et de répéter en chœur : « Nous sommes des chiens et Ferhat Abbas (1) est un chien. »

L’ouverture des archives civiles, de nombreux témoins, tel que Marcel Reggui, et les travaux d’historiens algériens et français à l’instar de Mohammad Harbi, ou Jean-Pierre Peyroulou, ont permis de faire la lumière sur la tragédie du 8 mai 1945, acte fondateur du soulèvement de 1954. Du contexte socio-politique dans lequel s’inscrivent ces événements à la responsabilité écrasante des autorités civiles et des milices, en passant par la caution apportée par toutes les tendances politiques à la répression contre les « indigènes » et les formes qu’elle a revêtues, la critique historique a minutieusement rétabli les faits et tenté d’éclairer le « sens » de cet événement traumatique. Mais au-delà de la question des implications de l’autre 8 mai 1945, c’est encore celle des origines du déferlement de violence qu’il faut réinterroger. Comment expliquer l’esprit unanimiste, « l’union sacrée » des Européens issus de tous les courants politiques dans leur soutien à la répression féroce ? L’historien algérien Mohammad Harbi relève qu’à cette époque, « chez les Européens, une peur réelle succède à l’angoisse diffuse. Malgré les changements, l’égalité avec les Algériens leur reste insupportable. Il leur faut coûte que coûte écarter cette alternative ». Le 8 mai 1945 semble effectivement incarner le sursaut violent de la communauté européenne d’Algérie face aux signes avant-coureurs d’un dépérissement du système colonial.

Opération de vengeance

L’approche politique tend à minimiser le poids du contexte socio-économique dans l’analyse de la réaction européenne. Pourtant, l’affaiblissement de la petite propriété coloniale qui a fait la force de ce système et le nouveau dynamisme du commerce des autochtones expliquent en partie les origines de la violence des milices civiles ce 8 mai 1945.

Un siècle auparavant, le colonialisme français a introduit la propriété privée et institutionnalisé la dépossession des terres et le cantonnement des populations locales. Ce système a détruit les fondements de l’économie traditionnelle et désagrégé les liens tribaux avec pour principale conséquence la perte d’identité, la paupérisation massive et l’asservissement des populations autochtones. Cette réalité structurelle sera révélée par l’ampleur des révoltes locales qui jalonnent l’histoire de la colonisation française en Algérie. Dans les années 1940, le contexte économique connaît une évolution majeure : la petite propriété coloniale amorce un déclin au profit du petit commerce des Algériens autochtones. Au-delà de l’évolution démographique instaurant un rapport ethnique favorable aux Algériens, Marcel Reggui souligne, dans son travail d’enquête Les massacres de Guelma, que « cette extension du domaine économique des musulmans » a inquiété les Européens, car « cafés, hôtels, transports, commerce de tissus, maquignonnage tombaient entre les mains des musulmans ».

Par ailleurs, l’historien Jean-Pierre Peyroulou révèle également que cette répression a constitué une opération de vengeance face aux pratiques continuelles de pillage des ressources coloniales. « Ces pratiques-là existaient à Guelma dans les années 1880-1890, qui virent la création de milices d’autodéfense informelles (…) L’obsession des Européens dans les années 1880-1890 était le racket pratiqué par les musulmans pour laisser les Européens vivre sur les terres qu’ils occupaient, une sorte d’impôt révolutionnaire avant la lettre. En mai et juin 1945, c’était l’occasion pour les Européens établis comme agriculteurs dans ces localités de régler une fois pour toutes ce genre de problèmes avec les musulmans. C’est la pratique ancienne des milices européennes d’autodéfense qui se trouva réactivée à ce moment », explique Jean-Pierre Peyroulou. Aux côtés de l’armée, instrument d’existence du système colonial, se dressent les forces civiles miliciennes comme acteurs de la répression. M. Peyroulou révèle qu’à Guelma, à la différence de Sétif, ces forces civiles ont mené leur action sans l’aide de l’armée.

Crime fédérateur

L’historien note une confusion des rôles entre miliciens, policiers, gendarmes, sous-préfet, gardiens de prison durant les massacres de Guelma. Dans son article, Rétablir et maintenir l’ordre colonial, il revient sur cette longue tradition française de collusion entre autorité civile et pouvoir militaire, et analyse le rôle de la police comme auxiliaire de l’armée défendant les intérêts du colonat. Selon lui, « la médiocrité de l’épuration de la police après l’établissement du Comité français de libération nationale n’explique en rien la répression du 8 mai 1945 dans le Constantinois. Les communistes ont tenté d’en accréditer l’idée en 1945, en dénonçant un complot vichyste mené par les grands colons et une partie de l’administration toujours en poste cette année-là. Mais André Achiary, sous-préfet de Guelma, n’était-il pas un commissaire de police des Brigades de surveillance du territoire (BST), mais aussi un résistant (…), fils d’instituteurs syndicalistes, et très anticommuniste ? ». Il rappelle que la milice européenne créée dès le 14 avril sous l’œil bienveillant du sous-préfet Achiary comptait 280 membres « représentant toutes les familles politiques, du Parti communiste algérien à la droite. Les colons étaient fortement représentés, parfois tous les hommes d’une famille en faisaient partie. C’était l’union sacrée contre tous les fanatiques musulmans. »

L’incompréhension par le Parti communiste algérien (antenne du PCF) de la centralité de la question nationale expliquait une attitude en déphasage avec la réalité algérienne. Pour l’historien Alain Ruscio, l’épisode dramatique du 8 mai 1945 est un révélateur pertinent de la position ambiguë du Parti communiste face au mouvement de libération national. Viscéralement anticolonialiste au départ, le PCF a sensiblement évolué sur cette question. « Le drame du 8 mai 1945 en Algérie se situe dix jours après les premières élections depuis la Libération, les municipales (29 avril). Pour le PCF, c’est un triomphe. Cette situation laisse entendre aux communistes qu’ils pourront aborder en douceur une évolution démocratique du système colonial » explique Alain Ruscio. Le soutien aux crimes du 8 mai 1945 a fédéré toutes les sensibilités politiques et permis de surmonter les divisions politiques profondes entre défenseurs et détracteurs des collaborateurs vichystes. S’il est également vrai que les Européens d’Algérie ne constituaient pas un bloc monolithique sur le plan social et politique et qu’il existait une différence d’approche dans la réponse à apporter aux revendications du mouvement national algérien, dans les conjonctures de crises et chaque fois que intérêts des Européens semblaient menacés, c’est bien « l’union sacrée » qui l’emporte. Au nom de la défense des intérêts coloniaux, les contradictions qui traversent les différents courants politiques se sont effacées, des communistes à la droite républicaine. Le 8 mai 1945 a été le traumatisme fondateur de l’insurrection nationaliste armée et le crime fédérateur de la classe politique française.

(1) Principale figure du courant assimilationniste qui, après avoir nié l’existence d’une nation algérienne en 36, finira par l’admettre en 43.

L’autre 8 mai 1945 : aux origines oubliées de la violence coloniale en Algérie




En Algérie, la lutte des clans pour le partage de la Sonatrach…

Le président algérien Houari Boumédiène déclarait « l’Algérie est avec la Palestine en toutes circonstances…rappelons ce qu’a dit l’émir Abdelkader. Il a dit si l’Algérie tombe, le monde arabe tombera aussi. Et c’est exactement ce qui s’est passé. La guerre que nous mènerons contre Israël sera également contre le colonialisme ».

Dans la guerre impérialo-sioniste conduite contre tous les pays qui ont fait partie « du camp de la fermeté », de très fortes menaces pèsent sur l’Algérie, après la destruction de la Syrie, de l’Irak et de la Syrie. Pour cette raison, il est essentiel d’analyser les forces et les faiblesses de ce pays, afin de mieux cerner les véritables risques de déstabilisation dans la période actuelle. A contre-courant des explications, partielles et partiales, parfois superficielles et souvent culturalistes, cet article paru dans le journal libanais « l’Orient le Jour » met en perspective les fondements structurels d’une économie algérienne en panne et des crises politiques récurrentes qui secouent le pays. Ce ne sont ni le poids des traditions, de la culture ou de l’absence d’un « esprit démocratique » qui éclairent cette situation, mais bien l’analyse de la dynamique entre deux dimensions qui se renforcent mutuellement : la dépendance économique (la rente pétrolière) et la nature du pouvoir. Comité Action Palestine

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 par Lina Kennouche (avec Tayeb El-Mestari)

Dans un pays où 97 % des recettes en devises proviennent de l’exportation des hydrocarbures, contrôler le pouvoir permet de contrôler la rente que procure l’or noir.

La réforme de la Constitution algérienne approuvée en février dernier a été accueillie avec enthousiasme par les commentateurs politiques qui ont cru voir dans ses amendements la fin annoncée de la « présidentialisation » accrue du régime (par un transfert de compétences au chef du gouvernement), et une ingénierie constitutionnelle inédite qui empêcherait l’avènement d’une réplique de Bouteflika dans l’ère post-Bouteflika.

Cette lecture naïve traduit une incompréhension de la réalité du pouvoir en Algérie. Derrière les paravents juridiques, la façade légaliste, les décisions se prennent ailleurs, et la guerre de succession fait rage. Au cœur de la lutte pour le contrôle du pouvoir politique, se trouve la Société nationale pour le transport, la production et la commercialisation des hydrocarbures (Sonatrach) dans un pays où 97 % des recettes en devises proviennent de l’exportation de ces hydrocarbures. En Algérie, contrôler le pouvoir permet de contrôler la rente que procure l’or noir, et les crises politiques sont une constante de l’histoire post-indépendance. De l’été 1962 aux révoltes de 1988 et l’hiver 1991 qui plongent le pays dans les affres d’une guerre civile sanglante, les crises politiques d’une intensité et d’une durée variable, entrecoupées par des phases de stabilité, restent systémiques. La répétition de ces crises conduit à privilégier une explication structurelle. Car pour comprendre les enjeux de la crise de succession actuelle en Algérie, encore faudrait-il inscrire solidement cette problématique dans une perspective historique.

Si les révoltes sociales prennent racine dans l’essoufflement de la logique rentière, la crise politique est née d’une rupture de l’équilibre ou d’une remise en cause de la communauté d’intérêts économiques qui unit les différents clans du pouvoir.

Historiquement, dès l’accession à l’indépendance, l’unité de façade n’a pas résisté aux appétits de contrôle du pouvoir. Dès 1962, le Front de libération nationale (FLN) est déchiré par des luttes intestines et les rapports de force se structurent en fonction de la capacité à rallier les soutiens de l’élite politique du mouvement. Des clans se constituent et se renforcent autour d’affinités idéologiques ou d’alliances de circonstances. Mais cette réalité difficile à pénétrer n’en demeure pas moins le produit de l’histoire coloniale. Tandis que dans l’expérience des sociétés occidentales l’avoir donne accès au pouvoir, dans les pays anciennement colonisés, le processus historique d’accumulation de capital par une classe sociale bourgeoise ne recouvre aucune réalité historique.

L’histoire précoloniale, qui témoigne des formes de propriétés collectives et de l’indivision des terres tribales fondant l’équilibre agraire de la société traditionnelle, et, par la suite, celle de la colonisation et de la pénétration capitaliste, donnant naissance à deux sociétés parallèles distinctes non intégrées, expliquent largement l’absence d’une classe sociale capable de prétendre à la direction politique de la société. La pénétration capitaliste et l’importation des produits manufacturés de la métropole ont bloqué l’émergence d’une industrie locale.
À cet égard, la réflexion de Frantz Fanon sur le concept de bourgeoisie nationale dans les sociétés colonisées est édifiante : « Dans un système colonial, une bourgeoisie qui accumule du capital est une impossibilité. » Le colonialisme a produit une réalité sociopolitique qui façonnera l’avenir de la société algérienne : un capitalisme bloqué, où les élites civiles, sociologiquement faibles, sont politiquement impuissantes face à un corps constitué et discipliné qu’est l’armée.

Dépendance structurelle
Sous l’ère du président Houari Boumediene, la nationalisation du pétrole trouve sa justification dans la volonté de s’affranchir de la tutelle de l’ex-puissance coloniale et d’impulser un développement autonome dont l’industrialisation constituerait la pièce maîtresse. Mais, d’un côté, la politique de développement d’une économie nationale trouve ses limites dans le choix de la stratégie des industries, fortement capitalistiques, qui ont recours aux techniques étrangères, mais sans transfert du savoir-faire technique et scientifique, et dépendant pour leurs débouchés des marchés étrangers. D’un autre côté, elle favorise l’enrichissement de la classe dominante, qui conçoit la rente comme instrument d’une modernisation économique par le haut sans que celle-ci ne soit soutenue par un effort productif de la société.

Ainsi, dans les années 70, au plus fort de la stratégie de développement par l’industrialisation, l’Algérie perpétue sa dépendance au marché international. En lieu et place d’une économie autocentrée, la société algérienne s’ancre dans le développement du sous-développement. Avec l’avènement du président Chadli Bendjeddid, la rente des hydrocarbures s’accompagne d’un recours massif aux importations. L’ouverture du marché aux biens de consommation importés accentue la logique rentière et l’économie parallèle, permettant l’enrichissement de nouveaux clans, principaux bénéficiaires des politiques économiques libérales qui se perpétuent jusqu’à l’élection du dernier président Abdelaziz Bouteflika. L’État producteur de la rente se transforme progressivement en une institution fonctionnelle d’un capitalisme où prospère une néobourgeoisie compradore. La diversification des partenaires économiques au niveau international et l’encouragement de l’initiative privée n’ont pas été en mesure de mettre fin à la dynamique de dépendance. La rente a constamment révélé l’affrontement entre un pouvoir obsédé par sa pérennisation, pour maintenir son accès privilégié aux ressources, et une société renvoyée à la violence sporadique pour exiger une redistribution des bénéfices de cette rente.

La dénonciation régulière des pratiques autoritaires, de prévarication et de corruption, ne remet pas fondamentalement en cause le fonctionnement du pouvoir, dans la mesure où l’économie dépendante et rentière favorise souvent et exclusivement des mobilisations contestataires exigeant une redistribution équitable des richesses sans jamais remettre en cause les modalités de son exercice. La dépendance économique structurelle est donc renforcée par la manière dont s’exerce le pouvoir.
En dépit du constat que la crise de succession cristallise aujourd’hui la lutte des clans au sein du pouvoir pour le partage du gâteau de la Sonatrach, il semble que l’intérêt collectif de ces derniers converge vers une résolution pacifique des différends, nécessité renforcée par l’ampleur des défis régionaux, dans un contexte régional volatile marqué par l’instrumentalisation de la menace jihadiste et la permanence des ambitions géopolitique extérieures. Si seule une transformation radicale du système et l’impulsion de mécanismes endogènes de développement esquisseraient les premiers pas vers la sortie de la dépendance, les transformations du système-monde et l’affaiblissement stratégique des États rendent cette perspective de moins en moins réaliste.

http://www.lorientlejour.com/article/982597/en-algerie-la-lutte-des-clans-pour-le-partage-de-la-sonatrach.html

 




Rencontre-Débat « L’Etat ou la fabrique de l’islamophobie identitaire » avec Said Bouamama, 29 avril 2016

Le Comité Action Palestine vous invite à une rencontre-débat avec Said BOUAMAMA

le 29 avril 2016

de 20h à 23 h

Athénée municipal, Bordeaux

Place St Christoly

Tram A et B, arrêt Hôtel de ville

En 2015, le terrorisme a frappé la France, comme il frappe partout dans le monde, notamment en Afrique et au Moyen Orient. En Palestine en particulier, la terreur de l’Etat colonial israélien sévit quotidiennement depuis près de 70 ans. Après la légitime émotion, il incombe de comprendre les causes de cette violence et d’en envisager toutes les conséquences.

La société française paie le prix de sa politique belliqueuse et à courte vue, menée par les deux derniers gouvernements en Lybie, au Mali, en Centrafrique, et aujourd’hui en Syrie, sur la base d’une alliance avec les Etats rétrogrades du Golfe et l’entité sioniste.

Cette politique a des effets désastreux sur la minorité musulmane qui subit depuis bien longtemps cette stratégie de diversion raciste et islamophobe.

 Car les attentats sont l’occasion rêvée pour renforcer les lois répressives et discriminatoires. L’instauration de l’état d’urgence (mis en place pour la première fois pendant la « guerre d’Algérie » pour contrer le mouvement de libération), et le débat sur la déchéance de nationalité visant les binationaux  (projet aujourd’hui enterré) marquent le racisme institutionnel d’une virulence sans précédent.

Même s’il est en marche depuis longtemps, ce processus s’est accéléré en 2015. Les attentats n’en sont pas la cause, mais le catalyseur. Les objectifs sont dès lors très clairs.

Dans une situation de crise économique aigue, il s’agit en interne d’empêcher toute contestation sociale et politique unifiée en mettant en place un système ultra-répressif et faire de l’arabo-musulman le bouc émissaire idéal. Manuel Valls a clairement posé la primauté de la question identitaire sur les questions sociales et économiques. Une diversion politique classique qui prend les contours des expériences fascistes connues en Europe dans les années 1930.

Cette politique à double détente consiste aussi à censurer et contrecarrer toute forme d’expression de solidarité avec la résistance à l’impérialisme occidental, et notamment en Palestine. On assiste à une normalisation de l’islamophobie qui a été instillée dans la société française depuis des années, pour créer un état de tension permanent entre la minorité musulmane et le reste de la population.

Dans ce contexte, il s’agit de comprendre le processus en cours et de s’interroger sur les stratégies que les mouvements populaires antiracistes et anti-impérialistes, notamment pro-palestinien, pourraient mettre en œuvre pour continuer le combat. C’est cette réflexion que le Comité Action Palestine vous propose de mener au cours d’une rencontre avec Saïd BOUAMAMA, sociologue, militant et spécialiste de la lutte contre les discriminations.

 




Journée de la terre en Palestine – Seule la Résistance viendra à bout du sionisme!

Comité Action Palestine (mars 2016)

Le 30 mars 1976, six Palestiniens de l’intérieur (c’est-à-dire ceux qui ont pu rester en 1948 après la création par la force de l’état d’Israël) étaient abattus par l’armée d’occupation d’Israël, 96 blessés et 300 autres étaient arrêtés. Leur crime ? Avoir manifesté contre l’État sioniste qui avait confisqué et déclaré “ zone militaire ” 1700 hectares appartenant à des villages palestiniens.

                Depuis, tous les 30 mars, la “ Journée de la Terre ” commémore cet événement partout dans le monde où se trouvent les défenseurs des droits du peuple palestinien.

Cette journée est avant tout symbolique. Rappelons qu’en 1948, l’Etat juif avait expulsé près d’un million de Palestiniens et détruit plus de 400 villages. La majeure partie des terres palestiniennes avait été confisquée dans la perspective de fonder le “ Grand Israël ”. Dès lors, cette politique de confiscation des terres en vue de judaïser la Palestine (c’est-à-dire voler des terres aux Palestiniens pour les donner aux juifs), s’est poursuivie sans relâche et s’intensifie, accumulant crimes de masses, assassinats de leaders politiques et emprisonnements de résistants : la colonisation de toute la Palestine est inscrite au cœur du projet sioniste. Avec le développement des colonies qui vole chaque jour plus de terre aux Palestiniens et la judaïsation actuelle de la vallée du Jourdain, du Naqab, d’al-Quds et des lieux saints, rien ne semble arrêter cette machine à tuer et à coloniser.

Pourtant, depuis la création de l’Etat d’Israël, le peuple palestinien a toujours résisté à cette terrible entreprise de destruction de sa société, soutenue par les pays occidentaux et en particulier les Etats-Unis et la France. Depuis quelques mois, la résistance s’est ré-activée avec l’Intifada al-Aqsa. Face à l’absence d’évolution politique suite aux guerres de Gaza et aux menaces grandissantes sur les lieux saints, surtout la Mosquée al-Aqsa, un mouvement populaire spontané a pris naissance dans toutes les parties occupées de la Palestine. De manière imprévisible et indépendamment de toutes organisations, les coups sont portés au cœur de la société coloniale et mettent en péril un des fondements existentiels de l’entité sioniste qui est la sécurité du colon. La peur change de camp et tout le système colonial est en crise. Dans ces conditions l’Autorité palestinienne révèle encore plus son rôle de supplétif du pouvoir sioniste, en témoigne l’assassinat récent par le Mossad de Omar Nayef, militant du FPLP qui s’était réfugié à l’ambassade de l’Autorité palestinienne en Bulgarie.

Sur la durée, cette stratégie populaire d’usure, conduite par une jeunesse palestinienne qui n’a rien à perdre, peut pousser le pouvoir colonial à des concessions majeures. Par le type d’actions menées, les Palestiniens envoient deux messages principaux sur la nature de leur résistance et l’objectif de leur lutte. En s’attaquant à tous les membres de la société coloniale, ils démontrent que pour eux il n’y a pas de différence entre la population et les forces armées gouvernementales. La société israélienne dans son ensemble est coloniale et donc structurellement raciste, violente et oppressive envers les Palestiniens. En exhibant des drapeaux algériens, les résistants palestiniens expriment également qu’ils ont choisi leur objectif, c’est-à-dire la libération totale de la terre de Palestine et qu’en ce sens, la lutte de libération algérienne est leur référence.

Ce nouveau soulèvement a lieu dans un contexte où les rapports de force dans cette région du monde s’équilibrent. Alors qu’une situation de chaos prévalait en Syrie avec une perte progressive des territoires contrôlés par l’armée régulière syrienne, pourtant soutenue par le Hezbollah et l’Iran, l’intervention de la Russie en septembre 2015 a radicalement changé la donne. Pour l’instant, la stratégie impérialiste, dont l’objectif était de faire tomber Bachar al-Assad, a totalement échoué.

Par ailleurs l’Iran se trouve renforcé sur les plans stratégique et économique suite à la signature des accords sur le nucléaire. Le conflit s’enlise au Yémen, un échec politico-militaire du bloc impérialiste, en particulier un échec de la stratégie saoudienne. La Turquie, qui affichait sans scrupule son soutien aux forces anti-Assad, se trouve à son tour déstabilisée par une vague d’attentats terroristes. De plus, toutes les tentatives de l’Arabie saoudite de mobiliser les Etats arabes contre l’axe de la résistance au sionisme s’avouent particulièrement peu efficaces. La dernière initiative qui a conduit la Monarchie wahabbite à déclarer le Hezbollah comme organisation terroriste ne fait que renforcer la notoriété de ce dernier auprès des masses arabes et des mouvements de résistance. Dans cette guerre entre deux modèles socio-économiques et politiques co-existants dans cette région, celui de l’Arabie saoudite qui renvoie à une économie libérale et rentière, et celui de l’Iran basé sur une économie nationale privilégiant un développement autonome, il semble que l’Histoire est en train de trancher. L’impérialisme, avec ses vassaux arabes et turc, est en très grande difficulté malgré les moyens militaires et financiers gigantesques mis en œuvre pour soumettre les peuples arabes.

En France, les attentats de 2015 ont conduit à un renforcement du tout sécuritaire consacré par l’état d’urgence à durée indéterminée, de la criminalisation de l’antisionisme et des soutiens au peuple palestinien, des atteintes à la liberté d’expression et du racisme institutionnel. Cependant aucune stratégie claire n’apparait en matière de politique étrangère, la France étant prête à faire évoluer ses positions particulièrement bellicistes en fonction de ses intérêts économiques et de sécurité intérieure. Elle semble avoir énormément de mal à choisir entre les opportunités immenses offertes par le marché iranien et l’écoulement des produits de son industrie militaire vers l’Arabie saoudite et les Etats arabes vassaux. Le soutien inconditionnel de l’Etat français à l’entité sioniste s’exprime par la répression des mouvements antisionistes et les forces populaires issues de la colonisation, naturellement solidaires de la lutte palestinienne. Il est urgent, et en écho avec la résistance en Palestine, de s’organiser pour construire un mouvement antisioniste uni autour de principes anticolonialistes clairs que sont les principes d’auto-détermination et de libération de toute la Palestine arabe.